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Les visages de Syracuse

    
   

Un petit coin de paradis

  
Comptant aujourd'hui plus de 120 000 habitants, Syracuse reste une ville très prisée pour son tourisme, une destination de rêve immortalisée par une chanson d'Henri Salvador. De nombreux bâtiments des époques grecques et romaines ont été conservés, et son centre historique a été classé au patrimoine mondial de l'Unesco en 2005. Mais depuis l'Antiquité, Syracuse reste un lieu très convoité. Fondée en -734 sur la petite île d'Ortygie (reliée par un canal au reste de la Sicile) par des colons grecs, la cité trouve son apogée au Vème siècle avant J.C..
   
Dans Eureka !, la beauté de Syracuse nous est d'abord présentée par Claudia, emmenant Damippos en haut d'une tour pour lui présenter l'incroyable panorama de la ville, faisant face à l'Etna et à la Méditerranée. Hitoshi Iwaaki nous dresse le portrait d'une cité prospère, qui a étendu son influence sur une bonne moitié de la Sicile. Son indépendance donne l'impression d'un monde à part, et sa paix lui permet de progresser, notamment au niveau technologique. Aussi la cité accueillit dans ses murs un certain Platon, tandis qu'Archimède y aura vécu toute son existence. Si elle porte au début du récit les stigmates de batailles passées, du temps où elle cherchait à étendre sa domination, Syracuse est devenu un vrai havre de paix, prisé par ceux qui sont las de tous les conflits secouant le monde en ces temps-là. 
   
    
   
L'île d'Ortygie, berceau de la ville de Syracuse (crédit photo : Wikipedia)    
   

Une cité cosmopolite

    
Située à mi-chemin entre Rome et Carthage, Syracuse a su au fil des siècles puiser dans les nombreuses influences des peuples de Méditerranée. Cette diversité, l'auteur la retranscrit par le biais des personnages, qui ont toutes des origines différentes, et qui représentent autant de traits de caractères de la cité. 
  
Damippos partage ses origines grecques avec les anciens fondateurs de la cité. Il incarne le nouveau venu, le découvreur, venu chercher la paix qu'il n'a pu trouver dans son pays. C'est également un jeune homme très séduisant et avisé, deux qualités qu'il partage aussi avec Syracuse.
  
La beauté, on la retrouve également chez Claudia, représentante du peuple romain. Sa richesse s'inscrit dans la prospérité ambiante, mais elle incarne aussi la fragilité de la situation ambiante : Syracuse est à la fois un lieu idéal et un profond objet de convoitise. Cependant, prise dans le dilemme entre l'envie de retrouver les siens et son amour pour Syracuse, Claudia restera profondément attachée à sa ville d'adoption.
   
Epycidès représente quant à lui Carthage, ou plutôt, est le représentant des nombreux peuples séduits par le charisme d'Hannibal et qui l'ont rejoint dans sa campagne contre Rome. Il évoque ainsi la part d'ombre de la cité, celle de ses tyrans successifs qui ont prêché par ambition, ou qui se sont laissés aller au jeu des influences pour favoriser leurs intérêts. Il sait d'ailleurs manier le verbe pour faire vibrer les sentiments d'insoumission et de révolte dans le cœur de ses compatriotes. La joute verbale entre Epycidès et Damippos (chapitre 4) oppose ainsi les deux visages de Syracuse : une cité qui a le potentiel de frapper fort, mais au risque de perdre son équilibre et son identité.
   
Enfin, Archimède est un Syracusain pur souche, qui aura passé toute sa vie dans la cité. Ses nombreuses inventions et avancées scientifiques sont autant de preuves de l'essor technologique de la ville. Mais alors qu'on le découvre comme un vieillard un peu sénile, il est le représentant complet de la cité, semblant reprendre une pincée de tous les éléments évoqués plus tôt : le génie de la ville, sa fragilité (imagée par son état physique), mais aussi son insoumission. Pacifique dans l'âme, il est pourtant à l'origine de la puissance militaire de la cité, et a indirectement du sang sur les mains. Proche de l'ancien roi de la ville pour qui il a conçu toutes ses machines, Archimède fait aujourd'hui peu de cas de qui sont les alliés et qui sont les ennemis. Dans un dialogue qui prête à sourire, il pense que l'assaut vient de Carthage et non de Rome, qu'il croit encore alliée à l'île. Mais une grande sagesse se cache derrière ses traits marqués par le temps : au final, l'identité du vainqueur et du vécu est-elle si importante que cela ? Tout ce qui compte, à terme, est que Syracuse n'en ressorte pas trop meurtrie, mais la guerre peut se montrer injuste et stupide...
   
   

© 2002 Hitoshi Iwaaki / HAKUSENSHA, Inc., Tokyo

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