Dossier manga - Shin Takahashi
Lecteurs
18.50/20

Une narration virevoltante

 
Avant d'entrer pour de bon dans le vif du sujet, nous allons d'abord nous pencher quelque peu sur la narration employée par Shin Takahashi et la manière qu'il a de structurer ses récits.
Il a pour habitude de commencer ceux-ci en douceur. On se retrouve face à quelques tranches de vie, on découvre quelques personnages qui auront une importance capitale dans la suite de l'histoire et l'on se laisse bercer ainsi durant une poignée de pages dans l'univers bon enfant que l'on croit avoir découvert, pensant être tombé dans un déroulement très statique de l'action. Puis, tout d'un coup, un premier électrochoc a lieu. Un évènement tragique ou tout du moins important se passe et vient véritablement lancer les choses, nous coupant le souffle au passage. Dans Larme Ultime, il s'agit bien évidemment du premier raid aérien ponctué par la découverte par Shuji des "pouvoirs" de Chise. Dans Fragment, c'est l'attaque de la Junte sur le domicile d'Icolo qui provoque ce choc. Et enfin, dans Le dernier été de mon enfance c'est le meurtre perpétué devant les yeux d'Haru et de Taro. D'ailleurs, Shin Takahashi procède d'une manière quelque peu cinématographique pour ses introductions. L'auteur fait en effet souvent apparaitre un "SHIN Presents!" à la suite de la scène en question, lançant les choses à la manière d'un générique. Et une chose est sûre, c'est particulièrement efficace !

Puis, par la suite, on revient à quelque chose de plus calme, de plus serein. On retrouve à nouveau les protagonistes dans une phase latente, évoluant de manière plus habituelle et prenant le temps de digérer ce qu'il vient de se passer, tout comme le lecteur. Mais tout cela ne dure pas éternellement, et, à nouveau, Takahashi vient nous bousculer de la même manière que précédemment. Ou presque. Car à chaque fois, il insiste un peu plus, fait davantage monter la tension, nous invite à nous plonger de plus en plus dans son récit jusqu'à adopter au final un rythme haletant, empreint d'une certaine frénésie, avant de retomber dans l'apaisement pour conclure son  histoire. Si ce n'est pas forcément perceptible au premier coup d'oeil dans ses séries qui s'étendent sur plusieurs volumes, le temps d'attente entre chaque tome faisant à chaque fois retomber les choses, c'est particulièrement flagrant dans Le dernier été de mon enfance, lorsque les deux héros sont rattrapés par le meurtre dont ils ont été les témoins.

De ce fait, l'auteur, au fil de ses histoires, a su développer une certaine facilité à changer de manière abrupte et radicale le rythme de sa narration. Parfois, cela reste quelque peu surprenant, surtout dans un premier temps lorsque l'on est pas encore tout à fait habitué à son style particulier. Mais petit à petit, il faut bien reconnaitre que cet enchainement et entremêlement de petites scènettes à tendance humoristique et touchantes alternant avec des scènes au ton nettement plus grave et à l'allure effrénée finit par porter ses fruits et à séduire le lecteur.

Enfin, Takahashi possède également une maîtrise assez hallucinante de ses textes. Et là encore, on retrouve une certaine dualité dans ce qu'il produit. Tantôt on se retrouve avec une succession de pages pratiquement vierges du moindre mot. Tout alors se basant sur le ressenti, sur le dessin, sur l'imagination. Et, à l'inverse, par moment il y a tellement de texte, de monologues de la part des personnages, que l'on se croirait dans un roman. A première vue on pourrait penser que ces deux extrêmes coïncident avec les changements de rythme imprimés. Mais il n'en est en fait rien. Le mangaka est tout à fait capable de proposer des scènes terriblement intenses et bourrées de textes, comme il est capable de réaliser des passages contemplatifs dénués de tout propos. De plus, il n'hésite pas non plus à répéter plusieurs fois la même phrase, qu'il s'agisse de la voix off ou des personnages eux-mêmes. L'exemple le plus frappant à ce niveau-là est très clairement Larme Ultime. Les "Nous allons nous aimer" ou encore la description de Chise faite par Shuji réapparaissent à de nombreuses reprises, mais jamais de manière anodine. Au contraire, cela ne fait que renforcer l'aspect dramatique et touchant de l'ensemble. Et ce n'est pas un hasard non plus si, il l'avoue lui-même, lorsqu'il en était à une parution hebdomadaire de cette même série, il lui arrivait de passer six jours à réfléchir et à peaufiner ses dialogues, réalisant l'intégralité des dessins en une seule journée.
 
