Les Lamentations de l'agneau - Actualité manga
Dossier manga - Les Lamentations de l'agneau
Lecteurs
19/20

Les liens du cœur


Outre la composante familiale particulièrement mise en avant, on va rapidement se rendre compte que Les lamentations de l’agneau jouent également énormément avec les liens que Kazuna entretient avec ses amis et, dans le cas de Yo, celle pour qui il éprouve des sentiments. Au départ, en découvrant les quelques amis proches du héros, on se dit assez logiquement qu’ils risquent de disparaître petit à petit au profit d’un huis clos entre Chizuna et Kazuna. Mais qu’il s’agisse de Yaegashi ou de Kinoshita, tous deux conserveront leur importance tout au long de la série. Mais en tout cas, la force de Kei Toume, à ce niveau-là, est de ne jamais négliger l’un ou l’autre aspect des relations de Kazuna. Bien entendu, sa sœur va occuper une place prépondérante et s’avérera être un personnage hautement intéressant, mais là où la mangaka réussit brillamment son pari c’est lorsqu’il s’agit de la rendre terriblement importante sans pour autant qu’elle vienne occulter tout le reste.
  
  
  
  
  
Les relations qu’entretient Kazuna avec ses ami(e)s seront donc prépondérantes et cela va permettre à Kei Toume de développer très largement et avec beaucoup de savoir-faire l’autre pan primordial de la série, à savoir le dilemme permanent qui assaille le cœur de notre héros. Doit-il laisser tomber tout ce qu’il a construit durant ces nombreuses années, doit-il abandonner tous ses proches, ceux qui l’aiment et ceux qui comptent pour lui, tout cela pour les protéger. Est-ce vraiment ce qu’ils désirent ? Est-ce vraiment ce que Kazuna désire ? Son conflit intérieur est permanent, mais ça nous y reviendrons plus en détail dans la prochaine partie de ce dossier. Pour l’heure, il faut avant tout se recentrer sur les liens affectifs de notre héros. On en retiendra principalement quatre. Yaegashi sera importante, puisqu’elle occupera un statut spécial, mais limité du fait du rejet constant du héros. Rivale de Chizuna sans l’être vraiment, prête à tout pour rester auprès de Kazuna. Finalement, elle s’avère tellement décidée à rester proche de celui qu’elle aime qu’elle est même décidée à partager sa malédiction, si cela peut leur permettre de rester ensemble. Voilà une caractéristique que l’on pourra également retrouver chez le docteur Minase, mais vis-à-vis de Chizuna, cette fois-ci. Il y a ensuite Kinoshita, le prototype du meilleur ami. Un meilleur ami qui sera relativement discret, certes, mais qui, lui aussi, servira un rôle important. Il permettra en effet de mettre en avant que Kazuna n’est pas seulement rattaché au monde extérieur par l’intermédiaire de ses parents d’adoption ou de Yo, follement éprise de lui, mais également par d’autres liens, d’autres relations. Plus banales, peut-être, mais, en définitive, terriblement importantes, elles aussi. Viennent ensuite les parents adoptifs de Kazuna. Et, eux aussi, l’air de rien, apporteront une richesse supplémentaire au récit.

