Femme Fatale - Actualité manga
Dossier manga - Femme Fatale

Méli mélo narratif


Nous n'avons abordé qu'en surface les personnages secondaires, aussi un petit complément s'impose. Dans son procédé narratif, Kaya Shigisawa nourrit une relation en trio, formé par Saito, Ebisawa et Ishiwatari, puis y greffe des figures secondaires qui auront deux rôles : Avoir leurs dilemmes respectifs, et jouer un rôle de soutien à certains moments de la série.

Le problème, comme nous l'avons dit, c'est que leurs introductions sont maladroites, et il est difficile de garder ces différents personnages en tête au fil de la lecture. De même pour leurs relations, les méli-mélo sentimentaux nous sont parfois un peu jetés à la figure sans qu'on s'y intéresse vraiment, si bien qu'on finit par oublier qui est avec qui, à quelques très légères exceptions prêt. Alors, on retient un rôle essentiel pour ces personnages secondaires : Leur apport moral auprès de Saito. Ces derniers sont souvent des appuis, confirment les sentiments du protagoniste et l'épaulent sur ce qu'il doit faire vis à vis d'Ebisawa. En somme, ce sont des faire-valoir uniquement, et ils nous intéressent seulement par ce qu'ils apportes au personnage central plus que par ce qu'ils vivent eux-même. Là aussi, cela nous permet de nous questionner sur l'écriture de l’œuvre. L'autrice ayant dessiné Femme Fatale en parallèle à d'autres projets, difficile de savoir si son œuvre était claire dans sa tête, et si elle a développé celle-ci comme elle le voulait. C'est de l'ordre de l'hypothèse, mais peut-être que la consistance globale de Femme Fatale a été sacrifiée pour les autres travaux de l’artiste, publiés à rythme plus soutenu et ayant donc davantage occupé son esprit.


Le coup de crayon pudique de la mangaka


Le trait de Kaya Shigisawa a quelque chose d'extrêmement raffiné. C'est d'abord la finesse du style qui séduit, dans notre lecture de Femme Fatale : Le coup de crayon est subtil et élégant, donnant aux personnages une certaine prestance. Et si la mangaka aime jongler entre les style pour servir son humour, par exemple en arborant un format plus SD pour garnir ses gags, c'est globalement l'aura visuelle sérieuse et mature qui l'emporte. En ce sens, le style de l'autrice est en totale adéquation avec le propos de l’œuvre qui se veut adulte. Même dans son art graphique, elle s'adresse à un lectorat au minimum adolescent, pour ne pas dire jeune adulte au minimum.

Alors, la lecture de l’œuvre se révèle séduisante si on la résume au plan purement graphique. Les planches servies par Kaya Shigisawa sont particulièrement propres et expressives, ce qui donne une certaine classe à l'ensemble du récit.


Et en parallèle, un apprécie un point tout particulier : La manière dont elle représente les rapports charnels entre les personnages. Dans Femme Fatale, il y a quelques scènes de sexe qui viennent servir le récit, et plus particulièrement le lien entre Saitô et Ebisawa. Globalement, c'est avec de la pudeur que l'artiste dépeint ces moments forts, l'idée n'étant jamais de montrer ces instants sous l'angle du voyeurisme. Et tant mieux, d'ailleurs, puisque les quelques séquences durant lesquelles Saitô abuse de celle qu'il aime sont déjà assez dérangeants pour que l'autrice en rajoute avec des détails visuels. Et a contrario, quand il s'agit de rapports consentis, cette patte confère aux scènes en question une certaine poésie. N'espérer par voir une pénétration en gros plan, ou bien une narration détaillée des préliminaires, puisque l'objectif n'est pas spécialement d'émoustiller le lectorat. Aussi, les plans sur la poitrine d'Ebisawa se comptent largement sur les doigts d'une main. C'est là un choix artistique purement voulu, et qui apporte finalement beaucoup au titre soit pour renforcer le glacial des séquences malaisantes, soit pour montrer la pureté du lien entre les deux protagonistes.

Kaya Shigisawa a donc sa petite patte, à savoir un trait qu'elle manie bien tout en montrant de belles intentions de mise en scène. Malheureusement, Femme Fatale étant la seule série de l'autrice que nous pouvons nous mettre sous la dent, difficile de savoir comment cette dernière a pu évoluer au fil des années. La présente série a été développée durant ses débuts en tant que mangaka, et on imagine qu'elle a fait un certain chemin, depuis.

Commentaires

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Iker Bilbao

De Iker Bilbao, le 16 Août 2020 à 23h25

Merci pour ce dossier !

Sans doute mon plus gros échec éditorial commercialement parlant. Mais je ne regrette pas une seconde de l'avoir publié en France :)

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