Arms - Actualité manga
Dossier manga - Arms
Lecteurs
18/20

Briser les chaines du destin

 

Evolution (in)humaine

 
"Selon vous, qui est le scientifique qui a tué le plus de gens dans l'histoire de l'humanité ?
Ce n'est pas Nobel, qui a inventé la dynamite, ou encore Einstein et sa bombe atomique...
La réponse est Darwin et son évolutionnisme !"

Le fil conducteur majeur de la série est sans conteste la problématique de l'évolution du genre humain. Pour rappel, ce concept scientifique désigne l'ensemble des transformations successives des espèces au cours des génération, qui, par sélection naturelle, aboutissent à leur classification, et s'oppose à l'idée de création, ou une entité supérieure (Dieu) est à l'origine des différentes espèces. L'évolutionnisme s'est répandu à partir du milieu du XIXème siècle notamment grâce à Darwin et à son ouvrage : L'origine des espèces. Il constitue le socle des sciences biologiques actuelles, renforcées plus tard par la découverte de l'ADN et de l'étude du brassage chromosomique lors de la fécondation. Malheureusement, toute théorie connait ses dérives. L'Homme ayant toujours cherché à maitriser la Nature, il en fit de même pour l'Evolution : contrôler le fil de l'avenir humain plutôt que de le laisser au gré du hasard. C'est ainsi qu'au début du XXème siècle apparut une nouvelle théorie, l'Eugénisme. Ses principes se basent sur une discrimination des individus, au nom de caractères raciaux, idéologiques, d'antécédents médicaux,... afin de ne laisser se reproduire que les individus "sains" au détriment des autres. A ces théories, il faut donc bien sur adjoindre des idéologies raciales, et leur mise en application amena aux exactions abominables et inhumaines des camps nazis lors de la Seconde Guerre Mondiale.

Voilà pour la réalité, passons à la fiction : chronologiquement, les premiers évènements d'Arms se situent dans les années 1950, et les cendres du conflit mondial ne sont pas encore éteintes. L'organisation naissante des Egregoris se basait déjà sur les archives des expérimentations humaines des japonais et des allemands, et la découverte de la météorite Azazel constitua pour le groupuscule une occasion inespérée de pouvoir faire un bond en avant. En outre, Keith White, d'origine allemande,  fut éduqué par les jeunesses hitlériennes, et garda à l'esprit les concepts eugénistes et le sentiment de supériorité de la race aryenne dont il est l'un des représentants. Le but des Egregoris est donc d'engendrer par eux-mêmes le futur du genre humain, pour se mettre à l'égal de Dieu. Pour cela, plusieurs approches sont menées : la plus répandue d'entre elle est la cybernétisation. Parmi les multiples ennemis que devront affronter les héros, nombre d'entre eux sont des cyborgs, n'ayant plus que d'humain leur tête, ou a minima, leur cerveau. Plus tard, nous découvrons leurs successeurs naturels : les Next, androïdes dont la conscience est contenu dans un ordinateur central loin de leurs corps. Ils disposent ainsi d'une certaine immortalité, en pouvant renouveler leurs corps tout en conservant les mêmes souvenirs. Mais plus les progrès technologiques avancent, plus ces soldats-là perdent de leur humanité.  L'autre approche menée par les Egregoris se base sur la génétique et le clonage humain, pour améliorer certaines capacités. Outre les Enfants Chapel évoqués précédemment, ces mutations permettent également la révélation de pouvoirs paranormaux (télépathie, télékinésie, régénération,...), que nous pouvons découvrir au sein des X-Army, des Red Caps ou encore des Hounds. En plus de ces individus créés par les Egregoris, il faut également rajouter les surhommes "naturels", enfermés par l'organisation au sein de la prison d'Asayram.

