Le mythe du Vampire au sein de Bloodline Symphony
Le mythe du vampire a été essoré jusqu'à la moelle dans les différents types d'arts ou de fiction. Du cinéma à la littérature en passant par le jeu-vidéo, de grandes figures vampiriques viennent immédiatement en tête. Le Manga n'est pas en reste, avec des titres forts comme Hellsing, Vampire Knight ou Seraph of the End pour ne citer qu'eux, la liste étant longue.
Alors, comment apporter sa pierre à l'édifice par un récit voué à être court ? Rapidement, on comprend que Pablo Rey et Noelia Sequeida cherchent à tirer leur épingle du jeu par une ambiance sombre et pesante, prouvant que l'œuvre n'a pas envie d'édulcorer la figure vampirique mais bien de la confirmer comme une créature inquiétante et un prédateur pour l'être humain. Ce choix est fort, notamment pour l'héroïne qu'est Amélia qui doit passer d'un camp à l'autre, et se nourrir de l'espèce à laquelle elle appartenait peu de temps auparavant.
Aussi, le mythe du vampire a régulièrement été associé à une dimension romantique, la bit-lit gardant un capital fascinant pour ses relations entre être humains et espèces surnaturelles. Cet aspect est fortement présent dans Bloodline Symphony, mais détourné de deux manières. La première, c'est que les relations se font entre vampires, puisque ce sont les buveurs de sang les stars de l’œuvre, là où les humains ne sont là qu'en très petit nombre, et souvent pour servir de bétail. A côté, les relations présentées sont rarement hétéronormées. Les personnages, dans l'histoire actuelle ou dans leurs vies passées, tombent amoureux des êtres qui les séduisent, tout simplement. Et du fait que le casting est essentiellement féminin, c'est par des relations entre femmes que le côté romantique de Bloodline Symphony est régulièrement croqué. Cela passe par des relations évidentes, fortes et charnelles comme celle qu'entretiennent Apnéa et Rachel, ou peuvent être de l'ordre du sous-entendu comme dans le cas d'Amélia et Argent. A juste titre, l'héroïne restant une entité jeune et mineure du point de vue légale, et il n'est jamais question pour le récit de tomber dans le mauvais goût. Ces relations sont aussi abordées sous une certaine atmosphère, ce qui fera l'objet d'une autre partie de ce dossier.

Et dans cette représentation de la figure vampirique, il est intéressant d'observer quelles images celle-ci dégage tout le long des deux tomes, que ce soit par des métaphores évidentes ou des pensées qui relèveront de l'interprétation du lecteur. Dans son rapport à l'humain, celui de proie sur le gibier, le vampire tel qu'il est présenté dans Bloodline Symphony est pourtant sans cesse rapproché des êtres mortels. Car l'histoire globale n'est pas si éloignée des récits humains d'autrefois, avec parfois même de légère connotations bibliques. L'œuvre raconte, entre autre, celle d'une guerre entre un frère et une sœur, un conflit qui a traversé les générations, nourri la haine et engendré la mort d'innocents. Une absurdité dont l'humanité a fait preuve tout le long de son existence, et qui marque aussi la lignée des vampires.
Pourtant, une opposition forte subsiste à travers le récit en deux tomes, et c'est en se penchant sur l'existence des personnages clés comme Amélia, Apnéa ou Rachel qu'on peut s'en rendre compte. Toutes trois ont comme socle commun une certaine forme de rejet de la part de la société, au point que leur vie de vampires sonnera comme une revanche. L'être de la nuit devient un marginal opposé au commun des mortels, leur rassemblement illustrant la nécessité des laissés pour compte de se réunir pour trouver un semblant d'équilibre. L'idée est assez fataliste, mais sa noirceur résonne avec l'atmosphère globale de Bloodline Symphony. Et en parlant d'ambiance sombre, difficile de ne pas évoquer la fin, finalement triste en ce qui concerne le personnage d'Amélia ramené à la forme de vie qu'elle a toujours connu : La solitude.

BLOODLINE SYMPHONY © 2019 Pablo Rey & Noelia Sequeida / Editions H2T