Blood Alone - Actualité manga
Dossier manga - Blood Alone
Lecteurs
17.50/20

Amours platoniques


Si Blood Alone se dirige vers la coexistence entre humains et vampires, c'est avant tout car le récit est porté par un seul sentiment omniprésent : l'Amour, avec un grand A. Ou plutôt, les amours, tant le manga offre des variations autour du thème. Les deux héros sont en eux-mêmes de représentations très distinctes de ce même sentiment. D'un côté, nous avons Kuroe, un héros charmant, attentionné, avec un côté gaffeur qui le rend aussi très humain. Ce beaux ténébreux devient rapidement la cible des faveurs de la plupart des demoiselles du récit, et offre de son côté de l'affection de manière universelle, en aidant les autres et en leur apportant tout son soutien, tel une sorte de "donneur universel". Misaki est quant à elle dans la position de l'amoureuse transie, figée dans un âge où les sentiments s'exacerbent et où la rationalité adulte n'a pas encore lieu d'être. C'est ainsi qu'elle aime Kuroe d'un amour absolu, sans se poser la moindre question, le moindre doute, en savourant la moindre de ses faveurs et toujours désireuse de plus de moments chers à son cœur. L'ambiguïté de leur relation, née des tragiques évènements qui relient leurs passés respectifs, est l'un des moteurs de la série. Plus que des amis, moins que des amants, autre que des frères et sœurs,... il est bien difficile de définir leur affection par de simples mots. Ce sont les nombreux gestes de tous les jours qui viendront apporter une réponse, bien différente pour chaque lecteur. Si l'amour de Misaki pour son prince ne fait aucun doute, il est en revanche bien plus difficile de sonder le cœur de ce dernier. Derrière ses sourires tristes, Kuroe semble avoir fermé son cœur à tout sentiment amoureux depuis la disparition de sa sœur, mais peut-être voit-il en Misaki une nouvelle personne à protéger, pour se pardonner de ses erreurs passées. Quoiqu'il en soit, il ressort de leur relation une affection pure, palpable, et touchante malgré tous les regards que l'on peut apporter à leur situation.



En effet, de part cette relation aux contours flous entre un humain et une vampire, Masayuki Takano explore également les amours interdits, impossibles. Car, au-delà de leur différence de sang, c'est avant tout la large différence d'âge entre les deux protagonistes qui pourrait faire grincer des dents au premier abord. Fort heureusement, l'auteur a l'intelligence de ne jamais céder aux voix du fan-service et ne montrera jamais Misaki en petite tenue ou dans des positions compromettantes, ce qui orienterait la série vers une vision autrement plus malsaine et scabreuse. De par cette absence très judicieuse de concrétisation physique, le récit peut à loisir développer les sentiments les plus extrêmes et aborder des thématiques graves sans jamais provoquer un quelconque malaise. C'est ainsi que graviteront toutes les formes de désir, orientées essentiellement vers Kuroe. Misaki est le vecteur de l'attirance vers une figure mature, quémandant la protection de bras solides. Sainome représente l'amour privé de ses illusions et ramené à la réalité de la société, même si ses regrets demeurent dans son cœur. Personnage homosexuel, Higure est l'image de la frivolité qui s'est émoussée au fil du temps et qui regrette de ne s'être jamais stabilisé. Sly incarne la séduction, tandis que l'on peut voir chez Lady Chloé une certaine forme de domination. Sans oublier, bien sur, les sentiments incestueux qui unissaient Kuroe à sa sœur Motoe. Ainsi, cet ensemble de personnages, mus par des ambitions affectueuses si différentes, rendent un éventail très complet de la complexité des sentiments affectifs. D'une manière ou d'une autre, chacun avance seul mais a besoin d'un autre pour pouvoir supporter la douleur de son existence. Dans cet océan de tourments emportés par la nuit, le lien entre Kuroe et Misaki apparait comme une réponse intéressante. Ce bonheur est par définition incomplet, fragile et même factice, pourtant nos deux protagonistes s'en contentent pleinement, sans se poser de questions, plutôt que de se tourmenter sur leur nature. Chacun trouve en l'autre un réconfort lui permettant d'aller de l'avant et de continuer à vivre.

