A chacun son chemin
Euterpe est une série qui nous parle de musique, certes, mais qui met surtout un avant une petite galerie de personnages. Ces derniers sont tous assez différents des uns des autres et n'ont pas forcément pour dénominateur commun d'être des adolescents ou jeunes adultes. Il n'y a qu'à noter la présence de Nenna, adorable voisine du Maestro qui fera office de figure maternelle tout le long du récit, ou encore l'impitoyable Anna pour remarquer qu'Euterpe repose sur un panel assez varié de figures plus ou moins importantes.
Car des personnages secondaires, il y en a. Ils apparaissent surtout vers la fin du premier tome et donneront peut-être l'impression de n'être là que pour la figuration, tant on imagine mal que les enjeux de la série puissent les concerner à un moment ou à un autre. Thomas et Iris sont d'excellents cas de figures, puisque ce sont sans nuls doutes les personnages les plus effacés de la série. Thomas donne d'abord l'impression d'être là uniquement pour créer un enjeu amoureux autour de Kal, et on pense très rapidement à un triangle amoureux qui pourrait être formé avec Jon. Une bien belle fausse piste sur laquelle nous emmène Art-of-K puisque le rôle du jeune cuisinier sera assez différent, ce celui-ci n'existera par exclusivement dans son amour pour la jeune rousse.
L'exemple de Thomas est finalement très efficace puisqu'il permet de constater les intentions de l'autrice par rapport à ses personnages. Dans Euterpe, chacun est amené à avoir son petit rôle et son incidence sur le scénario. Iris y compris, la jeune fille devenant un soutien qui a son utilité dans le deuxième tome de l'histoire. Un peu à la manière d'un puzzle, la série présente une progression qui mettra chacun à contribution, du côté de l'entourage de Jon comme de celui des « adversaires », entendez pas là ceux qui veulent empêcher Kal de mettre son plan à exécution pour sauver le jeune pianiste sous l'emprise des forces obscures du show-business.
La démarche peut surprendre, car Art-of-K prend quand même le soin d'amener plusieurs sous intrigues dont on attendait une plus ferme résolution. Du côté des mystères, on pense notamment à l'héritage du Maestro qui aura une fonction très différente de celle à laquelle on pouvait s'attendre. Car l'aura du grand pianiste défunt imprègne totalement le récit. Il devient même une figure mystique dont on s'attend à en savoir plus, même si c'est surtout son caractère joueur et sa volonté de mener Jon et Kal de l'avant qu'il faut surtout retenir.
Et évidemment, ce sont les intrigues amoureuses qu'on aurait imaginées plus abouties. Jon et Kal d'une part, malgré la petite différence d'âge entre les deux personnages, mais leur union aura finalement quelque chose de plus mystique que ça. On peut s'imaginer un joli futur sentimental pour eux deux, certes, mais le propos de la série n'est pas là, et Art-of-K nous a encore une fois menés sur une direction à laquelle on ne s'attendait pas forcément. Et même autour des deux protagonistes, quelques intrigues amoureuses se concluent sur des portes ouvertes, notamment Thomas et Vicky. Ça peut être frustrant, mais on retient là aussi une volonté de développer la conclusion de l’œuvre sur un autre terrain. La romance est finalement secondaire dans Euterpe, et ceux qui ne s'intéressaient qu'à ses relations amoureuses se sont sans doute lancés dans la série pour des raisons bancales.
Cela ne calmera peut-être pas la frustration de certains en découvrant le point final de l'histoire, mais permet de comprendre le potentiel état d'esprit de sa créatrice. Euterpe est une série finalement dense pour sa courte durée, qui prend le partie de développer différemment des péripéties, tout en parlant de Musique sous un aspect assez sombre et en mettant à l'honneur les accomplissements des personnages plus que leurs sentiments amoureux, et que les quelques mystères de l'intrigue. C'est un parti pris qui nous fait espérer revoir Art-of-K sur un autre titre, peut-être cette fois un peu plus long.
EUTERPE © 2017 ART OF K / Editions H2T
