Des éléments et des enjeux qui s'enrichissent
Le premier arc de Re:Zero visait surtout à poser les premières bases de l'oeuvre, avec l'arrivée de Subaru dans le monde fantasy, la rencontre d'Emilia pour qui il s'est battu afin d'obtenir sa confiance et le concept de Mort réversible. Le deuxième arc promet alors, forcément, d'entrer un peu plus dans les choses sérieuses, et c'est bel et bien le cas, en premier lieu en évoquant enfin ce qui manquait un peu trop à l'arc 1 : des enjeux plus importants dans ce monde, et plus précisément dans le Royaume de Lugnica où Subaru s'est retrouvé.
Ainsi, tout en s'acclimatant à la vie dans le manoir, Subaru va, tout au long de ce deuxième arc (et surtout dans la première moitié de celui-ci), être amené à découvrir un peu plus certaines choses au contact des pensionnaires du manoir. Suite à une épidémie qui n'a touché que la lignée royale en la poussant à son extinction, le Royaume n'a plus d'héritier. Actuellement, la gestion de l'Etat est faite par le Comité des Sages, un groupe d'illustres individus bien organisés, mais un Royaume ne peut rester sans Roi, et les prétendants semblent être plusieurs, rendant alors la vie au Royaume peu paisible, car forcément les rivalités et manigances risquent d'être de la partie... En cela, le scénario vient expliquer comme il se doit les quelques mystères du tome 1, autour de l'importance de l'insigne volé qu'Emilia recherchait, et le tout installe tranquillement des enjeux plus importants autour de la belle demi-elfe, puisqu'elle fait partie des prétendants au trône.
Mais l'univers ne s'arrête pas à ces considérations de lutte pour le trône, et les auteurs des différents supports, via certaines conversations, parviennent à distiller bien d'autres petites informations sur les spécificités de ce monde, en tête la magie. Informations sur le statut de magicien, utilisation du mana comme source d'énergie pour des éléments du quotidien (par exemple pour chauffer l'eau du bain), ce qu'est le portail (la porte qui permet au mana de sortir, un peu comme un robinet), la division de la magie qui est régie par 4 attributs (feu, vent, terre, eau) et 2 spéciaux (la Lumière et les Ténèbres), le danger du drain de mana qui peut entraîner la mort...
Subaru apprend également la légende selon laquelle le Royaume de Lugnica aurait conclu un pacte avec un dragon qui lui prête son pouvoir pour le protéger des menaces, d'où le nom de Royaume "draconique" de Lugnica. Le dragon veillerait sur le pays depuis la Grande Cataracte. Mais vu que la famille royale s'est récemment éteinte, son successeur aura une forte pression en signant un nouveau pacte...
Puis notre héros, tout comme le lecteur/spectateur, ne peut qu'être intrigué par l'évocation de la Sorcière de l'Envie et du culte de la sorcière.
Enfin, le jeune garçon a aussi l'occasion, pour mieux comprendre ce monde et s'y immerger, d'apprendre l'écriture et la lecture de la langue de ce monde. Cela lui permettra notamment de lire certains contes, et d'en conter lui-même.

Bienvenue au manoir Roswaal !
En somme, l'oeuvre semble réellement décoller peu à peu dans ce 2e arc, qui installe beaucoup plus de choses et apporte plus de consistance à un univers qui restait assez peu défini dans le premier arc. Et toutes ces découvertes, Subaru les fait en même temps que celle des personnages vivant au sein du manoir de Roswaal, un lieu où il demande d'abord à devenir domestique afin de rester auprès de sa rayonnante Emilia.
Notre héros découvre d'abord la grande propriété du manoir de Roswaal, son bâtiment imposant, ses jardins, ses repas... et c'est dans ce cadre qu'il devra désormais jouer les domestiques, afin de rester auprès d'Emilia. Emilia, dont le charme, le sourire et la gentillesse l'ont instantanément conquis, et qu'il va enfin pouvoir découvrir plus profondément, maintenant que son premier jour dans ce monde est enfin définitivement passé. Le voici pouvant admirer son statut de demi-elfe, s'amuser de son côté naïf et de ses insultes démodées, découvrir son statut d'invocatrice, apprendre quelles sont ses ambitions qui font qu'elle loge dans ce manoir... et, bien sûr, se rapprocher d'elle. A certains moments, l'arc 2 de Re:Zero se pare alors d'une ambiance plus axée tranche de vie, un aspect qui était absent du premier tome.
Mais la jolie demoiselle à la chevelure argentée est loin d'être la seule à côtoyer Subaru, car qui dit nouveau cadre dit nouveaux personnages, à commencer par le maître des lieux, Roswaal L. Mathers, marquis et magicien de la cour, dont le caractère un brin exubérant et le look de bouffon ne l'empêchent pas d'être le plus puissant magicien du royaume. Accueillant à bras ouverts Subaru en qui Emilia a placé sa confiance, l'homme doit néanmoins s'assurer que notre héros est digne de confiance et n'est pas un espion...
La première nouvelle rencontre que Subaru fait au sein du manoir est néanmoins Béatrice, lolita hautaine qui prend vite l'adolescent en grippe à cause de sa tendance à briser par hasard ses portes dimensionnelles, qui lui servent à s'isoler, coupée du temps et du monde. Son rôle de bibliothécaire de l'étude interdite du manoir, où elle protège les livres de magie dangereux de Roswaal, en font sans nul doute une figure importante, et elle ne tardera pas à le confirmer : au-delà d'un côté humoristique du à ses rixes avec Subaru et à sa passion dévorante pour Pack, la fillette (mais en est-elle vraiment une ?) va petit à petit devenir une aide précieuse à certains moments, et montrer ses bons côtés.
Viennent, enfin, les deux demoiselles qui ont fait décoller la popularité de la série en animé en 2016 : Ram et Rem, les jumelles domestiques. Deux soubrettes qui, à elles seules, doivent gérer toutes les tâches domestiques du grand manoir, et s'en chargent avec une application admirable et en se partageant les tâches, chacune ayant ses spécialités. Au-delà des clichés de jeunes jumelles soubrettes mignonnes à souhait qu'elles dégagent, les deux demoiselles amusent très vite, dès leur première apparition, de par leur connivence totale et la parfaite compréhension qu'elles ont l'une de l'autre, n'hésitant alors pas à se lancer dans des taquineries pince-sans-rire parfois assez osées sur Subaru. Mais au-delà de leur aspect mignon et de leur application dans les tâches ménagères, les deux demoiselles pourraient bien cacher des choses, à commencer par une certaine défiance envers notre héros sorti de nulle part, et celui-ci aura donc fort à faire pour gagner leur confiance.
Tel est le nouveau cadre de vie de Subaru, cadre bien posé dans ce deuxième roman tome. On cerne bien les différents personnages, on s'attache facilement à eux si l'on n'est pas allergique à certains poncifs (les différents visages, Ram et Rem en tête, rentrent totalement dans les clichés malgré leur efficacité... mais Subaru lui-même en a conscience dans ses réflexions, ce qui rend le tout plutôt amusant à observer), et l'on apprécie facilement de voir le jeune garçon chercher à bâtir des liens avec son nouvel entourage... Mais ces liens, même s'il parvient à les bâtir, pourront-ils subsister ?

