Wet Moon - Actualité manga
Dossier manga - Wet Moon
Lecteurs
19/20

Les qualités artistiques



Un trait épais pour un environnement étourdissant


Une des grandes qualités de Wet Moon réside donc dans le trait peu commun de son auteur. Il évoque en partie les auteurs underground américains. Il est globalement à la fois précis et épais. Cette qualité du trait se retrouve aussi dans la façon que l’auteur a de dessiner les bulles, très stylisées. D’une manière générale, contrairement à une série moins sérieuse dans le ton comme Bambi, le trait de Kaneko est ici employé à retranscrire les hallucinations de Sata, la moiteur de l’atmosphère, la tension dans l’air. En bref, il doit faire ressortir une sorte de lourdeur ambiante. Et pour cela, à certains moments, Kaneko accentue le détail de certains éléments du décor. Dans les vues sur la mer par exemple, les traits qui représentent les vagues sont très épais et nombreux, pour un rendu assez saisissant. Une autre scène, dans un cabaret, montre des danseuses en tenues d’apparat, leurs robes sont très détaillés et scintillantes. D’une manière générale, lorsqu’une scène montre un décor où sont censés se trouver beaucoup d’objets, Kaneko va parvenir à restituer cette sensation d’abondance, comme les voitures cassées dans une décharge ou les détritus dans un appartement mal entretenu.




Des personnages élégants et des personnages grotesques


Les personnages du manga sont à l’image de ce qu’a l’habitude de faire l’auteur sur ses autres séries. Les membres de la police tels que Sata et Mori, ainsi que Komiyama, sont très élégants, que ce soit dans leurs traits de visage fins ou dans la qualité du design de leurs vêtements.

Mais là où le talent de Kaneko s’exprime, c’est dans les personnages déformés. De nombreux protagonistes secondaires sont difformes, à l’image du chef de la police, énorme et avec tout un appareillage attaché dans son cou, le maire de la ville qui a une énorme boursoufflure dans le cou, ou encore cet agent de sécurité russophone. Tamayama est lui aussi étrange : sa tête est très grosse, ses yeux énormes et hypnotiques. On sent qu’avec ces designs étranges, Kaneko s’amuse, et en profite pour donner du sens à son récit. La boursoufflure du maire n’est-il pas une sorte d’image du cancer qui ronge la ville ? La machine qui semble pomper quelque chose dans le corps du chef de la police n’est pas le message que la ville ou la police se vide de sa substance.



Un contraste noir et blanc de toute beauté


Comme nous l’avons déjà dit, Kaneko utilise particulièrement un fort contraste entre le noir et le blanc, sans gris nuancé. Kaneko n’a jamais vraiment utilisé de trames dans ses mangas, mais dans Wet Moon, la part de noir est particulièrement accentuée par rapport au blanc, et ne correspond plus uniquement aux contours des éléments du dessin, mais aussi à beaucoup d’ombres. Il y a probablement deux raisons à l’utilisation de cette technique : d’une part, Kaneko veut renforcer l’obscurité du récit, d’autre part, il faut probablement référence aux fameux films noirs, qui faisaient appel à cette technique de contraste.




  

Quelques touches de couleur ça et là


Dans la bande dessinée, l’utilisation de la couleur fait partie intégrante de la part artistique de l’œuvre. En francophonie, lorsqu’un auteur utilise le noir et blanc, c’est un choix artistique. En revanche, s’il y a bien une chose qu’on peut dire au noir et blanc en manga, c’est qu’il est rarement choisi : les auteurs n’ont tout simplement pas le temps de colorer leurs planches. Il s’agit conceptuellement d’une perte en qualité (puisque les auteurs ne peuvent pas choisir), mais qui génère d’autres gains (la possibilité de créer plusieurs séries très longues et très riches dans la vie d’un mangaka, bien plus que n’importe quel autre auteur ne travaillant pas à ce rythme).

Dans ses mangas, Kaneko parvient à retourner ce problème en choisissant à certains moments d’insérer de la couleur au milieu d’un flot de noir et blanc. Dans Wet Moon, il s’agit des vêtements de Komiyama, rouges dans certains passages, ou la lune, dorée lors d’une séquence. Cela ne parait pas grand-chose comme cela, mais pourtant, cela signifie que l’auteur parvient à donner du sens artistique à sa couleur. En faisant cela, Kaneko se distingue de ses confrères et gagne encore ses galons d’artiste.

  
  
  

© 2012 KANEKO Atsushi by KADOKAWA

Commentaires

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nolhane

De nolhane [6559 Pts], le 18 Août 2015 à 01h11

19/20

Merci pour ce très bon dossier! je conseil à tous cette série et cet auteur qui valent vraiment la peine d'être plus connu et reconnu ;)

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