La Cité Saturne - Actualité manga
Dossier manga - La Cité Saturne
Lecteurs
20/20

Un métier très humain !

   
 

Mitsu, notre nouvelle recrue prometteuse

    
Notre découverte de la cité Saturne passera par le regard de Mitsu, héros omniprésent que Hisae Iwaoka tâchera de faire apparaitre au moins une fois par chapitre, ne serait-ce qu'au détour d'une case. Pour sa première série longue, la mangaka a décidé d'établir la narration autour de l'évolution de ce protagoniste, à la manière de l'héroïne de son Yumenosoko appréhendant le monde des rêves. Nous pouvons également procéder à un parallèle avec la figure emblématique du "héros" dans un shonen : en effet, Mitsu est un garçon en plein apprentissage, suivant les conseils de ses mentors (et de son "vieux maitre"), mais montrant rapidement des prédispositions pour réaliser sa tâche. Bien sur, le jeune homme n'a pas l'ambition d'un futur roi des pirates, mais il tend toujours à donner le meilleur de lui-même et progresse de manière drastique. Enfin, autre point de concordance majeur : Mitsu est dans une perpétuelle recherche du Père...
  
Alors qu'il travaillait à une mission au niveau inférieur, Akitoshi, le père de Mitsu, disparut en perdant ses appuis contre la paroi. On ne retrouva de lui qu'une corde de rappel sectionnée ainsi que, quelques années plus tard, des traces de main attestant que l'homme ne s'était pas sciemment jeté dans l'atmosphère terrestre, mais qu'il avait bel et bien tenté de survivre. Par naïveté, incrédulité ou espérance indéfectible, Mitsu reste convaincu que son père n'est pas mort dans sa chute, contrairement au reste de ses collègues, et qu'il doit l'attendre, en bas, sur la planète bleue oubliée des hommes. Cette optique sera d'ailleurs à mettre en commun avec l'intrigue annexe du retour vers la Terre portée par Sôta, à laquelle le jeune homme sera invité à prendre part.... En attendant le jour  des retrouvailles (s'il arrive), Mitsu souffre moins de l'absence de son père que de la pression qu'elle engendre dans son travail. Du souvenir de ses camarades, Akitoshi était un employé très efficace, respecté de tous, toujours de bon conseil. Le jeune homme travailler alors avec cet héritage en tête, se comparant lui-même à cette figure disparue, d'autant plus qu'il reste très redevable envers le syndicat. Alors que la compagnie l'a encadré et a payé la bourse d'indemnités lui permettant de vivre pendant cinq ans, Mitsu est naturellement entré dans le métier avec un sentiment redevable. Sérieux et consciencieux, le jeune homme est parfois jusqu'au-boutiste dans le travail, au point parfois d'encaisser difficilement les remarques de ses supérieurs, le mettant en face de ses erreurs. Ce manque de confiance en lui, couplé à une certaine timidité, sera souvent mis à l'épreuve, notamment lorsqu'il prendra de nouvelles responsabilités et qu'il devra diriger les autres. Cependant, Mitsu dispose d'un atout capital pour le travail de groupe : son capital de sympathie sans borne !
   
Même si certains employés le dénigrent encore, en particulier Makoto, Mitsu est rapidement "adopté" par le syndicat (son tuteur officiel étant Kageyama). Les autres travailleurs apprécient le dévouement du jeune homme et le considèrent d'égal à égal, en oubliant son jeune âge. Bien sur, dans ce milieu exclusivement masculin et très adulte, nous ne devrons pas nous attendre à un épanchement d'amour, mais à une notion de respect et de reconnaissance des mérites plus tacite. De plus, hors des horaires de travail, Mitsu reste souvent en compagnie de ses collègues, évoquant souvent son père disparu lors de leurs conversations, et devenant également le témoin privilégié de leurs problèmes. De par l'empathie qu'il ressent pour les autres, Mitsu est également le miroir des tracas quotidiens des habitants de l'édifice satellitaire, qu'il s'agisse de ses camarades comme de ses clients.
     
 
  
     
 

Apportez la lumière aux autres !