 
  
  
   

© 2010 Shin Takahashi. All rights reserved

Commentaires

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dkrevenge

De dkrevenge [2696 Pts], le 12 Septembre 2010 à 22h54

18/20

tres bon dossier pour un auteur tres interesssant (et pas vulgaire du tout)

mangashojo

De mangashojo [2662 Pts], le 11 Septembre 2010 à 14h51

je ne connais les manga ni auteur  . j'ai lu le dossier qui est bien realise par shaedhen . Je paratage le meme avis que aurélie sur propos

Aurélie

De Aurélie, le 11 Septembre 2010 à 10h25

Un auteur peut très bien utiliser des enfants dans ses mangas pour leur pureté ou leur innocence, il n’y a aucun problème avec ça. Il n’y a qu’à voir Miyazaki, je n’ai jamais rien vu d’érotique dans ses personnages, ce sont tous des enfants purs et innocents. Chez Shin Takahashi, je vois aussi cette pureté mais ce qui gêne, c’est qu’il sexualise les petites filles. Sinon comment expliquer qu’Iccolo à 13 ans porte des nuisettes avec de la dentelle et que sur la couv du 3, elle ait du rouge à lèvres (ses lèvres devraient être de la même couleur que celle de Blanco) et qu’on voit la bretelle de sa nuisette (en gros, Blanco est habillé mais pas elle).

Autres exemples : la couv de « Larme ultime, vers la lumière » (là, le point de vue est soft mais la moue un peu sensuelle de la fille parait étrange), l’illustration au début de « Love story killed », la petite fille attachée dans les premières pages de « l’étoile des enfants » (encore une gamine les jambes écartées et la jupe sur les cuisses). Toujours dans le même manga, dans la galerie d’illustrations, la première illustration montre Chise et tiens, on voit encore sous sa jupe, que c’est drôle.

Pour en revenir au dessin du volume 1 de Fragment, je vois pas comment on peut souffler dans un tube en l’enfonçant dans sa bouche.

Pour l’illustration que vous avez utilisée, je veux faire remarquer que l’image est très belle mais on voit un très léger trait qui dessine la cuisse de la fille et qui tout d’un coup, laisse apparaître ce qui pourrait y avoir sous sa jupe. Chez lui, rien n’est vulgaire, il reste toujours très soft et suggère beaucoup. Il y a un autre dessin que je viens de remarquer dans votre dossier, c’est la fille avec la glace.

Parfois, je me dis que c’est pas lui qui fait un lolicon mais qu’il fait ça pour aguicher certains lecteurs car je ne pense pas, vu la gravité des sujets qu’il aborde, qu’il destine essentiellement ses mangas aux ados. Pour les gens « normaux », ses dessins passent sans problème mais pour les pervers, certains codes de ses dessins (les vues sous les jupes des filles) ne passent pas inaperçus et il doit en être conscient. C’est peut-être même devenu sa marque de fabrique car combien de fois, on voit ou laisse apercevoir ce qu’il y a sous la jupe de Chise dans Larme ultime. Ok, c’est une lycéenne en mini jupe qui vole donc il peut pas faire autrement mais quand même.

Chacun pense ce qu’il veut mais les moues, les joues rosies, les poses des gamines me dérangent un peu chez Shin alors que chez d’autres qui utilisent souvent des enfants, comme chez Miyazaki, je n’y vois que de l’innocence.

 

 

 

Shaedhen

De Shaedhen [791 Pts], le 10 Septembre 2010 à 22h40

Merci pour vos commentaires !

Etant donné que c'est le premier dossier de cette ampleur que je réalise, je n'étais pas trop sûr de moi, mais apparement ça va ^^

Pour répondre à Aurélie :

Je comprends votre ressenti, mais je pense qu'il y a plusieurs manières d'interpréter les choses. Par rapport à Icolo, il est vrai qu'on la voit assez souvent assise les jambes écartées. On peut y voir une connotation suggestive, mais ce n'est pour moi pas la seule interprétation possible. Cela peut aussi symboliser sa vulnérabilité, d'une certaine manière même si, la série étant destinée à un public plutot jeune, j'opterai pour une deuxième solution qui est de représenter son côté un peu maladroit avec les rêgles de bienséances. Elle adopte une position qu'on peut qualifier de vulgaire soit sans s'en rendre compte, soit de par le fait que son état d'épuisement physique et mental fait qu'elle ni prête plus aucune attention.

