Gundam : L'histoire des productions - Partie 1 - La première série et ses films - Actualité manga
Dossier manga - Gundam : L'histoire des productions - Partie 1 - La première série et ses films

La contre-attaque des fans et l'exportation vers les cinémas


Les espoirs que plaçaient Yoshiyuki Tomino sur Gundam semblent voués à l'échec. La diffusion télévisée est un fiasco tandis que les ventes de produits dérivés ne décollent pas. Avec cette troisième série animée plus que timide, Sunrise pourrait connaître un destin douloureux, celui de redevenir le simple prestataire des grosses firmes. Mais si les chiffres qui entourent Gundam sont faibles, des communautés de fans commençent à se créer et à se faire entendre. A travers le Japon, des adolescents se réunissent en fan-clubs, des jeunes gens qui correspondent à la tranche d'âge initialement visée par le réalisateur, soit une belle ironie pour les sponsors qui s'évertuaient à cibler les enfants avant tout.

Ces fans n'hésitent pas à se rendre aux abords du studio Sunrise comme le témoignera Tôru Furuya, comédien vocal qui campe le jeune Amuro, qui accepta autrefois une demande d'interview de ces communautés. Tomino lui-même a conscience que les fans se multiplient. Il a beau ne pas recevoir énormément de lettres de soutien, celles-ci se font de plus en plus nombreuses. A cet instant, l'annulation de la diffusion télévisée à l'épisode 43 n'est pas encore rendue public. Elle le devient par un communiqué publié au sein du magazine Animec, une revue publiée entre 1978 et 1987 qui traitait largement de Gundam lors de ses diffusions, au point de devenir un véritable média fédérant les fans. Les réactions passionnées ne se sont pas faites attendre : Masanobu Komaki, rédacteur en chef d'Animec, reçoit énormément de plaintes de lecteurs, comme si le magazine était décideur d'un tel choix.

En parallèle, la musique de Gundam devient une autre preuve du succès grandissant de l'oeuvre. Si la bande-originale est composée par Takeo Watanabe et Yuji Matsuyama, elle est enregistrée au sein du studio Seion. Producteur de cette musique, Junji Fujita fait le choix de compiler les morceaux non lyriques sur un album, un exercice qui parait presque absurde à l'époque où les compilations des pistes sonores de séries ne sont pas démocratisées. Fujita a pourtant vu juste : Les fans s'arrachent cet album qui s'écoule à plus de 10 000 unités. Un second disque est alors acté, mais Tomino émet une réserve sur la jaquette qu'il juge trop enfantine car mettant en avant le Gundam sous ses allures de super robot. Il avait raison, car la simple utilisation d'un artwork aux airs plus dramatiques de Yoshikazu Yasuhiko permet à ce deuxième volume d'atteindre les 100 000 ventes, au point de tomber en rupture de stocks.

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Les jaquettes des bandes originales de la série Mobile Suit Gundam

La fin de la diffusion télévisée se profile. Pourtant, le marchandising évolue lui aussi. Bandai parvient à négocier les droits de produits dérivés auprès de Clover qui ne croit plus au potentiel commercial de Gundam. La firme créé ses propres modèles réduit à monter, des maquettes qui prennent le nom populaire de « Gunpla » pour Gundam Plastic Model. Vendus à un prix dérisoire, ces maquettes s'écoulent comme des petits pains auprès des jeunes si bien que les deux versions de la machine principale se solderont, au fil du temps, à 29 millions d'exemplaires. Voilà une autre ironie du sort pour Clover qui avait refusé ce même concept proposé initialement par Sunrise, craignant un fiasco et des kits qui ne se vendraient pas. Aujourd'hui, Bandai est leader de son marché, tandis que Clover a mis la clé sous la porte en 1983.

Si Mobile Suit Gundam pouvait être qualifié d'échec, il est à ce moment indéniable qu'un engouement massif et populaire se forme autour de l'histoire d'Amuro Ray. Ainsi, la série remporte l'édition de 1979 de l'Anime Grand Prix, concours de popularité des œuvres d'animation organisé par le magazine Animage. Amuro et Char apparaissent aussi dans le top des personnages préférés des lecteurs, tandis que la chanson Tobe! Gundam de Koh Ikeda, figure à la troisième place des meilleurs génériques.

