Don't worry, Be happy ! - Actualité manga
Dossier manga - Don't worry, Be happy !

L'art de jouer avec les codes


C'est un aspect de Don't worry, be happy que nous avons évoqué dans la partie précédente : Avec son ambiance, la série de Kaori Hoshiya traite de manière juste des codes récurrents de la comédie sentimentale, et pas uniquement celles typées shôjo. Bien des aspects semblent vus et revus, ce qui permet parfois à l'autrice de jouer avec, pas systématiquement pour les déconstruire mais régulièrement pour étonner et apporter une authenticité à son histoire.

Le premier archétype qui nous marque, c'est évidemment la relation centrale entre Anzu et Seiji. Deux protagonistes opposés aussi bien dans leurs caractères que par leurs classes sociales, mais qui vont se côtoyer, s'apprécier, et plus si affinité. Si elle n'est pas évidente sur le premier chapitre, l'orientation vers la relation amoureuse ne fait plus de toute lorsqu'on arrive vers la fin du tome de départ. C'est assez rapidement qu'Anzu va se questionner sur ses sentiments envers Seiji, un point de départ vers une relation qui prendra plus d'importance et d'épaisseur au fil du titre. Un autre code qui s'y greffera est celui du triangle amoureux, dû à l'entrée en scène d'Umezawa qui ne cachera jamais vraiment son affection envers l'héroïne. Rien de nouveau sous le soleil, c'est un fait, aussi Kaori Hoshiya entretiendra cette alchimie jusqu'au dernier volume, traitant ainsi ce triangle comme un point de scénario légitime et ne le considérant pas comme une case à cocher dans un cahier des charges visant à créer une comédie romantique classique.

L'autre ficelle qui saute aux yeux et qui s'avère toute volontaire, c'est la nature des personnages masculins principaux en tant que très beaux garçons, là où Anzu est présentée comme une demoiselle mignonne sans pour autant attirer une armée de prétendants. Seiji a donc ses admiratrices en grand nombre, ce qui fait de lui la star de son lycée. Umezawa n'est pas en reste, notamment par sa coiffure atypique qui deviendra un véritable trait d'humour dans la série. Pourtant, si on comprend bien une chose, c'est que la combo beaux éphèbes + triangle amoureux ne vise pas à créer une comédie harem ordinaire, Kaori Hoshiya préférant une écriture plus fine et surprenante.


HOSHI TO KUZU © 2015 by Kaori Hoshiya / SHUEISHA Inc.

Aussi, on apprécie de plus en plus, au fil du récit, la capacité qu'a la mangaka à jouer avec tous ces codes. En premier plan, le triangle amoureux dont nous avons déjà parlé dans la partie précédente. La sincérité qui se noue dans celui-ci peut être considéré à contre-courant par rapport à des titres jouant sur ce schéma narratif de manière plus standard et propice aux amourettes bien piquées. Rien de si merveilleux ou dramatique dans la présente série : Chacun a conscience des sentiments qui existent dans toute cette situation, et en tiendra compte dans le moindre de ses choix. Cela concerne évidemment un Umezawa amoureux d'Anzu, mais qui a en tête que celle-ci est éprise de Seiji dès le départ, réduisant totalement ses chances, voire les annihile complètement.

Toujours dans cette manière de traiter différemment des idées qu'on peut juger classique, le développement de la relation entre Anzu et Seiji ainsi que leurs interactions apportent une fraicheur bienvenue tout le long du récit. Derrière la très ordinaire romance entre deux caractères opposés, Kaori Hoshiya parvient à créer une dynamique humaine fraîche et drôle. Les premiers gestes décisifs entre les deux individus ne se font pas tant attendre que ça (ce qui est sans doute dû à la courte durée de la série et la potentielle volonté de l'autrice de ne pas trop étendre son œuvre sur la longueur), et les moments finaux se dérouleront par le biais de l'écriture propre à l'artiste : De manière naturelle, et même originale. Aussi, le moment de la déclaration entre les deux personnages est une preuve, tant rien n'est fait dans la plus pure tradition, bien au contraire. "L'après" correspond à toute cette optique, puisque la mangaka ne fera jamais de la romance centrale une histoire trop fleur bleue. Chacun des deux concernés conserve son caractère et ne tombe jamais dans la niaiserie. Pourtant, leurs sentiments ne feront aucun doute, ce par des intentions tout à fait naturelles et des petites réflexions sur ce qu'est tomber amoureux la première fois.

Un autre moyen pour Kaori Hoshiya de jouer avec les codes vient possiblement, en partie, de son parti-pris concernant les lieux explorés dans l’œuvre. Le lycée de nos têtes d'affiche et leur BDE ne constitue pas le point d'action central. Il l'est sur le premier tome, mais la série vient rapidement à voyager vers différents environnements, dont le lycée Suisei Gakui auquel appartient Umezawa. A ne jamais s'ancrer au même endroit, le titre propose une vraie dynamique. Cela ne l'empêche pas d'aborder des schémas d'histoire classiques comme le rendez-vous en ville ou la nuit chez l'héroïne, tout en proposant aussi des cadres plus novateurs tels que la demeure de Randô où se tiendra un bal de Noël crucial pour l'histoire, et réussi en terme d'ambiance. Jouant avec le compte de Cendrillon en faisant intégrer une héroïne de classe modeste un lieu chic dans une vraie tenue de princesse, Kaori Hoshiya va littéralement s'amuser de cet ensemble par différents gags et dilemmes, tout en faisant progresser son histoire principale. Il y a donc une vraie aisance chez l'autrice dans sa manière de conter une histoire, tout en puisant dans différents archétypes qui forgent la culture au sens large.



HOSHI TO KUZU © 2015 by Kaori Hoshiya / SHUEISHA Inc.

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