Real - Actualité manga
Dossier manga - Real
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18/20

Trois caractères, trois destins


Comme déjà dit, Real, c'est l'histoire, avant toute chose, de trois jeunes de caractères différents, un peu opposés, du moins au départ. Et dès le départ, Takehiko dresse un merveilleux portrait de ces trois êtres, jamais idéalisé ou quoi que ce soit du genre. Tout simplement, trois êtres tout ce qu'il y a de plus humain, avec leur ambitions, leurs qualités, leurs tares, qui n'ont, en soi, rien d'exceptionnel. Ainsi a-t-on la sensation que l'on pourrait croiser chacun d'eux au coin de la première rue venue. Et ce, bien que les trois héros se retrouvent dans des situations bien différentes.


Nomiya, le handicap présent
Ainsi, pas de handicap chez Nomiya, mais la culpabilité d'en avoir provoqué un. Ce sentiment de culpabilité est ce qui rend le personnage si humain. Loin de fuir ses responsabilités, il choisit de rester auprès de Natsumi. Il ne peut pas réparer son erreur, n'obtient en échange aucun remerciement, mais cela pourrait bien lui permettre d'aller à nouveau de l'avant, alors même qu'il n'a plus rien, qu'il ne peut plus jouer au basket qu'il aime tant, et qu'il accumule les échecs dans le travail.

Son handicap à lui se situe là. Son destin est de vivre avec la culpabilité, et de surmonter cela. Sa rencontre avec Togawa, totalement reconstruit après son handicap, lui amène alors une nouvelle perception du handicap. Il est possible de continuer à profiter de la vie malgré une infirmité, Togawa en est la preuve vivante. Cela lui permet de reprendre espoir pour Natsumi, et lui ouvre les portes d'un présent où il est bien décidé à tout faire pour aller de l'avant et devenir un homme meilleur.


Togawa, le handicap surmonté, les difficultés passées
Togawa, lui, est donc déjà passé par l'étape de la reconstruction. Dès le début de la série, il est handicapé, mais a déjà retrouvé des sensations de vie, à travers le basketball, mais aussi à travers la présence d'Azumi ou la naissance de sa rivalité avec Mitsuru Nagano. Chaque élément qui se présente devant lui, il est à présent capable de le prendre comme une opportunité d'aller toujours plus de l'avant. En ça, si tant est que l'on considère Real comme un manga sportif, on tient peut-être là le personnage véhiculant le mieux les valeurs d'un manga sportif: aller de l'avant, ne pas se décourager, saisir les opportunités, donner tout ce qu'on a.

Plus que jamais, ces valeurs prennent ici tout leur sens, et nous le saisissons encore mieux en découvrant le passé tragique de ce jeune homme promis à un brillant avenir de coureur, qui chute aux portes de son rêve, connaît ensuite tout le sentiment de détresse que peut ressentir une personne se retrouvant infirme du jour au lendemain. Il cherche alors à éviter ceux qu'il aime, Azumi la première, ne voulant pas se montrer sous un mauvais jour. Et il n'est pas toujours aidé par un père faible, qui a pourtant bon fond mais ne prend pas forcément les bonnes décisions, comme en choisissant de couver un peu trop son fils après son accident. L'adolescent, à seulement 14 ans, souffre beaucoup intérieurement, laisse finalement assez peu éclater sa souffrance. Mais il souffre.

Du temps, il en a fallu à Togawa pour se reconstruire et retrouver la force qui l'anime aujourd'hui. Le soutien d'Azumi a joué, mais, surtout, c'est la rencontre de deux garçons qui l'a réveillé. Le premier, Yama, nous l'avons déjà évoqué. Gravement malade, cloué au lit, il ne regrette pourtant rien, et ses mots se répercuterons directement sur Togawa. Le deuxième se nomme Tora, un tatoueur, basketteur à ses heures perdus, mais pas de basket classique: de handi-basket. IL n'est autre que le fondateurs des Tigers. La rencontre de Togawa avec cet homme s'avère être un déclic, car c'est lui qui lui fait découvrir le basket en fauteuil roulant. Qui lui fait miroiter, pour la première fois, le rêve de pouvoir à nouveau laisser s'exprimer pleinement son corps. Dès lors, on peut  également comprendre l'importance du club des Tigers pour Togawa.