Mr et Mme Eda sont donc l’oncle et la tante de Kazuna. En réalité, ils n’y aucun lien de sang entre eux. Son oncle était un excellent ami du père de notre héros et, étant donné que sa femme travaillait, ils n’ont pas eu la chance d’avoir un enfant. C’est dès lors avec plaisir qu’ils ont pris Kazuna sous leur aile et qu’ils l’ont élevé comme leur propre fils, à tel point qu’ils pensent à présent à l’adopter de manière officielle. Vis-à-vis d’eux, l’adolescent s’est toujours comporté de manière irréprochable. En somme, on se croirait face à une famille au passé un peu compliqué, certes, mais à une famille heureuse. En façade, peut-être. En réalité, loin de là. Et cela, c’est justement l’arrivée de Chizuna qui va permettre de le mettre en avant. Qui va permettre de mettre en avant que si Kazuna, son oncle et sa tante ont toujours paru comme étant unis, ils ne l’ont jamais vraiment été. Le jeune homme a toujours fait comme s’il était heureux, il s’est perpétuellement senti obligé d’être aussi parfait qu’il le pouvait. C’était en quelque sorte sa façon à lui de remercier ses parents adoptifs de l’avoir pris avec eux, c’était, selon lui, une obligation qu’il avait vis-à-vis d’eux. Surtout, il ne fallait pas faire d’histoire. Une relation bâtie sur le mensonge, mais pas dénuée de sentiments quant à eux bien réels. Car quoi qu’il en dise et quoi qu’il en pense, Kazuna aime sincèrement les Eda. Et s’il cherche à s’éloigner d’eux, c’est aussi et surtout parce qu’il ne veut pas leur créer de problème. Rien n’est donc simple dans les Lamentations de l’agneau. Et c’est justement dans la complexité de ses relations et dans la justesse avec laquelle Kei Toume les met en avant que l’œuvre brille allègrement.
  
  
  
  
  
Au départ, tout semble plutôt bien en place et défini. Kazuna possède ses amis et ses parents adoptifs d’une part, formant avant tous les liens du cœur et, de l’autre, Chizuna, dernier vestige d’une famille qui est sienne et, pourtant, au départ, étrangère. Etrangère peut-être, mais liée par le sang. Cependant, au fil de la série, au fil de l’évolution des relations entre les protagonistes, ce qui était clair va commencer à se brouiller. Les certitudes n’en seront plus et la manière de qualifier le lien qui unit Kazuna à sa sœur sera des plus complexes à définir. Peut-on encore parler de lien fraternel ou devrions-nous plutôt évoquer un amour fraternel ? Ou, peut-être bien, un amour tout court. La mangaka se plaira à laisser planer le doute, en nous donnant, par l’intermédiaire de ses personnages des réponses qui ne seront véritablement concrètes qu’une fois ceux-ci arrivés au bout du chemin. Une chose est néanmoins certaine : progressivement, le rapport qu’entretiennent Kazuna et Chizuna va venir effacer de manière implacable le reste de l’existence de deux jeunes gens, effacer les liens qu’ils avaient autrefois créés, rompre ce qui les rattachait au monde extérieur. Ils se sont choisis, mutuellement, pour autant de raisons qu’il peut y en avoir.  Et, finalement, qu’elles soient la ou les raisons exactes de ce choix, ce sera à chacun d’en faire sa propre interprétation. Mais ce qui est en définitive réellement important, c’est qu’il découle de ce choix un changement immuable chez l’un comme chez l’autre.

Concrètement, la problématique face à laquelle sera confrontée Kazuna sera à la fois double et unique, l’une découlant forcément de l’autre. Mais tout l’intérêt ici est de voir qu’aucun aspect des questions auxquelles devra faire face le héros ne sera négligé, rendant l’œuvre de la mangaka d’autant plus complète et aboutie. Et ce questionnement, cette réflexion sur lui-même que l’adolescent sera amené à effectuer, c’est justement ce dont nous allons parler dans la troisième et dernière partie de ce dossier.
  
  
  

© 2002 by KEI TOUME /GENTOSHA COMICS INC.TOKYO

Commentaires

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JohnDoe

De JohnDoe [598 Pts], le 14 Décembre 2014 à 12h49

19/20

Très bonne analyse pour cette série à l'ambiance prenante.

Daigo

De Daigo [917 Pts], le 13 Décembre 2014 à 09h40

19/20

Excellent dossier, qui m'a rappelé aux bons souvenirs d'une série mature de Kei Toume.

Cette auteur a vraiment le don pour écrire des oeuvres de qualité, souvent ancrée dans la réalité par ailleurs. Je ne dirais pas qu'on sombre dans la dépression en lisant, mais le ton est clairement mélancolique en règle générale! Vivement la fin de son manga Sing Y for me!

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