World Embryo - Actualité manga
Dossier manga - World Embryo

Entre mensonges et souvenirs effacés, la face cachée de la réalité


L’une des premières choses que l’on apprend à la lecture de World Embryo, c’est que Riku est un menteur. Dans un premier temps, on pourrait se dire que cela n’a pas beaucoup d’importance. Que nenni. Bien au contraire, cette information aura toute son importance car, du début à la fin de son œuvre, Daisuke Moriyama va exploiter la thématique du mensonge mais aussi celui des souvenirs. Il ne faut bien entendu pas aller chercher bien loin pour comprendre comment ces deux éléments peuvent être liés et produire quelque chose de très intéressant. Le mangaka l’a bien compris et se montrera à la hauteur de nos attentes.

Au départ, les mensonges de Riku nous sont surtout présentés comme une manière pour lui de se comporter vis-à-vis d’autrui. Il ne se montre que rarement sous son vrai jour et à tendance à laisser penser que tout va bien même quand tout va mal. En plus de cela, son comportement va direction influencer les liens qu’il va créer avec les protagonistes qui entrent dans son existence, tels que les membres du FLAG ou encore et surtout Rena. Mais ce qui sera surtout intéressant, c’est que la façon d’agir de Riku va grandement influencer l’évolution de l’intrigue, comme, par exemple, son choix de cacher Neene au FLAG ou encore de ne jamais dire toute la vérité concernant celle-ci. De même, sa capacité à mentir lui sera parfois salvatrice, lui offrant des possibilités de bluff qui lui permettront de se sortir de quelques (très) mauvais pas. 

Au départ, on pense également que le héros de la série est le seul dont le passé est parsemé de mensonges. On ne tardera pas à découvrir que c’est là une lourde erreur. En réalité, pour ainsi dire chaque protagoniste majeur de la série à des choses à cacher et le fait de façon volontaire ou non. Dans certains cas, cela aurait pu finir par se montrer lassant voir inconsistant, par rendre l’intrigue incohérente ou farfelue. Ici, il n’en sera rien car l’auteur parvient à exploiter ce thème avec suffisamment de parcimonie et de justesse pour rendre chaque révélation crédible et pertinente. Et ce qui est d’autant mieux, c’est que Daisuke Moriyama finira même par nous mener par le bout du nez dans le sens où, à plusieurs reprises, ses personnages viendront nous surprendre en nous dévoilant des pans cachés ou jusque-là déformés de leur passé, le tout sans jamais nous frustrer. Dans le même temps, il va également jouer avec ses personnages et les rapports entre eux. Si l’on prend par exemple, et sans trop en dire, Riku et Rena, on se rend compte que la situation telle qu’elle était au départ, à savoir un jeune homme un peu menteur et une jeune fille agacée par ce comportement, va petit à petit évoluer jusqu’à pratiquement s’inverser. Mine de rien, c’est un petit tour de force.

Dans le même ordre d’idée, la thématique des souvenirs perdus, surtout à travers le choc en retour, sera elle aussi exploitée de façon judicieuse dans le sens ou, sans être omniprésente, elle sera régulièrement là pour nous prendre par surprise ou pour faire évoluer l’histoire dans le bon sens.

Au final, Daisuke Moriyama ne manquera pas une occasion de développer ces thématiques du mensonge et de l’oubli et prendra à plusieurs reprises le temps de s’interroger dessus par le biais de ses personnages. Un mensonge peut-il se justifier ? Est-il préférable dans certains cas de mentir plutôt que de dire la vérité ? Quelles conséquences peuvent avoir l’oubli d’une personne, de son passé ? La série aborde la chose de façon accessible tout en offrant, en définitive, de bonnes pistes de réflexion. Elle ne va jamais dans un extrême ou dans l’autre et offre souvent des éléments de réponses nuancés avec justesse. Et c’est là l’un des points qui, indéniablement, fait son charme.





Graphisme et édition


D’un point de vue graphique, World Embryo allie une sobriété certaine à une efficacité la plupart du temps irréprochable. Daisuke Moriyama ne possède pas un trait particulièrement unique en son genre et ses dessins ne sont pas non plus les plus aboutis que l’on puisse trouver. Son style s’avère finalement assez classique, tout comme le design de ses personnages et sa mise en scène. Cependant, le mangaka s’appuie sur son expérience pour proposer quelque chose de tout à fait solide dans le sens que, si l’on est rarement scotché devant une planche, on n’est à aucun moment rebuté par l’un ou l’autre raté. Moriyama peut compter sur sa constance pour nous aider à nous immerger pleinement au sein de l’univers graphique de son récit et, s’il ne réinvente pas la roue, il sait néanmoins parfaitement bien faire usage de ses connaissances pour nous délivrer bon nombre de passages riche en intensité et en émotion.

Plus concrètement, l’univers de World Embryo ne déborde peut-être pas d’originalité au niveau de ses trouvailles graphiques, mais il s’avère malgré tout fort plaisant à découvrir. Les jinki sont plus ou moins réussis et l’on appréciera surtout le principe de cage, les kanshu s’avèrent relativement classes, surtout lorsqu’on commence à en découvrir de nouvelles variantes. Finalement, ce qui va surtout fonctionner c’est le choix de Moriyama d’user de quelques poncifs du genre (Neene et son aspect mignon tout plein, par exemple, ou encore la directrice du FLAG en mode secrétaire aux atouts de taille) afin d’attirer l’œil de façon opportune. C’est un poil racoleur, mais il faut bien avouer que ça fonctionne bien. Heureusement, bien évidemment, le mangaka ne se limite pas à ça. Et c’est surtout vers la seconde partie de l’intrigue que l’identité graphique du titre va vraiment se développer au point de venir très bonne. Si l’on allie cela au savoir-faire de l’auteur, on se retrouve avec quelque chose de franchement plaisant à regarder !

Au niveau de l’édition, il n’y a pas énormément de choses à redire. On a droit à quelques pages couleurs en début de chaque tome (plusieurs pour les cinq premiers volumes, 1 seule ensuite). On notera toutefois quelques changements au niveau de la traduction avec, notamment, le personnage de « Julie » qui devient « Juri » une fois arrivé au septième tome. Ce n’est pas trop méchant mais, au moment de la lecture, cela a tout de même tendance à provoquer un certain flou qui est d’autant plus dommageable que le changement intervient à un moment critique de l’intrigue en partie liée, justement, à ce personnage.
  
  
  


© Daisuke Moriyama / Shonengahosha Co.Ltd.

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