Goyô - Actualité manga
Dossier manga - Goyô

Les mystères du passé et de l’identité


Natsume Ono joue de toute évidence sur le terrain de l’alternatif (tout en restant très accessible), et on ne s’y trompe pas quand on prête attention à la construction de l’histoire et de la façon dont les thèmes sont abordés.

Plus qu’un titre historique, Goyô est une série qui fait la part belle aux mystères et aux intrigues. De plus, elle se distingue nettement de beaucoup de série manga, dans le sens où on a l’impression que l’histoire dans son entièreté a été pensée comme un tout indissociable. Certes, il y a des petits épisodes plus en marge de l’histoire pour apprendre à connaître les personnages. Néanmoins, même dans ces occasions, rien n’est gratuit et tout finit à un moment ou à un autre par servir l’intrigue.
En fait, Goyô se lit avant tout comme un bon roman, où on se laisse happer par l’intrigue, l’ambiance et l’évolution des personnages. Et qui s’apprécie d’autant plus quand on la relit d’un trait.

« La marche du temps est triple : L’avenir arrive à pas lents ; Rapide comme la flèche, le présent s’est envolé ; Le passé demeure éternellement immobile. »

Le passé et la façon dont il nous affecte dans notre vie de tous les jours est un des grands thèmes de Goyô. En effet, chaque membre des Goyô cache des blessures secrètes, des remords ou des choses dont ils n’ont pas lieu d’être fier, et qui reviennent les hanter au fur et à mesure de l’intrigue.
C’est particulièrement le cas pour Yaichi, dont le passé est au cœur du titre puisqu’il a créé le groupe des cinq lobes précisément pour combler une blessure ancienne.
D’ailleurs, plus son passé semble le rattraper, plus il semble sombrer dans la déchéance, incapable d’assumer ce qu’il a fait et refusant de demander de l’aide à sa bande, qui pourtant le considère avec beaucoup de respect, d’amitié et d’affection. Le changement dans son état mental en est presque terrifiant, tant il s’éloigne du jeune homme plein de confiance et de bagou qu’on a rencontré en même temps que Masa.
 
 

 
 
Ce dernier d’ailleurs, lui aussi porteur de beaucoup de regrets dans son passé, entreprend le trajet inverse. Plus il fait face à son passé, à ses problèmes familiaux, plus il prend confiance en lui, plus il parvient à s’imposer comme un leader, comme le chef de famille qu’il était voué à devenir à l’origine. L’un monte, l’autre descend, mais tous les deux continuent de se compléter et de se soutenir. L’inévitable yin et yang, à nouveau. Et il en bien sûr de même pour tous les personnages, et même dans les raisons pour laquelle l’organisation de ces kidnappeurs au grand cœur s’est formé à l’origine.

Goyô s’intéresse aussi beaucoup aux questions d’identités.
La notion d’héritier et ce que cela implique est présent en filigrane tout au long du titre. Se définit-on par rapport à sa famille, ses amis ou entièrement soi-même ? Si on est rejeté par sa propre famille, quelle est notre place dans la société ? La pureté du sang a-t’elle une si grande importance ? Des thèmes lourds, pas toujours évidents, mais universels et très bien traités sous la plume de l’auteure, tout en finesse, fluidité et douceur.
Dans un registre plus introspectif, certains personnages possèdent tellement de noms à cause de leur vie mouvementée qu’on ne sait plus finalement comment les appeler. D’autres cachent délibérément leur identité afin de ne pas gâcher la relation qu’il pourrait avoir avec les autres. Et finalement, certains ont tellement changé, évolué, que le nom qu’on leur apposait au début et celui qu’on leur donne à la fin  n’est plus tout à fait le même, même si leur nature profonde ne change pas fondamentalement. Un thème adéquat et qui sied parfaitement à la mise en scène de l’auteure.

Goyô, c’est aussi l’histoire d’une bande, qui s’agrandit petit à petit, avec des membres qui n’ont finalement pas grand-chose en commun, mais qui s’attachent les uns aux autres et développent des liens au-delà de la simple raison. Ce naturel dans l’évolution des relations et cette façon de nous les présenter rend l’œuvre d’autant plus humaine, réaliste et touchante.

Difficile (impossible) de trop s’aventurer à partir plus en profondeur sur le titre et ses grands thèmes sans faire des révélations qui gâcherait l’effet produit. Néanmoins, une chose est sûre, le style de Natsume Ono tranche à beaucoup de niveaux avec ce qu’on peut voir ailleurs, tout en restant très fluide pour tout type de lecteur. Une vraie bouffée de fraîcheur dans la production manga, et on ne peut qu’espérer voir les autres titres de la mangaka débarqués un jour dans nos contrées.
 
 

© 2006 by Natsume Ono / Shogakukan Inc. All rights reserved

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