Pokémon - La Grande Aventure : Or, Argent & Cristal - Actualité manga
Dossier manga - Pokémon - La Grande Aventure : Or, Argent & Cristal

Des chamboulements en cours de route


L'arc Or et Argent de Pokémon : La Grande Aventure a pour particularité une certaine rupture, aux alentours du tiers de son déroulement. Et pour en comprendre les origines, il faut s'intéresser au projet initial du manga. A l'origine, Pokémon : La Grande Aventure devait être d'une durée plutôt succincte, à savoir une petite année de parution environ. Une durée prévisionnelle qui était sans doute due au facteur inconnu, puisque personne ne pouvait prédire le succès qu'aurait Pokémon à terme. A cette époque, l'engouement avait permis l'émergence de la version Bleu, certes, mais le timide succès (dans un premier temps) de la saga ne permettait peut-être pas de prévoir un manga qui continuerait encore en 2020.

Le succès fut celui qu'on lui connait, et le très apprécié manga "La Grande Aventure" continua. Lorsque démarre la prépublication de l'arc Or et Argent, le titre entame sa quatrième année de parution, et la dessinatrice Mato n'était peut-être pas prête pour un telle projet. Épuisée, et souffrant de plusieurs soucis de santé (comme une faiblesse à la main), elle est contrainte de s'écarter du projet et de laisser sa place de dessinatrice. Satoshi Yamamoto, un artiste qui avait déjà quelques expériences, reprend le flambeau après avoir soumis une candidature. Toutefois, un impératif semble lui avoir été fixé, selon ses propres dires : Faire en sorte que son dessin se rapproche de celui de Mato qui était particulièrement apprécié du lectorat. Et en effet, la différence entre les deux pattes n'est pas la plus évidente à distinguer. Le trait de Mato se voulait plus rondouillard tandis que celui de Satoshi Yamamoto s'avère plus mure, donnant même aux personnages plutôt jeunes des courbes parfois adultes (ce qui se voit sur les figures féminines, notamment). Mais le contrat a été honorer, et le "La Grande Aventure" selon Satoshi Yamamoto est dans la droite lignée de celui de Mato, mise en scène incluse.


On peut alors se questionner sur l'impact de ce changement, en plein arc narratif. Le fait que Mato ait tiré sa révérence en cours de récit et non entre deux cycles prouve qu'il y avait une certaine urgence, et qu'il allait de la santé de la dessinatrice de ne pas lui donner de répit. Pourtant, un timing a été trouvé. La sortie de la version Cristal permettait de diriger le récit vers une autre phase, un coche qui sera saisit pour assurer la transition. Si le cycle de seconde génération forme un seul et unique arc, au contraire du premier cycle clairement divisé en deux parties, Or et Argent (mais aussi Cristal) donne naissance à un tout répondant à des enjeux communs. Il y a pourtant une rupture dans cet ensemble, un redémarrage dès le second tome de notre édition. Alors, il est difficile de dire si cette construction scénaristique a été pensée par Hidenori Kusaka d'entrée de jeu, ou si celui-ci a repensé sa trame pour coller au changement de dessinateur, et ainsi permettre à Satoshi Yamamoto de reprendre le projet sur des bases saines plutôt qu'en plein tumulte.

Cette deuxième hypothèse expliquerait donc le cheminement de l'arc Or et Argent. Mais du point de vue du lecteur, si le parti-pris se comprend, il peut y avoir une certaine redondance dans l'appréciation du récit. Il faut dire que c'est sur sa toute fin de premier tome que l'arc faisait monter la sauce en donnant un véritable but à Or et Argent, et montrant l'ennemi à vaincre. Alors, les mettre de côté pour montrer le parcours parallèle de Cristal était osé, et peut encore rebuter aujourd'hui. D'autant plus que le départ de la jeune dresseuse s'éloigne de l'intensité narrative de la fin du premier tome : Le récit reprend effectivement un schéma routinier, pour ne pas dire linéaire, et amène un redémarrage assez doux de l'arc. Il y a donc une rupture dans la frénésie du récit, mais a certainement rendu la tâche plus simple pour Satoshi Yamamoto qui pouvait prendre ses marques sur des événements plutôt légers, façonnés de manière symétrique d'un épisode à l'autre, et qui ne le jetait pas dans le grand bain d'entrée de jeu. Le point de vue créatif et ses déboires s'oppose donc au point de vue du lecteur et de l'expérience qu'il peut faire de l'ensemble. Alors, d'une certaine manière, la forme proposée chez nous par les éditions Kurokawa fait le bon compromis. Car d'une traite, le second tome permet de faire retrouver au lecteur, tout doucement mais sûrement, la frénésie des débuts. Car sur une parution d'un tome classique tous les deux mois, peut-être que la cause aurait nettement moins pris.

Enfin, il convient d'achever cette partie sur une note positive en ce qui concerne Mato. Si on aurait pu penser que la mangaka est brouillée avec l'univers Pokémon de par son destin sur la série (l'absence totale de ses travaux dans l'artbook de l’œuvre mettant la puce à l'oreille), il n'en n'est rien. Pokémon : La Grande Aventure conserve son héritage, et l'artiste continue d'en faire une promotion lointaine, à travers son site web notamment. Et aujourd'hui, si Mato ne dessine plus de manga, elle reste une illustratrice active mettant son trait mignonnet au service de différents projets comme des réalisations pour des municipalités, ou même pour des représentations théâtrales. Mato a su rebondir, et c'est tout le bien qu'on pouvait lui souhaiter après de tels tracas.

©2021 Pokémon. ©1995-2014 Nintendo/Creatures Inc./GAME FREAK inc. TM, ® et les noms des personnages sont des marques de Nintendo. POCKET MONSTERS SPECIAL © 1997, 2001 Hidenori KUSAKA, Satoshi YAMAMOTO / SHOGAKUKAN

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