Soul Eater - Actualité manga
Dossier manga - Soul Eater
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18.50/20
…Ouf, un peu d’aspirine, une bonne nuit de sommeil, et ce satané Excalibur ne sera plus qu’un mauvais souvenir. Allez, c’est parti ! Vite, avant qu’il ne revienne…
 
 
  
 
 

Who Will Save Your Soul?

 
Dans l’univers des shônens de qualité (précision importante), il y a deux catégories. Ceux qui réutilisent les anciennes formules avec succès, sans chercher à changer le système, mais qui rendent une copie divertissante et parfois marquante. Puis il y a ceux qui sortent de l’ordinaire, et dont on a l’impression qu’ils ne font rien comme les autres ou qui peuvent être qualifié de « bizarre », simplement parce que la personnalité de leur auteur est telle qu’elle déborde juste des cadres établis.

Soul Eater est de ces titres. En fait, il ne fait pas grand-chose comme les autres : Son dessin est atypique. Ses personnages sont souvent complètement frappés et tous dotés de tics, de phobies et d’obsession, poussées parfois à l’extrême, tout en restant parfaitement crédible en tant qu’humains (un exploit en soi). Le thème et le décor sont sombres à souhait mais on sent une sensation de fun malgré tout, ainsi qu’un style prononcé et une modernité évidente, ainsi qu’une cohérence de tous les instants. Son univers est d’une grande richesse, mais le mangaka juge certainement que trop d’explications ne feraient que souligner les incohérences, et ne s’en embarrasse donc pas, préférant laisser ses lecteurs profiter de l’intrigue, de l’ambiance, et des personnages.

Au premier abord, nous sommes donc invités à une chasse aux âmes, façon exorcisme classique. Des élèves d’une école particulière doivent faire progresser leur partenaire au rang de « Death Scythe », soit une arme digne d’être maniée par le dieu de la mort en personne. Pour ce faire, les meisters, ceux qui ont la capacité de connecter leur âme avec leur partenaire polymorphe afin de tirer parti de leur pouvoir, fauchent les personnages malfaisants inscrits sur la liste du Maître Shinigami, et les armes démoniaques dévorent les âmes de leurs victimes. S’ils parviennent à récolter 99 âmes humaines et une âme de sorcière, Les armes subissent une croissance de pouvoir exponentielle, et débloquent de nouvelles capacités.


 
   

Seulement, très vite, le focus sur cet aspect est un peu mis de côté (mais jamais oublié), car les jeunes élèves de l’école ont fort à faire face aux dangereux ennemis qui menacent la stabilité du monde. Ainsi, le scénario prend vite de l’ampleur, se détache d’une quête qui sonne assez basique, pour devenir complètement fou et sans limite, à l’image de l’univers de la série.

Le monde de Soul Eater est un étrange mélange de normalité et de purs décors. Rien n’est vraiment décrit concernant la situation du monde, sa géographie ou son positionnement par rapport à notre « normalité », mais sincèrement, on s’en fiche. C’est quelque chose d’à-part, à la fois très vivant et complètement artificiel. Shibusen détient un rôle central dans le fonctionnement des institutions et de la régulation des âmes, mais la raison n’est jamais réellement mentionnée. On peut rapprocher sa fonction avec celle d’une Soul Society, mais la ville n’est pas construite dans un endroit inaccessible, mais bien dans notre monde même (dans le Nevada aux USA, précisément !), et il ne semble pas qu’elle maintienne le reste du monde sous sa domination, loin s’en faut. Et puis, où on vont les âmes des personnes ordinaires, et que deviennent réellement celles des personnes assimilées ? Des questions qu’on est en droit de se poser, mais qui ne gênent pas une fois plongé dans l’histoire.
Ce manque de détails et d’explications n’est jamais un obstacle à notre plongée dans l’univers de la série, et seuls ceux qui cherchent réellement une vraisemblance à tout prix seront décontenancés par les règles qui régissent l’univers du titre.

