Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 26 Décembre 2025

Lancée en France par les éditions Crunchyroll en octobre dernier, Stage S est la toute première (et à ce jour unique) série de la carrière de Tomoya Harikawa. Achevé en six volumes, ce manga d'action surnaturel a vu ses cinquante chapitres être initialement prépubliés au Japon entre 2022 et fin 2024 sur la plateforme Shônen Jump+ des éditions Shûeisha.

On commence par y découvrir Meguru Ukiyo, un lycéen de 16 ans qui n'a pas été gâté par la vie jusque-là: ses parents sont morts dix ans auparavant dans un accident de la route dont lui-même est miraculeusement ressorti en vie, il en est resté traumatisé et sans goût particulier pour la vie... Son seul réconfort fut alors la présence permanente, pour le soutenir, de son amie d'enfance Sara Tatsumi, pour qui ses sentiments se sont mués en amour secret depuis bien longtemps. Les choses auraient pu s'arrêter là, mais voilà qu'un jour, en errant, le jeune garçon tombe sur une sorte de petit sanctuaire où une surprenante divinité, le Serpent Blanc, le supplie de l'aider. Une offrande plus tard, et voici le jeune garçon désormais accompagné de ce petit dieu bizarre qui possède l'étonnante faculté de voir l'avenir, et qui lui conseille alors de vitre déclarer sa flamme à Sara car cela fait des années que leurs sentiments inavoués sont réciproques. Sortant enfin avec celle qui représente tout pour lui, Meguru touche pour la première fois du doigt le bonheur... bonheur voué à vite disparaître à nouveau. Tout d'abord, parce que le Serpent Blanc lui prédit sa triste et inévitable mort, poussant alors notre héros à rompre avec Sara dans l'espoir de lui éviter trop de tristesse. Ensuite car, une fois mort, une autre prédiction arrive juste avant qu'il rejoigne l'Au-delà: dans cent jours, Sara va elle aussi mourir massacrée par le Serpent Noir, le pire ennemi du Serpent Blanc. Pour protéger celle qu'il aime, Meguru accepte alors de renoncer à son humanité et de revenir d'entre les morts afin de trouver le moyen de changer le destin de Sara...

Shonen d'action surnaturel sur fond de romance tragique, Stage S possède, à la base, tout ce qu'il faut d'ingrédients pour constituer un petit divertissement entraînement, à défaut de montrer le moindre petit milligramme d'originalité. Mais encore faut-il, pour ça, que le récit parvienne à nous interpelle suffisamment, que ce soit dans sa mise en place, ses personnages, ses rebondissements ou ses dessins, et malheureusement ici le bât blesse sur un peu tout les aspects.

Derrière une phase d'installation aussi rapide que basique, où même l'amourette entre Meguru et Sara peine à toucher tant elle est survolée, Tomoya Harikawa se contente d'enchaîner des rebondissements téléphonés prenant déjà la voie archi vue et revue de l'intégration du héros dans une organisation secrète d'exorcistes vouée à lutter contre les entités maléfiques, celles-ci prenant ici la forme de souillures que Meguru devra visiblement combattre jusqu'à atteindre le Serpent Noir et à changer le destin. C'est sûrement à partir de là que le récit vrille le plus, tant les premiers personnages rencontrés dans cette organisation sont des têtes à claques jouant sur des clichés vaguement humoristiques qui sont très, très forcés et peuvent même paraître assez douteux, à l'image de la dénommée Kujira Mitsuami, adolescente obsessionnelle qui se met immédiatement en tête qu'elle aime Meguru et qu'elle va l'épouser, en voulant même le forcer à l'embrasser... C'est lourd, ça ne sert à rien, et ça casse l'ambiance.

A part ça... eh bien, il n'y a pas grand chose à se mettre sous la dent. Les quelques éléments mystérieux (principalement sur l'amnésie du Serpent Blanc) sont à peine évoqués et vite mis au second plan en n'entretenant alors rien de spécial, les designs humains comme monstrueux ne montrent rien de particulièrement original, les découpages et angles de vue sont toujours clairs sans pour autant montrer la moindre bribe d'ambition, et les quelques brefs instants d'action trouvent le moyens d'être confus alors qu'ils auraient précisément pu être l'occasion pour Harikawa de montrer plus de choses.

Le constat est, à l'arrivée, plutôt sans appel: sans aller jusqu'à dire que ce premier volume est mauvais, on peut affirmer sans problème qu'il a 15-20 ans de retard dans cette catégorie de shônen d'action surnaturel à base d'exorcistes. Tout ce qui nous est proposé ici a déjà été vu une infinité de fois, ce qui n'est pas forcément un souci quand ce qui est raconté est prenant, attachant, divertissant et doté d'un tant soit peu de personnalité. Mais ici, ce n'est pas le cas: tout est plat, parfois forcé dans les clichés (coucou Kujira), sans imagination, sans ambition. Peut-être que les tomes suivants montreront plus de choses, mais du côté de l'auteur de cette chronique l'aventure s'arrête là, tant rien n'a su titiller sa curiosité, et tant il y a bien d'autres mangas plus intéressants à lire.

Saluons malgré tout l'édition française qui est très propre: la sobre jaquette est très proche de l'originale japonaise, le papier est à la fois souple et bien opaque, l'impression est satisfaisante, la traduction de Lilian Lebrun est claire, le lettrage de Ledocteurno est soigné... et le premier tirage a même droit à une jaquette alternative réversible exclusive.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
10 20
Note de la rédaction