Girlfriend

Autour de l’histoire

  
Le dernier point à traiter est donc celui du visuel de la série. Là dessus encore, pas grand chose à reprocher. Court Betten fait un excellent travail durant cinq tomes. Ce qui saute aux yeux, c’est le dessin rond et attachant des personnages, qui rend les chapitres trop courts et fait finir la série bien trop tôt. On ne se lasse pas de cette douceur, qui atténue l’image érotique du manga et ouvre ainsi le public de la série, tout en rendant le tout bien plus accessible. Ainsi, le manga peut s’adresser sans problème à un lectorat au diapason de ses personnages : des jeunes gens, moins matures et plus incertains que d’autres à la sexualité, qui chercheront ailleurs ce qui leur correspond. Les graphismes ont une incidence shojo, mais pas forcément celle dont on a l’habitude : tout est plus rond, et pas pointu, l’ensemble étant presque enfantin par la bonhomie et pas par la simplicité. On se rend alors bien compte que l’histoire est celle de jeunes adultes qui n’ont pas encore totalement quittés l’enfance. Une fois cette notion intégrée, on ne peut alors que constater que les scènes d’amour sont très pudiques, en réponse aux acteurs et spectateurs du manga. Malgré ce qu’on pourrait croire au premier abord, Court Betten allie cette douceur à la réalité des corps, comme il mélange le comique avec le sérieux de ses situations : un résultat (d)étonnant.

Le deuxième point le plus remarquable de l’esthétique du titre est le fait indéniable que, malgré le nombre important d’histoires et donc de nouveaux protagonistes, les personnages sont tous identifiables, uniques. Si bien qu’il devient beaucoup moins ardu de se rappeler qui est qui, qui est avec qui et qui fait quoi. Cela est d’autant plus vrai que les filles sont le centre des histoires, et que l’expressivité qui habite leurs visages est telle qu’elle permet une identification immédiate, sans confusion désagréable. On remarquera que les proportions sont bonnes, même une fois les corps dénudés, et qu’elles sont exagérées uniquement au niveau du galbe des lèvres très pulpeuses et de la taille des prunelles des demoiselles de la série. Dans la même veine, les paysages ne sont pas légion, notamment dans les moments privilégiant la relation entre les protagonistes de l’histoire. Toutefois, ceux ci savent se faire voir, ainsi que les détails, lorsque le récit s’y prête. Et à vrai dire, le jeu des nuances et des trames parfois texturées se suffit à lui même, dans les moments d’arrières plans un peu délaissés. Enfin, on peut seulement reprocher les costumes de lycéennes parfois un peu trop présents, bien qu’on le comprenne, pour être vraiment originaux.

Le mot de la fin sera sur l’édition, qui elle aussi est excellente. Delcourt nous offre ici une traduction impeccable même en ce qui concerne les onomatopées, ce qui se fait rare. On apprécie aussi un format large, extrêmement agréable à la préhension et au toucher, ainsi que des couvertures magnifiques. La taille, légèrement plus grande que d’ordinaire, permet un contact facile et naturel, une lecture fluidifiée et tout cela pour un prix tout à fait acceptable. Notons, enfin, que le reste est véritablement réussi. Si l’édition nous propose une page couleur en début de chaque tome sans que cela nous paraisse étrange, on peut également profiter de, en tout, cinq posters dépliables couleur qui reprennent les illustrations en noir et blanc des sous couvertures. Bref, une excellente surprise pour un prix pas vraiment augmenté. Enfin, pour ce qui est du contenu, on trouvera des explications en fin de tomes sur certains mots, des notes de l’auteur et du dessinateur, et enfin des fiches signalétiques sur chaque fille, permettant de mémoriser les noms et les bases des caractères de chacune.
        
      
         
           
               

Conclusion

       
Une fois pas dépassés les stéréotypes, les représentations collectives sur l’adolescence ou sur l’amour, on pourra prendre cette histoire telle qu’elle est. A savoir, une succession d’extraits de vie qui mettent en scène, toujours, une forme différente de l’amour. Autant de relations que de protagonistes, autant de sentiments que de personnages, ou parfois plus. Girlfriend aurait pu être un bon shojo, quoiqu’un peu léger, si la dimension du sexe n’égayait pas les pages, rendant le titre plus réel, plus proche et moins romancé. Néanmoins, il reste ouvert à tous de par sa légèreté, son graphisme élégant et ses idées très fraiches. Un seinen glorifiant la vie et ses travers, montrant sans tabou l’amour, la cruauté des jeunes gens et les désillusions que le mélange des deux peut amener. En somme, une vision assez large sans être exhaustive de la jeunesse, des pulsions et des décisions que peut amener la plongée d’un enfant dans un monde d’adulte.
   
 

Dossier réalisé par NiDNiM