Mari Okazaki - Actualité manga
Dossier manga - Mari Okazaki

La passion au pluriel

 
 
Certaines histoire de Mari Okazaki débordent de passions. Certains personnages ne peuvent plus concevoir leur quotidien sans sport, sans une passion concrète, d'autres, s'éprennent de quelqu'un, à un point où cet amour peut être qualifié de réelle passion.
 
Dans son one shot Effleurer le ciel, Mari Okazaki aborde l'amour d'une adolescente pour un sport : le patinage artistique. L'héroïne, Ery Ogawa, n'est pas une débutante. Mais très jeune elle arrête de pratiquer ce sport, pour finalement voir son quotidien devenir morne et plat. En se promenant dans un parc, elle voit une jeune femme et un homme se disputer, et soudainement, ce dernier se met à danser. Ce court moment, qui pour ses camarades de classe, n'est qu'une banale dispute de couple, ravive la flamme chez Ery. La jeune fille se remet au patinage artistique et retrouve ainsi cet homme qui dansait si bien : monsieur Kobayashi. Le patinage artistique est pour Ery un moyen de se surpasser. Ses camarades de classe trouvent ce sport étrange et pensent qu'elle a des goûts particuliers, qui tendent à la mettre en marge. Mais Ery reste indifférente à ces remarques et aux railleries stupides d'adolescentes jalouses qui ne cherchent pas à comprendre les passions des autres. Effleurer le ciel montre l'épanouissement fulgurant d'une jeune fille qui avait perdu tout éclat, seulement en l'espace d'une centaine de pages. Au premier abord, l'on peut penser que le lecteur n'a pas le temps de s'attacher ni aux personnages, ni à l'histoire en elle-même ; comme dans un bon nombre de one shot. Mais contre toute attente, Mari Okazaki réussit à nous transporter dans le monde d'Ery. La jeune fille, qui a son propre univers et qui ne se préoccupe en aucun cas des regards envieux ou curieux qui peuvent se poser sur elle, nous captive grâce à son caractère fort et à sa joie de vivre. Ery se mesure à plus fort qu'elle, sans peur. Et malgré les chutes et les échecs, elle se relève toujours avec le sourire. Certaines héroïnes, qui pourraient lui ressembler, semblent trop naïves. Ery, elle, malgré les obstacles et sa gaieté permanente qui pourrait agacer, est finalement tellement convaincue de sa possible réussite qu'elle ne nous convainc sans mal. Ainsi, la voir s'épanouir sur la glace, défier mademoiselle Kasuga, une élève « à part », sont des instants forts, lors desquels Mari Okazaki nous montre que l'impossible n'est pas une fatalité, mais que la passion alliée à l'amour permet de défaire des obstacles que la plupart des observateurs extérieurs pensent être trop hauts et trop ardus pour pouvoir être défaits.
 
 
« Depuis que nos routes se sont croisées... pour la première fois, je me sens forte... et capable de réaliser mon rêve ! »
Effleurer le ciel.
 
 
La passion pour le sport, dans Effleurer le ciel, est sublimée par l'aspect même du patinage artistique. Mari Okazaki met en exergue les difficultés de ce sport, tout en insistant sur la facilité apparente avec laquelle les professionnels accomplissent des chorégraphies loin d'être faciles techniquement. Mademoiselle Kasuga, l'élève officielle de monsieur Kobayashi, est l'exemple dans ce one shot, de ces sportifs qui bénéficient de capacités que d'autres n'ont malheureusement pas. Cela fait d'eux des êtres adulés, qui dès leur plus jeune âge, doivent avoir les épaules assez solides pour porter les espoirs de nombreuses personnes. Mademoiselle Kasuga a la dure tâche d'aller plus loin, d'exceller, pour pouvoir monter à la plus haute marche du podium et ainsi contenter toutes ces personnes qui croient en elle. Ainsi la passion, qui au départ est désintéressée et surtout, est un simple plaisir, se transforme en performances à devoir surpasser chaque jour. L'on demande plus à la jeune fille, elle qui finalement est humaine, mais qui doit glisser à une vitesse folle, voler et enchaîner des figures, tel un être surnaturel qui balaie la piste de la plus gracieuse des manières. La rivalité qui s'installe entre mademoiselle Kasuga et Ery peut facilement nous faire penser à cette compétitivité féminine que Mari Okazaki met en avant dans sa série Complément Affectif. Dans ce sens où les femmes sont en rivalité constante, et malgré cela, elles n'oublient jamais le respect mutuel. Mademoiselle Kasuga voit en Ery une concurrente dangereuse, qui risque de mettre en péril sa place et de remettre en question ce caractère « à part » de ses capacités, que monsieur Kobayashi veut tant exploiter. Ery, qui malgré quelques difficultés, parvient à talonner cette mademoiselle Kobayashi qui a pourtant tant de classe... Toute cette bataille féminine, à laquelle peut s'ajouter une dispute amoureuse, celle des faveurs du même professeur, est un combat qui permet aux deux jeunes filles d'aller au-devant des difficultés pour exceller dans leur sport, et ainsi, atteindre des sommets qu'elles pensaient si lointains. Mais Ery et mademoiselle Kasuga sont dignes, et ne sont pas égoïstes. Elles prennent en considération les démons de monsieur Kobayashi et respectent ses sentiments, bien avant de vouloir à tout prix assouvir leurs envies.