Pourtant, aujourd'hui, Togawa a encore beaucoup à apprendre. S'il est redevenu fort, sa soif d'aller de l'avant est devenue inarrêtable. Mais si son ambition est à présent incassable, il doit encore réussir à utiliser à bon escient l'égoïsme qu'il peut montrer au sein de l'équipe des Tigers. Qu'on se le dise, dans Real, même quand on devient fort, on a encore des faiblesses très terre à terre, comme n'importe quel homme. Et c'est ça qui rend le manga d'Inoue si humain.

Ainsi, pourtant, à 14 ans, gamin avide de courir mais pas spécialement expressif, qui passait son temps à se faire frapper par certains à cause d'un manque de réaction, d'une trop grande passivité, Togawa est devenu, 5 ans plus tard, et malgré une jambe en moins, un jeune homme fort, désireux d'aller de l'avant avant tout, avide de profiter de la vie, parce qu'il en a compris la valeur.


Takahashi, le nouvel handicapé, le futur à construire
Cette idée, il faudra du temps à Takahashi pour la comprendre. De celui à qui tout réussissait, une personne "de classe A" comme il aime le dire, le voici devenu, à son sens, un "classe E", voire moins que ça, devenu incapable de bouger, de faire quoi que ce soit par lui-même. Et c'est son éternelle arrogance qui en souffre. Au contraire d'un Togawa qui fut plus introverti face à l'épreuve, Takahashi se montre totalement expressif, n'hésitant pas à hurler, à crier sa haine de tout, rejetant tout en bloc sans demi-mesure, de ses camarades de classe passés le voir à sa petite amie, allant-même jusqu'à dire à sa mère d'aller crever. Le regard des autres, il ne le supporte plus. Sa rééducation, il la refuse. Une vie d'handicapé, une vie de personne qu'il a toujours considérée comme inférieure, il n'en veut pas. La faute à un orgueil mal placé. Mais aussi à une notion qu'il n'avait jamais connue auparavant: celle d'effort. Auparavant, presque tout lui tombait tout cuit dans la main, sans qu'il ait besoin de forcer. A présent, le voilà obligé de donner le meilleur de lui-même s'il souhaite ne serait-ce que réussir à se déplacer de son lit d'hôpital à son fauteuil. Et au départ, il s'en montre totalement incapable.


 
 
 

Aller de l'avant


C'est sur la base de ces trois personnages opposés que Takehiko Inoue met en place l'un des grands sujets de son oeuvre: la détermination, la volonté de ne jamais abandonner, d'aller toujours de l'avant.

Au début du manga, Togawa a déjà cerné cet objectif, il ne lui reste plus qu'à l'appliquer via diverses étapes. Et la façon dont il s'est reconstruit, nous la saisissons bien à travers les retours sur son passé. Il lui reste encore des choses à apprendre, à maîtriser, comme un caractère un peu trop égoïste.

Nomiya, de son côté, est un cas un peu part par rapport aux deux autres héros. Ses angoisses ne sont pas les mêmes, car il n'est pas handicapé, mais a provoqué un handicap. Le doute l'assaille régulièrement, il n'est pas rare de le sentir totalement perdu, que ce soit vis-à-vis de Natsumi ou de son avenir personnel. Mais malgré les échecs qui peuvent se présenter face à lui, il a choisi de prendre en main sa vie. Et même s'il ne sait pas toujours comment, il ne baisse pas les bras, réussissant même à réunir ses deux grands tourments pour aller de l'avant. Ainsi, ses angoisse face à la conduite et à Natsumi, il les affronte ensemble et les relie, car c'est pour la jeune fille qu'il se résout à obtenir son permis à tout prix, première étape vers une évolution dans le bon sens, qui se poursuit alors jusqu'à ce que l'on retouve notre héros animé d'un véritable objectif.