La diffusion télévisée s'achève le 26 janvier 1980. Alors que tout semble terminé, la société de production cinématographique Shochiku prend conscience de l'ampleur du phénomène, si bien que Sunrise se voit proposer un projet d'adaptation cinéma, à peine un mois après le dernier épisode. Contre toute attente, l'objectif initial de Yoshiyuki Tomino est peut-être sur le point de se concrétiser.
Mais à cet instant précis, le réalisateur doit jouer d'astuce face aux producteurs, car il n'est question que d'un unique long-métrage voué à retranscrire l'ensemble de la série. Faire tenir 43 épisodes en un peu plus de deux heures relève du suicide créatif, aussi il fait le choix de compiler dans le métrage l'arc narratif des 13 premiers épisodes, sans forcément en tenir Shochiku informé. C'est un pari risqué qui est tenu, Tomino espérant un succès qui aboutira à la mise en chantier de suites. Le producteur estime alors que des recettes inférieures à 200-300 millions de yens seraient insuffisantes pour créer d'autres volets, mais le futur allait donner raison au créateur de Gundam...

Officialisé auprès du grand public par le biais d'une conférence de presse le 9 octobre 1980, le film prend pour titre particulièrement sobre Mobile Suit Gundam. Il atteint les cinémas japonais le 14 mars 1981, soit un peu plus d'un an après la diffusion du dernier épisode du format série. Durant le mois qui précède la sortie en salles, plusieurs événements promotionnels ont lieu au Japon, dont un dans le quartier tokyoïte de Shinjuku qui est d'une ampleur démesurée. Plus de 10 000 fans répondent à l'appel, signe fort de l'attente du long-métrage par le public. Lors le film Gundam sort, le succès est évidemment au rendez-vous, si bien que le seuil de rentabilité fixé par Shochiku est largement dépassé. Le métrage atteint ainsi les 1,76 milliards de yens de recettes. Mais le producteur n'attend pas un tel chiffre pour signer deux suites avec le studio Sunrise, concrétisant ainsi le vœu de Tomino de porter son œuvre à travers une trilogie du cinéma d'animation en plus de simplement diriger son œuvre vers les salles obscures.
Le deuxième volet, Mobile Suit Gundam II : Ai Senshi (Soldiers of Sorrow), sort le 11 juillet 1981 et engendre 1,38 milliards de yens. Le troisième et dernier film, Mobile Suit Gundam III : Meguriai Sora (Encounters in Space) paraît le 13 mars 1982 et génère 2,3 milliards de yens, restant aujourd'hui le plus grand succès cinéma de la saga Gundam. Si ces chiffres n'atteignent pas les 4,3 milliards de yens du box-office du film Saraba Uchû Senkan Yamato de 1978, Mobile Suit Gundam n'a certainement plus à rougir de timidité et joue maintenant dans la cour des œuvres très populaires.

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Les affiches des trois films Mobile Suit Gundam

Par ces films, Yoshiyuki Tomino peut retravailler son histoire avec plus de liberté. Il supprime ainsi certains ajouts mercantiles comme le G Fighter, initialement réclamés par Clover, afin de le remplacer par les Core Booster, expansions des Core Fighter déjà présents dans la série et appareils bien plus crédibles dans un contexte militaire. Le réalisateur développe mieux l'intrigue qu'il avait imaginé, et distille plus longuement le concept des New Type. Si l'idée d'êtres évolués et doués de dons psychiques n'apparaît que tardivement dans la série, c'est dès le premier film que le terme est évoqué dans la version cinéma. Les équipes en profitent pour animer de nombreuses séquences supplémentaires, notamment pour le dernier long-métrage afin de rallonger les dernières batailles et amener un final plus intense. Ainsi se terminait le parcours de Mobile Suit Gundam, œuvre avec laquelle Yoshiyuki Tomino espérant renouveler le genre du robot géant, créant le courant affectueusement nommé Real Robot par ses amateurs, et marquant le point de départ d'une saga dont le caractère prolifique restera sans égal au sein de la pop-culture japonaise.

MOBILE SUIT GUNDAM © by SUNRISE / YATATE HAJIME / YOSHIYUKI TOMINO

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