Si cette relation subsiste, c'est également grâce à sa forme platonique qui met en avant uniquement la pureté des sentiments. Les attentions ne vont jamais plus loin qu'un cadeau, un câlin ou à l'extrême, un petit bisou. A l'opposé, la passion semble d'avantage de mise du côté des vampires. Leurs pouvoirs de domination par hypnose ou par le sang sont en effet d'excellents moyens pour assouvir de basses pulsions, à l'instar par exemple de Karedowulf. Le vampire jouit de ses privilèges et de son insouciance par rapport à la société établie pour ne pas se fixer de limites. Pourtant, le personnage d'Higure tend à montrer que le bonheur véritable n'est pas à rechercher dans cette voie-là. L'absence d'amour chez les vampires est peut-être ce qui les rend le plus pitoyable, et c'est sans doute ce même sentiment qui fait que Misaki se définit encore en tant qu'humaine. C'est aussi l'amour qui pousse Kuroe à se rétracter de sa traque éternelle pour mieux se concentrer sur les choses qu'il a à protéger. Dans ce monde où les menaces grondent et les affaires sordides se multiplient, ce sont les doses d'Amour les plus infimes qui sont encore les plus importantes, pour que l'on puisse se rattacher à quelqu'un, donner un but à sa vie et se prouver que tout cela a encore un sens...



© Masayuki Takano / ASCII MEDIA WORKS

Commentaires

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Arch

De Arch, le 05 Août 2011 à 10h05

18/20

Article complet qui aborde avec précision divers aspects de Blood Alone.

J'ai succombé à cette série plus pour le pitch que pour les couvertures (qui, je le conçois, sont attirantes). Le manga s'axe clairement sur la psychologie des personnages ce que j'apprécie particulièrement. La sensibilité japonaise, si on peut appeler ça comme ça, dépeint admirablement par l'emploi de gestes simples toute la force des sentiments des personnages. Blood Alone est un exemple parfait et ceci est loin de l'étiquette "extravagante" que l'on colle volontier à la BD japonaise...

Pour faire bref, il ne plaira pas à tout le monde, mais personnellement, je le garde très précieusement dans ma biblothèque en tant que membre du cercle très privé des mes œuvres favorites.

jojo81

De jojo81 [7203 Pts], le 13 Juin 2011 à 07h49

18/20

Excellent dossier Wang.

Lisez Blood Alone, c'est excellent ! En plus Misaki est toute craquante ^_^

liliana60

De liliana60, le 11 Juin 2011 à 13h50

17/20

Superbe dossier sur une série que j'aime beaucoup et dont j'espère revoir la suite malgré le changement de magazine qu'il y a eu au japon.

J'ai vraiment pris plaisir à lire ce dossier.

BenDragon

De BenDragon [121 Pts], le 11 Juin 2011 à 13h34

Très bon dossier, comme tous ceux que j'ai lu sur ce site, bien écrit, et où l'on perçoit la passion de l'auteur pour la série.

Mais, personnellement, je n'accroche pas à "Blood alone" à cause du graphisme. Les couvertures et les illustrations qui illustrent le dossier sont effectivement assez réussies, et il en émane un charme certain, qui est très bien cerné dans l'analyse. Mais cela ne rend pas compte des planches en noir et blanc, que je trouve assez plonplon : sans grande originalité et pas suffisamment expressives. J'ai bien compris qu'on pouvait percevoir cela comme un trait de style, qui contribue à l'atmosphère de la série, tout en retenu, et je respecte ce point de vue, mais je ne parviens pas à percevoir les choses comme cela. Question de goût...

kadam29

De kadam29 [396 Pts], le 10 Juin 2011 à 22h20

17/20

J'ai passé un agréable moment sur votre petit dossier :)

Je fais parti des curieux qui se sont laissés happer dans l'univers de Blood alone il y a qqs années et je ne le regrette pas !

 

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