Passion pour un sport, mais aussi passion pour le travail. Malgré le nombre des publications de Mari Okazaki, il est inconcevable de ne pas aborder, au moins durant quelques lignes, cette passion pour le travail que l'on trouve dans Complément Affectif. Cette série nous montre un petit monde qui s'affaire chaque jour au sein d'une entreprise, mais surtout, cette éternelle mademoiselle Fujii, toujours fidèle au poste. Cette employée d'une agence de publicité, de par la place qu'elle donne à sa profession dans sa vie, voit sa vie sentimentale totalement altérée. Elle passe autant ses journées au bureau que ses nuits. Uniquement de passage dans son appartement, elle semble, à certains moments, de pas y vivre. Dépourvu d'homme, c'est un lieu bien souvent désert, qui ne sert qu'à prendre et déposer des affaires. Tout au moins, c'est le cas au début de la série. Cette passion pour le travail est en réalité une volonté de bien faire, ajoutée à une envie de réaliser un rêve : celui de faire vibrer les spectateurs, comme elle-même a pu frissonner devant son petit écran lorsqu'elle était plus jeune, à regarder certaines publicités qui ont éveiller une passion. À cet amour pour le travail bien fait, mais surtout, cette envie de toucher les gens, s'ajoute un quotidien empli d'interactions plus ou moins fortes et marquantes avec les hommes et le femmes qui font eux aussi, partie de cette société au cœur de la grande société qu'est le monde. Chez Mari Okazaki, autant la passion peut être assimilée à l'amour pour un sport, autant elle peut paraître très terre à terre, lorsqu'elle est symbolisée par le quotidien d'employés de bureau. Bien heureusement, les hommes sont une fois de plus là pour ajouter une pointe de romantisme, indispensable à ces récits au cœur vulnérable.

 
GIN NI NARU © 2005 by Mari Okazaki / SHUEISHA Inc.  
  
 

L'amour est bien entendu au centre des œuvres de Mari Okazaki. Les hommes sont passion. Ils bercent le cœur des femmes et ne leur laissent aucun répit. Mari Okazaki nous montre qu'à tout âge, la femme a le cœur qui se met à battre pour un être qui les attire, parfois sans raison apparente. Un geste, un regard, quelques mots suffisent à faire chavirer des cœurs. Monsieur Kobayashi, dans Effleurer le ciel, charme la jeune Ery Ogawa malgré lui, en réalisant un enchaînement d'une chorégraphie de patinage artistique, et ce sur le sol. Malgré l'absence de glace et une grâce diminuée, Ery s'éprend en quelques instants de cet homme aigri au cœur lourd, qui de plus, est beaucoup plus âgé qu'elle. Dans 12 mois, c'est Shû, un nouvel élève de la classe, qui fait battre le cœur de l'énergique Tosachi. Un garçon énigmatique, très différent des autres adolescents de la préfecture de Mérino, et qui par conséquent, attire les regards de tous.

Dans Effleurer le ciel, monsieur Kobayashi est ce qui pousse Ery à reprendre sa passion et à dépasser ses limites. La jeune fille, qui enfant était un espoir dans le monde du patinage artistique, avait abandonné à cause de la pression continuelle qui reposait sur elle. Monsieur Kobayashi ravive sa passion pour le patinage artistique, tout en animant la flamme de l'amour dans son cœur qui était pourtant si froid. Ici, l'homme est un moteur. Il permet à l'héroïne de s'épanouir, de se dépasser, et surtout, de toucher au bonheur, malgré le caractère impossible de la réalisation de cet amour. Au lycée, Ery est une adolescente effacée, qui s'éloigne petit à petit de ses camarades de classe. Elles, qui semblent si banales et surtout, futiles, ne parviennent pas à comprendre Ery. Cette dernière est indifférente aux moqueries de ses camarades, mais plutôt, vit au travers des sensations que lui procure cet amour pour monsieur Kobayashi. Ery fait partie de ces filles qui s'entêtent, et malgré les réticences de monsieur Kobayashi à lui donner des cours particuliers, elle continue à le poursuivre et à le forcer à lui donner des conseils en patinant toujours devant lui. La relation entre Ery et monsieur Kobayashi est alors conflictuelle et la jeune fille doit par conséquent se battre pour bénéficier des conseils du professeur particulier. Mais bien entendu, l'héroïne croit au pouvoir de l'amour et est persuadée qu'il permettra à monsieur Kobayashi de retrouver son sourire et sa gaieté d’antan.