J'ai reparcouru le 1er tome de Fragment pour voir la scène du feu à laquelle vous faites allusion. En effet, cela peut prêter à confusion. Maintenant, et en toute honneteté, les deux fois où j'ai lu ce volume cela ne m'avais pas du tout choqué ou interpellé. ( Et pourtant, je ne suis pas le dernier venu quand il s'agit d'avoir l'esprit mal tourné ^^; )

Par contre, en ce qui concerne la réfèrence à l'image ( celle où elle arrose les plantes si j'ai bien compris ? ), je ne comprends pas trop ce qu'il peut y avoir de suggestif.

Griffith

De Griffith [224 Pts], le 10 Septembre 2010 à 17h55

Un très bon dossier sur un auteur que j'apprécie beaucoup. Larme Ultime reste son oeuvre référence et ma préférée. Son style de dessin est assez atypique et c'est ce qui le caractérise.

J'ai tout de même moins aimé Fragment, je pense que l'auteur ne peut pas pleinement s'exprimé à travers un shonen comme celui-ci et il ferait peut-être mieux de retourner à des oeuvres plus sérieuses.

 

Sinon, je ne trouve pas l'érotisme de ses mangas exagérés et surtout, cela s'imbrique parfaitement dans le contexte et donne un réalisme encore plus fort.

Pour moi Fragment reste très très soft et je n'ai pas remarqué tous les détails dont tu fais mention Aurélie, d'ailleurs je n'avais jamais fais attention à ce soit disant côté pervers de l'auteur...

Pour moi le fait qu'il dessine principalement des enfants réside plutôt dans le fait de la pureté que représentent ceux-ci et de toute leur innocence, comme il l'a été justement expliqué dans ce dossier.

Aurélie

De Aurélie, le 10 Septembre 2010 à 16h42

Moi, il y a quelque chose qui m’a toujours dérangée chez cet auteur, c’est, non pas cette « pointe d’érotisme » comme vous dites mais cette « pointe de pédophilie ». Je parierai sans problème que Shin Takahashi souffre d’un lolita complexe.

Pratiqument tous ses perso féminins sont des très jeunes filles, elles ont peu de poitrine et prennent souvent la même pose : assises, jambes écartées et jupe relevée sur les cuisses. Il suffit de faire gaffe à ses dessins et vous verrez que la jupe relevée est un grand classique chez lui. Ah, et n’oublions pas l’angle de Moi, ce qui m'a toujours dérangé chez cet auteur, c'est non pas vue bien choisi de sa part. Tiens, donc, regardez l’illustration que vous avez mis pour le paragraphe « la recette du succès ». Il ne montre jamais rien en détail, tout est dans la suggestion. Je précise que je dessine et que c’est pour ça que je fais gaffe à ce genre de détails.

Il y a même un dessin d’Iccolo dans les premières pages du volume 1 de Fragment qui m’avait bien choquée : la gamine est en train d’attiser un feu avec un tube qui lui prend toute la bouche et je trouve ce dessin très suggestif et je ne pense pas que ce soit moi qui aie l’esprit mal placé. D’ailleurs, Iccolo apparaît souvent nue ou à moitié dévetue dans cette série.

Il peut mettre en scène des femmes comme bon lui semble et être obsédé parce qu’il y a sous les jupes des filles, on s’en fiche, le problème c’est quand la femme a des allures de fillette de 13 ans.

jojo81

De jojo81 [7400 Pts], le 10 Septembre 2010 à 15h29

20/20

C'est vraiment un excellent dossier. Tu as parfaitement su transposer l'univers de Takahashi. Je n'ai le que le début de Fragment et le dernier été de mon enfance. Je me ferais Larme Ultime très rapidement je pense.

Chamine

De Chamine [1437 Pts], le 10 Septembre 2010 à 11h27

18/20

Ces derniers jours j'ai lu successivement Fragment puis Larme Ultime, il me manque plus que le dernier été, et j'ai adoré, j'ai adoré l'auteur, j'ai adoré le style, la poésie, j'ai pleuré devant Larme Ultime, j'ai tiqué des fois, devant la "violence" que le manga pouvait dégager, mais aussi la mélancolie, la tristesse, la doute. Pour moi la façon dont il fait ses mangas est admirable, les dessins, dans les plan intenses sont magnifiques, les couvertures encore plus autant que les illustrations couleurs.

Alors merci pour ce dossier qui arrive à point nommé, il y a peu de spoiler, les aspects qui peuvent gêner ou faire que l'on aime moins le manga sont bien abordés (Ceux ci même qui moi ne m'ont pas dérangée) Ca me donne violemment envie d'acheter le tome qui me manque. Je conseille à tout le monde de lire cet auteur, évidemment, il ne plaira pas à tout le monde mais c'est un auteur qu'il faut avoir testé.

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