Border - Actualité manga
Dossier manga - Border

La vie et la mort, le bien et le mal


C’est dans le flou caractéristique à toute affaire criminelle que le nouveau talent d’Ishikawa fera des étincelles, car sa relation privilégiée avec les morts lui permet d’atteindre une vérité normalement à jamais perdue. Encore faut-il que les personnes décédées ne lui mentent pas ou que son propre pouvoir ne soit pas limité. Car oui, la fameuse capacité de notre inspecteur n’est pas totalement d’être totalement omniscient. Celui-ci peut peut-être communiquer avec les morts mais son don est conditionné par la volonté de ces derniers et par l’état cognitif de leur cerveau. Si ces deux conditions ne sont pas remplies, Ishikawa n’atteindra certainement pas la vérité factuelle. En d’autres termes, il se retrouve à devoir faire confiance à ce que lui dit les diverses victimes qu’il rencontre. C’est à la fois une aubaine et à la fois un risque. Une aubaine puisqu’il s’agit d’une porte inédite concernant l’après-mort. Un risque puisqu’il pourrait se retrouver manipulé... Et ce risque, il finira par le rencontrer.

L’inspecteur à la limite de la mort se rendra compte que parfois un criminel se montre bien plus humain que sa propre victime. Il se rendra compte parfois qu’un criminel le devient par obligation, par le drame ou encore par les circonstances. Il se rendra compte qu’une victime, même tuée dans des événements tragiques, peut se montrer déterminée à protéger ou à faire quelque chose, même si pour cela elle doit sacrifier autrui. Que même une ordure peut être une victime. Parfois, il verra que certains policiers ont décidé de poser des actes mauvais ou illégaux afin d’atténuer le mal et/ou de provoquer le bien. Ishikawa sera confronté à bon nombre d’exemples qui lui démontreront que la vie, les humains sont de véritables casse-têtes à eux seuls. La vie est immanquablement rattachée à la mort, tout comme l’est le bien au mal. Ces différentes frontières se croisent et se confondent en un épicentre, celui de la réalité.

Et la réalité du jeune inspecteur s’écroulera le jour où il aura donné la confiance de trop. Sa réalité s’écroulera le jour où le drame frappera une énième fois à sa porte. Cette fois-ci, il ne s’agira pas d’autrui ou d’extérieur à lui. Le drame frappera directement à l’intérieur.





La réalité, épicentre de ces différentes frontières


La réalité est multiple. C’est une notion que l’on connaît mais qui nous échappe tout à la fois. Elle est l’épicentre de bien des frontières et d’éléments. C’est un conte heureux et triste tout à la fois. Bien des fois, Ishikawa aura été confronté à des histoires aussi dramatiques que fatalistes. Malheureusement pour lui et pour nous, ces histoires sont des bouts de réalité. Sans jamais entrer dans le pathos, Border nous plonge dans les dessous de vérité que l’on observe dans notre vie réelle et que notre société a bien du mal à reconnaître ou à en parler. Mais, pendant ce temps, les dessous de vérité sont toujours bel et bien là. Peu importe de quoi ou de qui il s’agit, que ce soit des jeunes filles qui fuguent leurs parents violents pour finir en prostituées, des proches rongés par le drame, des ripoux, des victimes aussi cruelles que leur assassin ou encore des criminels aussi humains que meurtris.

Le drame dans sa plus grande banalité. Toutefois, jusqu’ici, ces mélodrames ne concernaient pas directement le jeune inspecteur et ses collègues. Mais le jour où la tragédie les touche directement, tout bascule. Leurs repères s’effondrent, Ishikawa a une enquête interne collée à ses basques et son affaire lui est retirée. Pour la première fois, son cœur se remplit de rancœur, d’impuissance et son don montre ses amères limites. Son impuissance, sa revanche le poussent à agir de lui-même, sans aucune autorisation ou légalité. Va-t-il franchir la ligne à ne pas franchir ? Va-t-il franchir la ligne qui se situe entre le bien et le mal ? Qu’est-ce qui pourra bien l’empêcher de faire le pas de trop ?  





La moralité, bouclier de la noirceur humaine ?


Le dernier volume de Border se concentrera tout du long autour de ces fameuses questions. Ishikawa, remonté, se laissera-t-il tenter par l’outil de son amertume, la vengeance ? La pointera-t-il vers la meurtrière de sa collègue ? Se laissera-t-il appâter par l’enivrement de la traque et de la chasse ? Deviendra-t-il prédateur ? Les auteurs tenteront de répondre à toutes ces interrogations en s’appliquant et évitant tout faux-fuyant. Ils développeront la réflexion de leur héros durant son investigation. Ils le feront aboutir au sommet de sa réflexion et de son évolution morale en le faisant rencontrer finalement la meurtrière de sa coéquipière.

Ironiquement, c’est en étant frappé par ce nouveau drame personnel que le héros finira par apprendre qui il est vraiment et par connaître sa propre sensibilité humaine. Généralement, ce n’est qu’à travers ces instants fatidiques que toute personne construit sa propre définition de la moralité. Le Larousse lui-même définit la morale comme « la conscience que l’on a de ce qui est bien ». Mais que peu bien valoir une notion abstraite sans la connaissance pratique et personnelle. Chaque être humain vit sa propre expérience et a son propre caractère. De ce simple fait, chacun ne peut pas avoir la même définition de ce qu’est et de ce que doit être la morale. C’est parfois cette notion personnelle de la moralité qui peut permettre à une personne de se sauver de sa propre noirceur en évitant de poser un acte aux dégâts irréparables. C’est ainsi qu’Ishikawa fera sa propre interprétation de ce qui est bien et de ce qui est mal.
  
  
  


© Yua KOTEGAWA 2014 © Kazuki KANESHIRO 2014 / KADOKAWA CORPORATION, Tokyo

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