Butterfly Beast - Actualité manga
Dossier manga - Butterfly Beast

Kochô l'envoutante, Ochô la ténébreuse


L'exercice d'ouverture du premier tome de Butterfly Beast est représentatif de ce que proposera la lecture. Yuka Nagate présente sur sa jaquette une héroïne au regard profond, une femme sensuelle qui a de quoi hypnotiser le lecteur. Mais celle-ci a une particularité : Elle tient un shuriken en main. A peine l'ouvrage ouvert, cette aura glamour quitte totalement l'objet : La première case présente un homme égorgé par un katana, dominé par une jeune femme qui ne compte pas lui laisser la vie sauve. La double illustration suivante concrétise toutes ces intentions : La jeune femme, vue sur la couverture, est de nouveau représentée sous un jour d'une grande sensualité, et la concernée tient en sa main le fameux katana.

Cette dame, c'est Ochô, ancienne femme shinobi qui, comme les siens, n'a plus vraiment sa place sous le régime qui gouverne le Japon en l'an 1635. Elle a néanmoins choisi son camp dans cette société : Traquer ses anciens confrères qui utiliseraient leurs arts pour commettre moult méfaits. Ces individus, ce sont les réprouvés, et l'ancienne kunoichi doit les chasser, les capturer ou les tuer en tant que « chasseresse ».

Une guerrière qui combat désormais les siens : Voilà comment nous pourrions très simplement résumer l'intrigue de Butterfly Beast, un manga qui réserve néanmoins bien plus de subtilités que cela. La première, et la plus grande, c'est avant tout son personnage principal, Ochô, qu'on ne pourrait résumer comme une simple femme forte, tant celle-ci est riche de nuances. Des nuances qui font totalement écho au contraste d'ouverture de tome dont nous vous parlions un peu plus haut, car le personnage se dote de multiples facettes que le lecteur a le loisir de découvre tout le long de cette première partie de l'œuvre, en deux tomes.


Ochô, c'est cette ancienne shinobi qui, la nuit tombée, remet son attirail pour prendre en chasse ses anciens compères. Kochô, c'est sa couverture dans le quartier des plaisirs de Yoshiwara, l'une des courtisanes les plus admirées et prisées des lieux. La double identité est, de base, particulièrement bien pensée. Car si Kochô incarne le désir insaisissable, une femme sublime qui ne montrerait pas la partie basse de son corps aussi facilement, cette identité n'est qu'un masque pour se fondre dans la masse. Pourtant, cette facette représente déjà une figure de femme solide, au-dessus de tous. Sa vraie personnalité est celle d'Ochô. Le personnage devient alors une combattante réputée et talentueuse, et c'est paradoxalement cette identité de guerrière inégalable qui mènera la jeune femme à affronter ses parts de faiblesse.

Car l'idée d'un personnage féminin sans défaut apparent ne serait guère intéressant. Dans Butterfly Beast, Yuka Nagate croque un type d'héroïne bien précis, celui d'un personnage central à l'apparence inflexible et visuellement superbe, mais qui cache ses parts de faiblesse, par un passé sombre ou des dilemmes à confronter qui ne feront que fissurer davantage la carapace que la mercenaire s'était forgée. Au fil du récit, on distingue bien deux protagonistes. Kochô est une persona, un masque social idéal qu'on ne pourrait effleurer, tandis qu'Ochô est fidèle à l'âme de l'héroïne, une âme de combattante déterminée mais tragique, acceptant sa mission comme une fatalité. Son destin est de juger de sa lame et de ses armes ses anciens camarades, aussi chaque mission viendra la mettre face à toute la complexité d'une telle situation. Car l'une des autres forces du récit, c'est de ne pas bêtement opposer l'héroïne à des ennemis caricaturaux ou stéréotypés. Ceux qui sont face à elle sont des gens qui n'ont su trouver leur place dans le Japon sous le règne des Tokugawa, des guerriers qui se sont vu privés de leurs talents et dont, parfois, le crime s'imposait comme la seule hygiène de vie. Celles et ceux qu'Ochô doit assassiner, ce ne sont pas des crapules nées crapules, mais des individus en perdition capables du pire comme du meilleur, dont l'humanité se cache derrière des comportements inqualifiables. Parfois, la frontière entre ce « bien » et de « mal » s'avère faible, et c'est ce qui constituera le grand drame du second tome qui frappera notre ancienne kunoichi de manière encore plus personnelle. Et cette frontière marque aussi le personnage principal en lui-même : A plusieurs moments, on pourra redouter qu'Ochô bascule, elle aussi. Indirectement, cela constitue un enjeu au sein de Butterfly Beast, tant les drames qu'elle vit dans ses deux tomes sont à même de fissurer sa solide carapace.
  
  

© 2012 NAGATE YUKA by LEED PUBLISHING Co., Ltd.

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