Le jour où l'étrange Shû arrive dans la préfecture de Mérino, le quotidien de Tosachi est bouleversé.  Dès le premier regard posé sur le garçon, la jeune fille s'éprend de lui, comme elle ne s'était jamais éprise de personne. Les deux êtres sont pourtant si différents. L'insouciance et la naïveté de Tosachi contrastent on ne peut plus avec le caractère posé de Shû. Cet adolescent est sans doute le garçon le plus étrange des personnages masculins mis en scène par Mari Okazaki. Très calme et posé, il semble ne pas se rendre réellement compte des sentiments de Tosachi à son encontre. Jusque la fin de cette série en deux volumes, Shû est une énigme, autant pour le lecteur que pour les personnages de 12 mois. Le tireur de l'été est condamné à voyager, afin de permettre à tous de profiter de l'été. Shû est donc un adolescent qui en réalité, a plusieurs vies qui se succèdent les unes aux autres, et cette halte à Mérino ne serait finalement qu'un instant parmi tant d'autres, qu'il passera aux côtés de nouveaux amis, relations condamnées à ne pas perdurer dans le temps, mais à mourir pour que d'autres personnes, à leur tour, puissent profiter des beaux jours de l'été.
Le personnage de Chika, dans 12 mois, est un garçon qui, loin d'être élégant, est attendrissant par sa timidité. Son amour pour Tosachi crève les yeux dès les premières pages, mais malgré cela, la jeune fille semble insensible à son regard transi, et par-dessus tout, elle ne semble même pas se douter une seule seconde de ses sentiments envers elle. Chika est un garçon plein d'énergie, un brin bagarreur, qui souhaite conserver son territoire et voit d'un mauvais œil lorsqu'un étranger y met les pieds. Malgré tout, il est très tolérant et finit très vite par accepter Shû dans son cercle d'amis. Chika n'ose jamais approcher Tosachi. Il semble vouloir la respecter,et a instauré une distance entre eux, un espace qui lorsqu'il est franchi, le déstabilise et lui fait perdre ses moyens. L'enfance de Chika est triste, car il n'a pas connu sa mère. Le garçon est alors, depuis son plus jeune âge, à la recherche de cette dernière. Ayant finalement abandonné, il souhaite désormais avoir du réconfort et une chaleur auprès de la fille qu'il aime, afin de trouver le calme et d'être enfin apaisé. Mais le sort en décide autrement, et Chika est confronté à une rivalité masculine, qu'il est d'ailleurs le seul à ressentir. L'arrivée de Shû aux côtés de ses amis n'était pas du tout dans ses plans et semble mettre en péril ses espoirs. Au même titre que l'on peut affirmer que Tosachi et Shû sont différents, Tosachi et Chika se ressemblent étrangement. Tous deux sont toujours plein d'énergie et n'hésitent pas à crier, courir, sauter, pour affirmer leur joie. Ce sont les deux personnages qui participent à la vivacité de la série et qui sont le plus en contact avec les éléments de la nature.

Cette passion pour une activité, mais plus encore, la passion pour quelqu'un, sont des composants importants dans l'œuvre de Mari Okazaki. Pour aller encore plus loin, et continuer à découvrir une des raisons pour lesquelles les récits de cette mangaka réussissent sans cesse à nous toucher, intéressons-nous à ce qui nous entoure chaque jour, à ce qui fait de nous des êtres sensibles à leur environnement : à la sensibilité.
 
 

© Mari Okazaki / SHUEISHA Inc.

Commentaires

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akiko

De akiko [5480 Pts], le 15 Novembre 2012 à 16h47

Ah merci pour le lien du dossier =)

geoff

De geoff [1327 Pts], le 09 Novembre 2012 à 21h53

Un super dossier comme toujours. 

J'ai eu l'occasion de lire quelques un de ses one shots en bibliothèque, un jour où je ne savais pas quoi prendre. Car il faut avouer que les couvertures ne m'attiraient pas trop. Et après lecture j'avais bien apprécié son style.

Du coup, je me suis moi aussi intéressé à sa série longue, Complément affectif. Malheureusement, l'ayant découverte assez (trop?) tard, j'ai eu du mal à me procurer le tome 2. Ce dernier est en rupture et aucune réimpression ne sera faite ... Cela m'a pris quasiement 10 mois de recherche entre ebay et boutiques d'occaz pour trouver ce tome à un prix correct. 

Elle fait partie de ces rares bons auteurs qui malheureusement ne trouvent pas de public en France ... Au même titre que Mitsuru Adachi ou Kei Toume par exemple (du moins, c'est mon avis).

Manga-News

De Manga-News [3732 Pts], le 09 Novembre 2012 à 17h28

Pour complément affectif tu peux tout savoir via un autre dossier qui lui ai consacré

https://www.manga-news.com/index.php/report/Complement-affectif

akiko

De akiko [5480 Pts], le 09 Novembre 2012 à 16h51

ps: en tous cas le dossier est super =)

akiko

De akiko [5480 Pts], le 09 Novembre 2012 à 16h50

Je me laisserai bien tenter par complement affectif mais est ce que c'est une histoire qui ce suit ou plusieurs histoires comme j'ai pu le lire dans les avis de Shibuya love hotel?

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