Les Arms constituent une sorte de brassage de ces différentes technologies, puisque les futurs porteurs ont un patrimoine génétique constitué artificiellement afin de pouvoir maitriser le pouvoir du Core implanté en eux. Azazel étant un organisme métalliques, les Arms sont également à la frontière entre l'homme et la machine et peuvent disposer de pouvoirs paranormaux également. Mais pour arriver à un tel résultat, combien de millier de vies furent sacrifiées ?  Tous ces cobayes entre la vie et la mort, ne pouvant plus vivre que sous assistance de machines, peuvent-ils être encore considérés comme des humains ? Si la série emprunte beaucoup aux thèmes récurrents de science-fiction et d'anticipation, nous ne sommes en réalité qu'à un pas de telles manipulations au niveau scientifique. En montrant le pire, l'horreur des théories les plus inhumaines, Ryôji Minagawa et Kyôichi Nanatsuki nous invitent à réfléchir aux problèmes éthiques d'aujourd'hui, comme de demain.
  
    
     
     

La volonté des Hommes

 
"Tu veux que ton âme aussi devienne monstrueuse ?"
 
Alors, comment vivre, comment se sentir humain, lorsque l'on possède un corps qui ne l'est pas ? Nos héros, eux, ont choisi de se battre pour un monde en paix, dépourvu de telles créatures, et où ils pourront retourner à leur vie normale, leurs pouvoirs devenus inutiles. Mais les différents ennemis qui croisent leur route n'ont même pas connu, eux, les joies simples d'une telle existence. Essentiellement, ils n'ont toujours vécu que comme des souris de laboratoire, guidés dans un but fixe. Ainsi, les cyborgs sont généralement de fiers guerriers, et ne vouent leur existence que par et pour le combat. C'est le cas notamment de la Crimson Triad, trio d'élite rencontré au début de l'aventure. Il n'y a pas en eux un désir psychopathe ou sanguinaire, mais ils ont été simplement été conçus uniquement pour cela, et ne peuvent faire rien d'autre, se révèlant finalement bien pitoyables dans leur approche de la vie. D'autres expriment un sentiment de supériorité pouvant tourner à la démence, comme Cliff Gilbert, le leader des X-Army et qui n'hésite pas à se donner lui même le surnom de "Satan", au vu de son pouvoir terrifiant. Il n'y a en réalité que deux échappatoires : les machines de guerre sont généralement inaptes à une vie après la défaite, tandis que ceux qui ont gardé en eux une parcelle d'humanité finiront par se rallier à la bannière d'espérance portée par nos quatre héros. Cette parcelle d'humanité, c'est le dernier fragment de leur âme.

En effet, si la science du corps humain et des différentes expérimentations ne semble plus avoir de secrets pour les Egregoris et pour Keith White, il en est tout autre pour ce qui est de l'esprit humain. Preuve flagrante de cet échec : la colère d'Azazel suite à la révolte d'Alice. Cet assemblage de technologies, d'une conception qui dépasse nos connaissances, jalouse pourtant cette qualité de l'Homme qu'est notre âme, dont il se trouve dépourvu. Si les quatre Cores des Arms originaux se révèlent si puissant et difficilement maitrisables, c'est qu'ils manifestent par eux-mêmes d'une conscience indépendante, révélatrice des volontés d'Alice : colère, loyauté, altruisme et justice. Notons que ces sentiments ne sont pas forcément purs, comme la haine guidant Jabberwock. L'une des maximes principales de l'histoire est : "Un humain ne peut pas perdre contre un Arms". Cette victoire-là se joue essentiellement sur le plan psychique : nos héros sont souvent amenés à livrer des combats intérieurs pour ne pas se laisser engloutir par ses consciences programmées. Ce n'est pas un hasard non plus si Yugo Gilbert, télépathe de son état, rejoint le groupe : elle se révèlera rapidement d'une aide majeure pour faire prendre conscience au héros du rêve et de la réalité. Les dénouements des intrigues majeures ne se situent pas sur le champ de bataille, mais bel et bien dans l'esprit des protagonistes.
     
  

ARMS © 1997 by Ryouji MINAGAWA / Kyouichi NANATSUKI / SHOGAKUKAN Inc.
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