Code Geass - Suzaku of the counterattack - Actualité manga
Dossier manga - Code Geass - Suzaku of the counterattack

Un univers foisonnant…


Atsurô Yomino est une autrice qui a de la suite dans les idées. En se lançant dans Code Geass : Suzaku of the Counterattack, elle ne se rendait peut-être pas compte de l’ampleur que prendrait la série télévisée et son intrigue, comme en atteste les différences entre le Suzaku du premier chapitre et celui de l’anime, des différences dont la mangaka s’excuse et tente de rectifier au fil de la série. Elle ne connaissait donc pas les ambitions d’Ichirô Ohkôchi en se lançant dans ce spin-off manga, mais sa force fut de comprendre les éléments qui s’ajoutèrent à la série télévisée pour les remanier et offrir un univers très différent, riche d’idées, et éviter la redite pure et simple.

Son premier argument est d’imposer une absence de robots dans son intrigue. Le manga présent n’est donc plus un titre de mécha, mais bien une œuvre d’action et de rebondissements qui n’a plus besoin de se soucier des aspects technologiques qui fleurissent dans l’anime, et qui ont aussi causé quelques incohérences narratives. Suzaku of the Counterattack n’est d’ailleurs pas le seul manga à jouer avec cette idée : l’adaptation de Lelouch of the Rebellion n’utilisait pas de robots, ce qui permettait une relecture de l’intrigue originale, non dénuée d’intérêt. Mais contrairement à ce dernier titre qui aurait tout aussi bien pu apporter des robots, Suzaku of the Counterattack joue de cette absence car elle lui permet de développer le concept de Lancelot. Jadis l’unité de Suzaku, il devient ici une panoplie de combat qui améliore les prouesses mentales et physiques du personnage. L’idée de donner une dimension sentai à Code Geass a de quoi faire grincer des dents tant cette mécanique semble à des années lumières des concepts originaux de l’anime, mais Atsurô Yomino exploite cette dimension avec une certaine habileté, notamment en ne partant pas dans des excès et en ne faisant pas de Suzaku un simple justicier. Au contraire, on sera parfois surpris de voir l’uniforme du Lancelot mis de côté, ou tout simplement inefficace sur l’orientation du scénario.

Au-delà de cette dimension nouvelle, la mangaka cherche ici à développer un univers inédit. Au fil des huit chapitres, nombre de mécaniques diffèrent, et certaines écritures de personnages sont aussi remaniées tout en faisant parfois écho à la série télévisée. Le Geass, même dans l’anime, a toujours été un concept abstrait, il était donc aisé pour la mangaka d’en modifier ses codes et de le placer en tant qu’enjeu totalement nouveau pour sa série. Dans Suzaku of the Counterattack, l’utilisation des pouvoirs est différente, mais aussi ses origines. Si le récit semble partir dans des directions diverses au début, beaucoup de chemins finissent par se regroupe et, au final, des éléments que nous avons côtoyés dans la série télévisée n’ont plus rien à voir dans ce titre en deux tomes. Est-ce un mal ? Loin de là puisque cette utilisation différente des éléments et des événements garantit une intrigue qui ne place pas le lecteur en terrain totalement connu. Ce dernier peut-être être surpris par la tournure du récit et le rythme étant effréné, huit chapitres pour l’intégralité de la série obligent, il n’y a jamais de place pour l’ennui. Code Geass : Suzaku of the Counterattack a donc son propre univers, ses propres règles, une plus-value certaine pour ce récit méconnu… tout en sachant que l’utilisation de ces nouveaux codes ne jouent pas toujours en faveur de l’autrice.





… Mais trop peu exploité


Code Geass : Suzaku of the Counterattack, est un titre proposant de très bonnes idées, chose pas forcément simple pour un spin-off destiné à promouvoir une série télévisée, dont la longévité sera souvent réduite. Cela imposait d’emblée un rythme soutenu pour l’œuvre, au sein de ses chapitres, expliquant l’absence de développements autour d’éléments connus, permettant certes d’entrer dans le vif du sujet mais empêchant le nouveau venu de correctement apprécier la série d’Atsurô Yomino.

Car si on apprécie le rythme pour l’enchaînement des événements qui lui permet d’être une lecture qui n’ennuie pas, ses effets que le traitement de cet univers inédit se font furieusement ressentir. Ainsi, l’œuvre ne prend jamais le temps de se poser, bien au contraire. Les séquences se suivent sans qu’on puisse vraiment les savourer, rendant assez difficile l’appréciation de chaque moment fort sur les enjeux généraux de la série, ou sur l’ensemble des personnages.

Plus dommageable encore, tous ces éléments nouveaux dont nous avons parlé, et qui laissent croire à un univers alternatifs efficace sur le papier, ne sont pas correctement exploités. Ou plutôt, ils n’en n’ont pas le temps. Dans l’imaginaire de la mangaka, les tenants et les aboutissants de Suzaku of the Counterattack semblent clair et cela se ressent par la manière dont certaines pistes narratives parviennent à se recouper. Mais toutes ces mécaniques manquent d’approfondissements, ces origines nouvelles aux Geass ne sont jamais expliquées, de même que l’arc final laisse derrière lui beaucoup d’incertitudes alors qu’il aurait pu apporter toutes les réponses nécessaires, ou presque. Le tout est alors propice à la suggestion : en se basant sur ses réflexions et ce qu’il connait des œuvres animées, le lecteur peut se faire ses propres idées des origines du Geass, de la manière dont ce pouvoir est ici exploité par les personnages… Le non-dit est omniprésent dans cette monture manga, ce qui certes lui confère une aura de mystère, mais cela ne s’avère pas convainquant pour un titre au monde aussi complexe que celui de Code Geass. Au final, cette sensation de rush à tous les niveaux a un impact négatif pour celui qui cherche à profiter de la série. Le tout s’enchaînant à tel point que les mécaniques ne sont pas expliquées, le lecteur est souvent laissé dans l’incompréhension, une incompréhension qui atteint son paroxysme sur le chapitre final qui ne laisse pas le temps d’apprécier du danger, ni de la cohérence de la résolution de l’intrigue. En cela, Code Geass : Suzaku of the Counterattack, est une lecture frustrante pour tout adorateur de l’univers.





Le lecteur s’interroge alors facilement sur les raisons de l’expédition de cette série qui est la plus courte parmi les récits mangas de la franchise, si on ne compte pas les anthologies. D’abord, la parution du titre a été laborieuse puisqu’elle s’est étalée sur deux ans. Lors de l’achèvement du manga, la fin de Code Geass R2 n’était pas loin et d’un point de vue marketing, poursuivre le titre en lui permettant d’explorer l’univers de la seconde saison, ou tout simplement de se développer lui-même, était un pari risqué. Car à qui profiterait le manga si aucune diffusion télévisée n’avait lieu, et que l’actualité Code Geass était ainsi réduite ? Peu de titres ont eu le luxe de poursuivre une parution longtemps après la fin de leurs anime, des séries populaires comme Evangelion et Gurren Lagann, mais Suzaku of the Counterattack n’a pas profité de ce luxe… Pourtant, Atsurô Yomino se montre optimiste au point d’espérer le développement de R2 dans son propre manga, une suite qui n’arrivera malheureusement jamais…
  
  
  


© Atsuro YOMINO 2007 © SUNRISE/PROJECT GEASS • MBS Character Design © 2006 CLAMP

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