Quand la photo perce à jour les coeurs
Tout en découvrant ces quelques jeunes filles et leurs petits tourments relationnels, ce que l'on appréciera plus que tout est peut-être la place qu'accorde alors la mangaka à la photographie et à son rôle.
Car si prendre des photos revient à immortaliser de beaux moments captés sur l'instant avec fascination, cela peut également permettre de capter l'essence réelle des gens, en dehors des faux semblants.
De ce point de vue, deux exemples sont marquants dès le premier volume de la série, à savoir les photos que Kô prend d'une Nene souriante et magnifique alors qu'on lui dit souvent qu'elle est plus belle quand elle ne sourit pas, puis la photo prise par Uchiho d'une Amane bien éloignée de son habituel entrain...
Mais c'est surtout au fil du deuxième volume que cette idée prend toute sa saveur, toute son importance. S'il y a une idée qui ressort de la lecture de ce tome 2, c'est bel et bien que les photographies ne mentent pas. Avec sa passion et son talent pour saisir l'instant, Kô a immortalisé en photo une Nene réellement magnifique alors qu'elle est tout sourire, elle à qui on a toujours répété qu'elle est bien plus jolie quand elle ne sourit pas. Mais ce qui marque encore plus notre héroïne, c'est que Nene ne lui a semblé jamais aussi vraie et rayonnante que quand elle la photographie en compagnie d'Amane.
Kô le sent à travers ses photos, il y a toujours quelque chose de très puissant qui unit Nene et Amane... Alors, pourquoi donc Nene a-t-elle autrefois plaqué son amie sans explication ? Pourquoi continue-t-elle de rejeter ses avances au point de la faire pleurer ? Pourquoi choisit-elle désormais de se rapprocher de notre héroïne, jusqu'à même lui demander de sortir avec elle ?
Dans le fond, l'intrigue de Luminous Blue reste assez classique, mais la mangaka répondra à tout, et, surtout, tirera vraiment bien parti jusqu'au bout de son idée de présenter la relation de deux filles (Nene et Amane) à travers l'objectif de l'appareil-photo d'une troisième fille, Kô. Et c'est quelque chose que l'on ressent aussi dans le cas d'Uchiho, qui se dévoile elle aussi pleinement. De part sa manière d'avoir toujours préféré Amane comme modèle, ses sentiments ne faisaient aucun doute, mais sa façon de la photographier (parfois si triste) cristallise son douloureux échec amoureux.
Un petit mot sur le dessin...
Kiyoko Iwami emballe le tout dans un style visuel ravissant.
Si ses décors sont d'assez efficaces photos retravaillées, la mangaka brille surtout par ses designs à croquer d'héroïnes tantôt pétillantes tantôt plus douces, qui n'ont aucun mal à dégager la fraîcheur adéquate malgré leurs petits tourments. Ses adolescentes dégagent un charme très rafraîchissant avec leurs silhouettes jeunes, gracieuses ou énergiques, leurs regards riches et nuancés et leurs contours doux.
Bien sûr, la mise en scène n'est aucunement négligée avec des angles travaillés, des découpages parfois assez évocateurs et une belle place accordée au rendu des photographies. La mangaka livre plus d'une merveille de ce côté-là, notamment pour figer certains moments ou pour faire ressortir l'ambiance d'un instant.
Enfin, la dessinatrice se plaît également à offrir quelques idées assez réfléchies, l'une des plus évidentes étant à chercher dans les illustrations des jaquettes des deux tomes, où les héroïnes se reflètent dans l'objectif de l'appareil-photo en se faisant écho.
... et un autre sur l'édition française
L'édition française, elle, est tout à fait satisfaisante.
On a droit, tout d'abord, à trois très belles premières pages en couleurs dans chacun des deux volumes, celles-ci nous gratifiant d'illustrations mettant en avant les héroïnes.
Ensuite, on trouve une bonne qualité de papier (suffisamment épais tout en restant souple, et dépourvu de transparence) et d'impression (nette, sans moirages, et où l'encre ne bave pas).
Puis, on profite d'une traduction soignée de Karen Guirado, qui offre un travail clair, sans coquilles, restant assez naturel, et collant plutôt bien au caractère de chaque héroïne.
Enfin, n'oubliez pas non plus de soulever les jaquette, afin découvrir sur les couvertures quelques "clichés" bonus !
© Kiyoko Iwami / Ichijinsha
