Kahori Onozucca - Actualité manga
Dossier manga - Kahori Onozucca
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20/20

Kahori Onozucca en toute simplicité


    Kahori Onozucca ne cherche pas à nous choquer indéfiniment, mais sait aussi nous offrir des moments dans lesquels les échanges sont tout simplement beaux, et où la romance a une place importante.
    Les personnages assez jeunes sont parfois attendrissants à lire. En effet, dans Nous irons à la mer (Amours félines), Rika Harada met en scène un garçon et une fille qui se connaissent peu, mais qui sont déjà attirés l’un envers l’autre. Malgré leurs disputes et leur caractère borné, ils se rapprochent à grand pas. Les sentiments, ici, sont prévisibles. Tout le monde a déjà vu un futur couple se disputer sans cesse pour des broutilles, se taquiner, et finir par s’aimer au grand jour. L’histoire de ces deux personnages est très simple. Mais Kahori Onozucca sait une fois de plus nous captiver. Le baiser, attendu, n’est en rien une surprise. Néanmoins, cette scène, dont les dessins sont bien séquencés, est forte, et ne nous laisse pas indifférent. Nous n’avons pas les pensées du jeune homme, mais il va de soi que cela fait bien longtemps qu’il a envie d’approcher la vive Kozue, et de ne pas laisser ses mains dans ses poches ! Malgré son audace, il n’en reste pas moins attendrissant, et cette précipitation reflète de manière très vraie ce que chacun n’ose dire tout haut.
    
    Dans Amours félines, Rika Harada met en scène le personnage de Takara, une jeune modèle qui se pose une multitude de questions sur la vie. Les « pourquoi » s’enchaînent, sans pour autant trouver de réponse satisfaisante. La jeune fille donne l’air de toujours être dans la lune, dans ses pensées. C’est un genre de personnage qui va très bien au trait de Kahori Onozucca. La dessinatrice fait d’elle une jeune fille plate, qui ne dégage rien au premier abord, et justement, c’est ça qui est captivant. Elle n’a aucune envie particulière, aucune ambition qui lui est propre, et a l’impression que le monde qui l’entoure est curieux. Takara ne comprend pas le sens de la vie, et ne montre aucun attachement quelconque. Son regard est sans cesse perdu. La jeune fille ne regarde pas, ni n’observe. Elle voit juste, tel un objectif d’appareil photo acheté à moindre coup : le genre d’œil qui ne fait qu’effleurer les choses, et ne parvient pas, ou ne cherche pas, à aller plus loin, davantage en profondeur, pour alors pénétrer l’univers tout entier. Ce comportement, cette attitude qu’a Takara semble ici s’expliquer par le fait qu’elle n’ait jamais connu l’amour. Mais cette jeune fille, si particulière, ne peut être touchée que par quelqu’un de particulier lui aussi, voire étrange. Je pense que la personne qui respecte le plus Takara est son maquilleur. Son regard posé, et la façon qu’il a de la défendre nous dévoilent qu’il comprend la jeune fille, et qu’il soit peut-être parvenu à la mettre à nu. Justement, le mannequina… Le fait que Takara soit mannequin nous paraît tout d’abord bien étrange. Mais en y réfléchissant un peu plus : c’est peut-être le travail idéal pour notre chère héroïne. Car quelque soit la journée, la jeune fille ne montrera pas d’expression particulière, ou différente. Mais peut-être parvient-elle à en mimer pendant ses heures de travail. Ainsi, ces apparences ne sont en aucun faussées par la vraie Takara. Il est assez frustrant de ne pas voir la jeune fille en pleine action ! La scénariste a choisi de ne pas nous la montrer en train de poser, ni de nous dévoiler les clichés d’elle. Dans un sens, c’est dommage, car on ne doute pas du fait que Kahori Onozucca aurait fait du très bon travail. Cela nous aurait permis de voir Takara dans une tout autre situation, et peut-être, totalement différente qu’à son habitude. Mais en même temps, nous cacher cela permet de conserver le mystère sur le personnage, ce qui n’est pas une mauvaise chose.
La rencontre entre Takara et Arata Tone est brutale, rapide, et furtive. Alors que lui parle, elle, captivée comme jamais, profite de ce moment, de ce sentiment qui la prend jusqu’aux entrailles. Takara tombe éperdument amoureuse d’un garçon qu’elle ne connaît pas, duquel elle n’arrive pas à détacher son regard, même si, selon elle, il est transparent. Arata n’est peut-être pas le garçon parfait, il ne représente sans doute pas un idéal de bonté ou de vertu pour les jeunes adolescentes, mais Takara ferme les yeux devant tout cela. « Un nom est juste un signe distinctif », et Takara va alors au-delà des apparences, du visible. Elle sait sans doute sonder le cœur des gens qui l’entourent, et malgré  son air rêveur, elle serait sans doute capable de comprendre son prochain mieux que n’importe qui d’autre. Le court instant pendant lequel les yeux de Takara croisent ceux d’Arata semble plus long que la discussion entre la mère et le jeune homme. Kahori Onozucca réussit, au travers de deux dessins placés côte à côte, à donner une consistance et surtout, de la vie à cet échange de regards. 
Le sourire d’Arata, qui suit immédiatement ce moment, semble empli d’une fierté innocente et d’une grande gentillesse. Les échanges charnels qu’ils ont par la suite sont doux, et totalement démunis de toute envie mal placée. Ce qui transparaît est plutôt l’ivresse d’avoir l’autre auprès de soi, de le sentir nous effleurer ; Kahori Onozucca parvient parfaitement à nous transmettre toute cette ambiance douce et sensuelle.
   
