Lyla et la bête qui voulait mourir - Actualité manga
Dossier manga - Lyla et la bête qui voulait mourir

Storyboard et style graphique


En se penchant sur le style visuel de Lyla et la bête qui voulait mourir, il convient de différencier deux éléments : le storyboard, et le dessin d'une manière plus générale. En effet, bien qu'il ne soit que scénariste, Asato Konami est en charge du storyboard de la série. Après tout, il n'est pas qu'auteur mais aussi dessinateur puisqu'il œuvrait en parallèle sur sa propre série, de A à Z : Tokugawa 15. De son côté, Eziwa Saita ne signe que la mise en dessin de ce storyboard, une fois celui-ci valide par l'éditeur. En ce sens, tout l'âme de la mise en scène vient plutôt d'Asato Konami, et on ne jugera pas la présentation des événements du récit comme on appréciera la patte graphique pure de la série.

Et c'est peut-être justement cet aspect storyboard qui fait défaut à Lyla et la bête qui voulait mourir. On sens que le scénariste (et storyboarder, du coup), en est à ses débuts, et il manque cruellement de panache lorsqu'il s'agit de donner du relief au découpage, ou du moins à présenter une personnalité. Les planches montrent ce qu'elles doivent montrer pour rendre compréhensible l'action en un seul coup d’œil, pas de soucis de ce côté-là, mais peut-être aurions-nous aimé un rendu plus imagé et poétique. Après tout, la série est assez tragique et les personnages constamment pris au milieu de certains dilemmes. Dès lors, on s'attendait à ce que la narration soit vectrice d'émotion et face ressortir du titre la poésie qu'on était en droit d'attendre. Ce n'est finalement pas le cas, le rendu est assez classique, Asato Konami ne faisant que mettre en scène son histoire, sans tellement chercher à raconter quelques chose par la narration.

C'est donc Eziwa Saita qui intervient pour apporter un peu de profondeur à tout ça. Le dessinateur en est, lui aussi, à ses premières œuvres professionnelles, ce qui se ressent tant il donne l'impression de se chercher au niveau de son style. En quelques chapitres seulement, son trait a énormément évolué, passant d'une patte un peu tremblante mais intéressante dans l'utilisation des différentes épaisseurs de traits et de colorisation, à quelque chose de plus épuré en fin de série, mais justement un peu trop carré au final. Paradoxalement, c'est le style des premiers tomes, celui d'un Eziwa Saita à ses débuts, qui fait mouche. Il est celui qui sied le mieux à la série, notamment pour cette alchimie des traits qui correspond bien à l'hybridité du titre qui associe des notes tragiques à quelques instants d'espoirs, et des personnages humains parfois cruels aux chimères aux physiques d'animaux toujours très touchant dans leur représentation de l’innocence. C'est donc bien le premier tome qui révèle le mieux le potentiel du dessinateur. Pour ces raisons, c'est peut-être aussi le moment le plus puissant de la série, visuellement du moins, puisque c'est ce style qui donne une vraie personnalité esthétique à l’œuvre. Le trait de l'artiste perdant en cachet au fil des chapitres, la fin de la série compte alors sur le scénario, très prenant et rythmé, sans totalement pouvoir s'appuyer sur l'efficacité du visuel. C'est assez dommage, mais l’œuvre aura quand même permis de soulever tout le potentiel d'Eziwa Saita qu'on aimerait retrouver sur une nouvelle œuvre, avec le style qu'il présentait plutôt lors des premiers chapitres de Lyla et la bête qui voulait mourir.


Autour de l'édition


Comme à son habitude, Ki-oon propose une édition à la fabrication solide : une bonne reliure, un papier épais toujours efficace, des pages couleur en guise d'ouverture de chaque volume, et un papier mât pour les couvertures afin de faire brillamment ressortir le trait d'Eziwa Saita, et les couleurs vives de ses illustrations. On notera aussi le rythme de parution efficace, les quatre opus étant sortis la même année, donnant une vie tout à fait honnête au titre chez nous.

La traduction a été confiée à Anne-Sophie Thévenon, traductrice parfois du meilleur comme du pire, bon nombre de lecteurs se souvenant des échecs de traduction que furent L'Académie Alice et Reborn. Pour Lyla et la bête qui voulait mourir, la traductrice s'en sort globalement assez bien. Elle sait adapter ses dialogues au ton de la scène mais aussi au caractère de chaque personnage. Le travail le plus dur a dû être celui d'Aaron, sans aucun doute, l'enjeu étant de retranscrire son parler simpliste, celui d'un enfant, et marquer toute la naïveté du personnage. Le résultat est en demi-teinte : si la candeur d'Aaron est très bien rendue, ce qui permet d'ailleurs un attachement assez fort envers le personnage, on ne peut s'empêcher de croire que sa manière de parler aurait pu être davantage renforcée. Pour la chimère souvent comparée à un enfant qui n'a jamais été éduquée, ses phrases sonnent parfois un poil complexe. Reste qu'il s'agit d'un élément d'adaptation qui dépend de l'appréciation de chacun, et que ce choix ne nous sort jamais de l’œuvre. Néanmoins, débattre de cette subtilité semble intéressant.


© Asato KONAMI 2017 ©Eziwa SAITA 2017 KADOKAWA CORPORATION

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