En même temps, le titre ne s’étend pas en longues explications ou tactiques, et préfèrent considérer que chaque élément est à sa place, sans nécessité de l’aborder en profondeur. Si les personnages ne se posent pas de questions, et si l’auteur ne s’embarrasse pas d’explications, qui sommes-nous, pauvres lecteurs, pour venir remettre en doute les divers éléments qui s’étalent dans ces pages ?
Surtout que le titre a des arguments de poids à faire valoir pour nous faire plonger dans son univers de bon gré.


  
 
  

Soul Kitchen


Armes démoniaques, âmes, sorcières, samouraï, folie, ninja, tags, obsessions, loup-garou, dieu… En y réfléchissant bien, Soul Eater regroupe tellement d’éléments bigarrés qu’on a bien du mal à définir la série en quelques mots. À tout prendre, on pourrait voir le titre comme le centre d’expérimentation de son auteur, Atsushi ohkubo, à tous les niveaux, à commencer par le graphisme.

En certaines occasions, un style graphique est quelque chose d’immensément personnel, et certains auteurs savent se faire immédiatement reconnaissables entre mille. La patte d’A. Ohkubo ne laissera en tout cas personne indifférent.
Si on devait essayer de la qualifier, le terme « classe » viendrait sans doute à l’esprit. Son graphisme sait mettre en avant le style des personnages, parfois un peu poseurs, parfois en difficulté, mais qui gardent toujours la volonté de combattre. Le talent de l’auteur dans le découpage de l’action est indéniable, et certains de ses collègues mangaka feraient bien d’en prendre de la graine. Certaines planches sont juste à couper le souffle quand on prend le temps de s’y attarder, tant la mise en scène est étudiée, originale, différente de ce qu’on peut voir ailleurs en manga. Et certaines scènes de combat sont tellement prenantes qu’on a l’impression de combattre aux côtés des personnages, voire de porter les coups avec eux et de ressentir l’entrechoquement des lames et autres formes de pouvoirs.
Le style graphique s’affine au fil des volumes, plus maîtrisé, plus téméraire dans le choix des plans, des visages, de la représentation de certaines scènes (celles mettant en avant la folie notamment). Cependant, l’auteur ne recherche pas la facilité, se lance des nouveaux défis et ne souhaite pas tomber dans la routine. Ainsi, au début du tome 16, qui entame un nouvel arc, il avoue dans sa préface qu’il a décidé de faire évoluer son style parce qu’il « n’y a pas de progrès sans changements, et même si vous trouvez cela moins réussi, je reste persuadé qu’un peu de nouveauté est nécessaire ! »

Les sources du mangaka sont variées, c’est le moins que l’on puisse dire. L’auteur est fan de films d’horreur à la Halloween, Freddy, Jason, ou encore Alien, et la série possède bien ce petit côté occidental dans le choix des antagonistes, notamment l’utilisation des sorcières comme ennemis mortels de Shibusen. On retrouve un petit côté burtonien dans les décors et dans l’ambiance, qui nous rappelleront des films comme L’Étrange Noël de M. Jack ou Les Noces Funèbres. Et les dos des volumes et le look des certains personnages nous renvoient également à une culture plus ou moins typée américaine, ainsi que l’attitude et le look de certains personnages, comme Kirik ou Black Star. Sans oublier Shibusen, qui nous rappellera sans doute par certains côtés un dénommé Poudlard. Néanmoins, les origines japonaises ne sont jamais reniées, ce qui est particulièrement notables quand on assiste à des duels comme ceux de Black Star ou qu’on voit des personnages comme Mifune et Tsubaki. En fait, Soul Eater parvient à condenser toutes sortes d’influences pour donner vie à une œuvre originale à part entière et complètement cohérente, tout simplement. Aucun élément ne fait tâche ou déplacé, et chaque chose semble être à sa place.
Et l’auteur est loin de s’arrêter à ce mélange des genres et des cultures pour enrichir son titre.
 
 



© Atsushi Ohkubo / SQUARE ENIX Co.Ltd.
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