    Les relations entre les filles sont compliquées, mais qu’en est-il de celle entre une mère et sa fille… Il nous est tous déjà arrivé de se disputer avec nos parents, et de le regretter quelques instants après. Natsumi est une adolescente dans la fleur de l’âge. Mais comme beaucoup de jeunes filles, elle est à fleur de peau, et est assez vite agacée. Ce qui nous frappe le plus dans Ella (Amours félines), ça n’est pas forcément la rencontre entre l’héroïne et celui pour lequel elle a un coup de cœur, mais davantage la dispute, ou plutôt, le monologue blessant et plein de rage qu’elle adresse à sa mère. Kahori Onozucca nous montre une chose qu’on aimerait parfois effacer, car elle enlaidit beaucoup les jeunes filles : la colère. Le regard de Natsumi est ici intense, les paroles s’enchaînent à une allure phénoménale, on aurait presque l’impression de l’entendre crier. Dans tous les cas, on l’imagine très bien ! Bien heureusement, à côté de ce moment électrique, l’auteur adoucit  le récit grâce à Shî, un mystérieux garçon, qu’on aimerait connaître. Lui qui agace tout d’abord Natsumi, l’attire finalement. La colère fait bien souvent place à son contraire, bien heureusement !
     
    Nico Says n’est pas fait que d’histoires dans lesquelles le sexe a une part primordiale. Kahori Onozucca met aussi dans ce recueil des aventures romantiques, dans lesquelles des êtres se retrouvent et se regardent désormais différemment. Graine d’Amour est ce genre d’histoire, où les personnages principaux se redécouvrent après une longue séparation. Les regards insistants, les questions qui s’enchaînent, la peur de découvrir que l’autre ait changé, sont autant de sujets abordés par la mangaka. Le rapport à la sexualité est distant, mais tout de même présent. Les blessures de chacun font que le plaisir de la chair n’est pas considéré de la même façon par tous. Ainsi, il faut parfois savoir prendre son temps, et avancer pas à pas, en évitant de brûler les étapes.



 