Nouvelle boucle infernale...
En effet, le romancier original Tappei Nagatsuki, avec ce deuxième arc, continue évidemment d'exploiter son concept de la Mort réversible, et ici ce pouvoir va bousculer en profondeur Subaru en prenant de toutes nouvelles proportions, dès lors qu'il meurt une première fois sans savoir pourquoi, dans son sommeil, sans rien sentir, et se retrouve donc à devoir revivre ses 4 premiers jours au manoir. Et il ne s'agira pas de sa seule mort...
Plus que jamais, Subaru prend conscience ici de toute la douleur que peut impliquer le fait de revenir en arrière et d'être le seul à se souvenir des précédentes boucles : en un instant, il peut perdre absolument tout ce qu'il avait bâti avec Emilia et avec les autres pensionnaires du manoir. Dans les textes de Nagatsuki tout comme dans les dessins de Fügetsu et la réalisation de White Fox, on ressent très bien cette douleur profonde, ce sentiment de détresse en voyant que Rem, Ram, Beatrice, Roswaal et surtout Emilia agissent comme si c'était le premier jour... Au-delà de son désespoir, le jeune homme va devoir tout reconstruire, renouer les liens perdus, retrouver le moyen de passer son serment avec sa chère Emilia... Mais malgré toute sa détermination, cela suffira-t-il ? S'il ne change rien, il mourra à nouveau à coup sûr au bout du 4ème jour, et il lui faut alors comprendre. Comprendre comment et pourquoi il est mort, qui est l'assassin, si celui-ci s'est aussi attaqué aux autres pensionnaires du manoir... Pour cela, il va peut-être devoir enchaîner les boucles, sacrifier sa vie et tout reconstruire à chaque fois, en espérant récolter peu à peu des indices. Mais malgré toute l'obstination qui fait le charme de Subaru, l'écrivain Tappei Nagatsuki ne sera vraiment pas tendre avec son héros, en le faisant passer par nombre d'étapes très cruelles : des morts très brutales et sanglantes que l'auteur prend plaisir à étirer et à décrire un peu (Subaru morfle vraiment, on peut le dire), des liens qui se brisent encore plus douloureusement qu'il ne le pensait avec des personnages qu'il a pourtant appris à adorer... Sans oublier l'impossibilité pour lui de parler de la Mort réversible aux autres, une chose qu'il comprendra là aussi de façon douloureuse. Sa détermination est alors réellement mise en péril, on découvre parfois un Subaru anéanti et désespéré, ce qui le rend plus touchant. Mais cela suffira-t-il à lui faire baisser les bras ?
Ce deuxième arc se pare alors d'enjeux différents du premier arc concernant la Mort réversible et les boucles, car là où dans la première partie de la saga Subaru savait très bien comment et pourquoi il mourait, ici au départ il n'en sait strictement rien et doit alors enquêter, tout en prenant soin de renouer ses liens avec son entourage, et de continuer à en découvrir plus sur ce monde. Pour cela, plusieurs techniques s'offrent à lui. Se calquer sur les événements déjà vécus dans la boucle précédente et en modifier simplement le résultat suffira-t-il ? Faut-il opter pour une approche différente ? Même si, pour ça, il doit à nouveau mourir plusieurs fois et très atrocement, il avance, petit à petit, dans un arc qui équilibre très bien ses différents axes.

©Tappei Nagatsuki / Shinichirou Otsuka KADOKAWA CORPORATION MEDIA FACTORY
De Karakuri [3546 Pts], le 22 Juin 2018 à 20h39
Un dossier parfait, bien complet qui aborde tout ce qui fait la richesse de Re:zero. Je vois souvent Re:zero critiqué gratuitement (le mal de toutes les séries populaires je pense) et ce dossier lui redonne ses lettres de noblesse en montrant tout ce qui fait sa force. Les personnages sont fanservice (surtout Rem dans la suite et c'est le perso que j'aime le moins) mais sont attachants et tout le reste est du vrai bon divertissement bien fichu et l'auteur sait se renouveler (son approche différente des boucles dans cet arc le montre). Bravo Koiwai pour cet excellent boulot !