Finalement, Takahashi reste bel et bien le cas le plus compliqué. Nous l'avons vu, il renie tout en bloc, refuse tout gentillesse. Son changement s'annonce d'emblée comme un travail de longue haleine, et va passer par plusieurs étapes qui seront autant de tournants vers un caractère plus humain.
Cela passe, par exemple, à travers une gentillesse qu'il montre rarement et de manière succincte, mais qui existe, là, quelque part au fond de lui. Ainsi le voit-on offrir un ballon au jeune garçon qui se trouve dans la même chambre d'hôpital que lui, ou regretter amèrement les mots cruels qu'il a pu lancer à la figure de sa mère.
Le changement, il arrive aussi par le biais de ses proches. Les mots que Nomiya lui dit le boostent, quoi qu'il en dise, et les visites régulières de sa petite amie, qu'il rejette pourtant violemment, pourraient bien changer quelque chose. Et, surtout, il y a son père. Un père qu'il n'a pas vu depuis 8 ans, qui revient en apprenant la nouvelle, qui réveille en Takahashi de vieux et précieux souvenirs, et qui lui fait découvrir la simplicité de son existence, loin de tout signe de vanité et d'orgueil mal placés.
Au fil des volumes, ces éléments sont autant d'étapes vers l'acquisition de cette humilité qui manque tant à Takahashi, une humilité qui sonne comme le premier objectif à atteindre pour pouvoir repartir de l'avant.



Real © INOUE Takehiko / IT.Plannings.Inc.

Commentaires

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Kurumi

De Kurumi [604 Pts], le 17 Septembre 2011 à 19h16

Super génial ! :D
Tout comme ce manga d'ailleur ! ♥

titali

De titali [2269 Pts], le 17 Septembre 2011 à 17h18

18/20

Très beau dossier pour une série tout aussi belle!:)

Parfois un peu de lourdeur et de répétitions, mais c'est vite oublié, vu que le dossier est franchement intéressant et bien fait!

Koiwai

De Koiwai [12693 Pts], le 17 Septembre 2011 à 01h49

Merci !

Pour ma part; comme, souvent, je ne suis pas totalement satisfait de mon travail XD Je regrette un plan faisant appel à quelques répétitions... mais bon, mieux vaut se répéter que d'oublier certains éléments, je suppose ^^

En ce qui concerne la traduction, j'avoue ne pas être choqué par cet aspect assez soutenu dans Real, voire de manière générale dans d'autres séries. Après, tout dépend du type de série, et sur Real je trouve que ça fait plutôt bien ressortir la beauté de certaines phrases ^_^

Quant aux fautes de frappe, la majorité doit à présent être corrigée ^^ C'est que ça m'arrive souvent, ce genre de petites fautes...

Raimaru

De Raimaru [1233 Pts], le 16 Septembre 2011 à 21h28

Le mot de la fin est sublime, bravo Koiwai \o/

 

Real est un de mes mangas préférés (il est malheureusement sorti de mon podium depuis que j'ai découvert Ashita no Joe, pourquoi un podium ne peut-il pas avoir quatre places T_T), mais c'est techniquement le meilleur manga que j'ai lu. Pas de faux pas, que des grands bonds.

 

Real, c'est simplement l'histoire de trois gars confontés à une difficulté commune et qui ont le même centre d'intérêt. Mais ce que y est le plus fort et comme ça a été dit, c'est qu'ils se croisent et se poussent mutuellement à avancer lors de ces croisements, mais sans vraiment... être amis finalement. Nomiya éprouve un certain respect pour Togawa qui finalement ne lui rend pas en apparence, et Takahashi n'évolue que par les provocations de Nomiya. C'est en ça que c'est puissant et très réaliste. On n'a tous plus ou moins été influencé dans nos vies par des personnes qu'on ne connait pas plus que ça, sauf que voir ça dans un manga, ce n'est pas forcément commun. Et en plus c'est bien fait.

 

Juste un point sur lequel je ne suis pas d'accord : la qualité de la traduction de Thibaud Desbief. J'ai beaucoup aimé son travail sur Solanin (certaines répliques basiques m'ont bien fait rire parce qu'elles étaient bien tournée =D), je n'ai pas été choqué par celle de Pluto, mais elle reste lisse. Par contre sur Real, elle me pose problème. Je doute que même au Japon, dans la réalité, des jeunes de 18-20 ans utilisent des "cela" et des inversions sujet-verbe dans les questions à tout-va. C'est trop guindé.

 

Dernière chose, rien de bien grave : il y a pas mal de coquilles dans le dossier ^^' C'est dommage parce que les tournures sont très bonnes =)

kiki_

De kiki_, le 16 Septembre 2011 à 12h55

Un super dossier pour un super artiste :D

Merci a vous.

 

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