    Les amours d’enfance est un thème cher à toutes les créations destinées au public féminin. Cela nous fait repenser à nos années passées ou à notre jeune adolescence, des périodes qu’on envie, tout en étant tout de même heureux d’en être sorti. Mais un constat s’applique à beaucoup de monde : quelques soient les difficultés que l’on a du affronter pendant toute cette période de notre vie, elle n’en reste pas moins une des meilleures. C’est à cette époque que l’on vit intensément, car nous manquons cruellement d’expérience. L’on rit, mais aussi, pleure plus facilement qu’un adulte. Mais plusieurs années après, l’on finit parfois par regretter ce moment ; car qui profite de son quotidien comme un enfant ? Lui qui a l’impression que le temps est figé, qu’il ne changera pas, ni lui, ni son entourage. Mais le temps passe, et c’est très vite que l’on grandit, avec des interrogations et des doutes de plus en plus grands, mais aussi, la peur du regard, du jugement des autres, à cause des conventions sociales. Etre amoureuse d’un ami d’enfance n’est pas un crime. Mais lorsque c’est son cousin, avec qui l’on passait le plus clair de notre temps, cela change tout. Car mis à part ce qu’autrui pourrait en penser, quelle serait la réaction du principal concerné ? Kahori Onozucca réussit à mener le suspens jusqu’au bout. Elle aborde, pendant cette courte histoire, la découverte de la sexualité, au travers des expériences, mais aussi du voyeurisme. Cette histoire peut en laisser certains de marbre, car elle est loin d’être la plus palpitante. Mais l’érotisme est brodé au travers de ces petits signes que l’on connaît tous : surprendre, ou tout au moins, avoir peur de surprendre deux personnes dans une situation délicate, penser avec nostalgie aux choses simples vécues ensemble, sentir le souffle de l’autre, la chaleur de son corps, nous effleurer le coup… Personne ne peut nier que ce genre de chose ne laisse pas indifférent. Lorsque l’on désire quelqu’un, il va de soi que nous chérissons les plus petits aspects de sa personne, désirant plus que tout les conquérir un par un. Ces petits instants, qui, lorsqu’ils nous arrivent, nous paraissent durer des heures, et sont éternels dans nos esprits, Kahori Onozucca les retranscrit avec grâce et délicatesse, grâce à son trait épuré, à ces regards qu’elle sait croiser, baisser, ou encore, faire reculer devant la gêne. Ces moindres détails font de Adieu et adieu un chapitre captivant, nous tenant en haleine, mélangeant amour et érotisme subtil.
   
    Le recueil le plus doux et sensible de Kahori Onozucca est sans nul doute Anneaux d’Alliance. Chaque chapitre est consacré à un couple, dans lequel un anneau occupe une place toute particulière. La mangaka qui choque à cause de ses dessins crus, sans retenue, nous attendrit ici. La sexualité n’est abordée que bien timidement, mais ce sont plutôt les sentiments, et l’attachement d’un être à un autre qui prédominent ici. De ce fait, le volume nous semble parfois fade comparé aux autres, mais chacun aura son propre avis dessus. Toutefois, les dessins de la mangaka sont sublimes, et collent parfaitement à chacune des histoires. La mise en scène, les gros plans, la rapidité à laquelle certains personnages crient, se calment, se jettent dans les bras l’un de l’autre, nous surprend toujours. Kahori Onozucca n’hésite pas à utiliser le mystère, celui des sentiments, de l’amour, mais aussi, le fantastique de certaines choses qui pourraient se produire, dépassant l’entendement. L’on se lie, l’on se délie, les sentiments changent, disparaissent, d’intensifient, mais touchent le lecteur d’une façon ou d’une autre.
 
   
    Kahori Onozucca, elle qui sait aborder la sexualité, les rapports charnels entre deux êtres, sait aussi faire de ces relations des moments simples et émouvants, des chapitres pendant lesquels le lecteur se trouve transporter dans des histoires peu banales. Des interrogations que l’on se pose, ou parfois, des questions auxquelles nous n’avions jamais pensées, surgissent des pensées ou de la bouche des personnages. Kahori Onozucca sait montrer la douceur des sentiments, l’attachement fort entre deux êtres, sans pour autant dévoiler ces derniers dans leur intimité la plus profonde.


© Kahori ONOZUCCA - SHODENSHA Publishing CO., Ltd.

Commentaires

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LoveHina

De LoveHina [515 Pts], le 17 Mai 2012 à 22h26

Oh ça me fait plaisir :)
Il n'y a pas grand monde qui s'intéresse à ce genre de lecture. Et très peu de publications ont la chance de paraître en France :/

geoff

De geoff [1327 Pts], le 17 Avril 2012 à 23h26

20/20

Super dossier, merci pour la lecture ! Je voulais en apprendre un peu plus sur cette mangaka qui m'intrigué, et j'ai apprécié tomber sur ce dossier bien remplis.

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