   
En travaillant à la surface de la cité Saturne, Mitsu et les autres employés du syndicat sont dans une position privilégiée pour observer tout ce qui s'y passe. Chaque vitre nettoyée est une lucarne de plus vers l'intérieur d'une habitation, et si les occupants peuvent l'occulter temporairement pour éviter tout voyeurisme, ils se laissent la plupart du temps exposés sans trop de gêne. Si les autres laveurs de carreaux ne s'en préoccupent guère, Mitsu, derrière son professionnalisme, s'inquiète de temps à autre de la satisfaction de ses clients et de leurs préoccupations. Les clients ont d'ailleurs le droit de communiquer par radio avec les employés, et peuvent également les inviter chez eux après leurs horaires de travail. Certains trouvent chez le jeune homme une oreille fort attentive, et n'hésitent pas à déballer leurs problèmes personnels. Qu'il s'agisse d'amuser des enfants, de surveiller une personne malade à travers la fenêtre ou encore de satisfaire les caprices de quelques propriétaires excentriques, Mitsu se prête toujours à l'exercice malgré quelques réticences par moment. Une certaine forme de dialogue social s'instaure alors entre l'ouvrier du monde d'en bas, et les habitants plus fortunés. Le jeune homme remet alors tout le monde sur un même pied d'égalité devant les problèmes de la vie...
  
En étant toujours ouvert à la discussion, Mitsu met en exergue les tracas des autres et essaie de résoudre les siens.  Car derrière son aspect bon enfant et bienveillant, la série peut traiter de thèmes assez graves : la mort, avec la disparition d'Akitoshi et tout ce qui s'ensuivit; la maladie, avec l'épouse de Jin et les dégradations de santé dues au rayonnement ultra-violet; le repli sur soi, avec Tamachi et Makoto, et ainsi de suite... Le récit prendra même des atours plus tragiques vers sa conclusion, en particulier avec le personnage de Nishimaru, scientifique désabusé ayant de profondes raisons d'en vouloir aux gens d'en-haut. Ce sont ainsi de nombreuses facettes de rapports humains qui seront mises en évidence, avec une gravité relative selon les cas et leurs rapports à l'organisation sociale.
   
Les protagonistes de la Cité Saturne ne sont que des hommes ordinaires dans un contexte extraordinaire. Hisae Iwaoka sait sublimer chacun de ses personnages, en lui apportant d'abord un fort trait de caractère, souvent propice à la légèreté et à l'humour. Une manière pour chacun de cacher ses soucis, voire de les relativiser car, au fond, tout n'est pas si grave ! Pour rompre le caractère austère de la hiérarchie de classe qu'elle a créée, la mangaka apporte une grande part de fantaisie dans la vie de ses habitants. On pensera notamment au caractère franc de Kageyama et aux facéties de sa fille Fuyu, au running-gag sur le nom de Sôta ou encore l'étrange passion pour les œufs de Tamachi et de sa famille. La série passe ainsi constamment des larmes aux rires avec sa folie douce qui égaye le quotidien, et qui lui apporte son côté doux-amer si particulier, si unique.
  
 

DOSEI MANSION by Hisae Iwaoka © 2006 by Hisae Iwaoka / Shogakukan Inc., Tokyo

Commentaires

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Tianjun

De Tianjun [5044 Pts], le 13 Juin 2012 à 10h52

Merci ! ^___^

J'ai littéralement redécouvert la série avec la rédaction de ce dossier, elle méritait bien une relecture globale et plus posée. Et quel final ! 

Thot

De Thot [893 Pts], le 12 Juin 2012 à 14h13

Excellent dossier, pointu, construit, détaillé, fouillé...

Bravo pour cette mise en valeur réussie d'une série magnifique!

Nintenn

De Nintenn [1559 Pts], le 09 Juin 2012 à 12h42

Des personnages forts, un dessin particulier et une ambiance singulière avec des paysages qu'on a pas l'habitude de voir le tout sur un scénario très bien monté. Le dernier tome est bientôt dans ma bibliothèque j'ai hâte de voir le dénouement.

 

Tomoyochan

De Tomoyochan [1614 Pts], le 08 Juin 2012 à 21h07

20/20

Très bon dossier pour une série malheureusement méconnue, toute en finesse et en poésie. Les personnages, en particulier Mitsu, sont tous très attachants. La série évolue naturellement, tout en retenue, au rythme des tranches de vie des protagonistes. Le dessin très doux est original et donne d'autant plus de force au récit. Une série magnifique qui gagne vraiment à être lue et reconnue.

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