Une fin pessimiste ?
Avis à celles et ceux qui n'auraient pas lu Blue Thermal dans son intégralité : N'hésitez pas à passer à la partie suivante de ce dossier. En effet, ce paragraphe aborde la fin de l’œuvre, et plus largement la seconde moitié du cinquième volume.
Car la fin de la première série de Kana Ozawa mérite qu'on s'y intéresse, puisque sa finalité douce-amère tranche un poil avec les messages d'espoir développés tout le long de l’œuvre. Petit rappel des faits : dans l'arc final du récit, la mère de Jun succombe à la maladie. Pour le garçon, qui a trouvé en Tamaki une lumière qui le pousse à s'élever plus haut dans le ciel, le choc est total. Ce dernier profite de l'espoir que lui a transmis l'héroïne pour s'élever une dernière fois dans le ciel, scruter un panorama qu'il espère pouvoir transmettre à sa mère, avant de "revenir" vers elle. Blue Thermal se termine par un événement tragique, à savoir la mort de Jun, présentée comme volontaire. Le personnage décède car ce pour quoi il s'est battu s'est révélé vain, un message terrible et à l'opposé de ce que véhiculait le récit jusqu'à présent. Pourtant, la scène finale du personnage est belle, ce parce qu'il ne renonce pas à ce monde dans la totale tristesse, mais a pu retrouver son amour des cieux avant de rendre son dernier souffle. Lui aussi a retrouvé l'espoir grâce à Tamaki, un événement positif pour le garçon dont le sort semblait scellé dès les premiers tomes . Car les allusions à une possible mort de Jun sont récurrentes, y compris dans certains chapitres bonus. Dès lors qu'on parle de soucis médicaux concernant le garçon et son entourage, et des évocations à la mort et au "dernier souffle", Kana Ozawa indique subtilement le destin funeste du personnage. Le faire quitter ce monde, dans les larmes certes mais avec le sourire, constituait alors la plus belle issue possible pour Jun.
Le dernier chapitre de Blue Thermal devient un épilogue qui s'axe, en partie, sur ce dramatique événement. Pourtant, là aussi, le manga conserve son ambiance optimiste, et ne tombe absolument pas dans le larmoyant. Au contraire, la mort de Jun reste fortement sous-entendue mais n'est jamais dite, ni montrée. En revanche, on comprend le sort du personnage puisque celui-ci sert de levier à des figures comme Tamaki et Daisuke. Dans la tristesse et le drame, les personnages trouvent un moyen d'aller de l'avant, et l'épilogue nous permet de comprendre que cette poussée les a menés à la concrétisation de leurs rêves. Blue Thermal aurait pu aller plus loin dans la succession d'arcs narratifs, dépeindre d'autres compétitions, appuyer encore plus les enjeux qui ne sont pas vraiment bouclées, mettre en avant des personnages secondaires qui n'ont qu'un rôle de soutient... Pourtant, la fin proposée par Kana Ozawa est bonne. Celle-ci apporte une fin aux arcs des protagonistes de l’œuvre, se termine sur un événement fort, mais conserve son message optimiste sans laisser le lecteur sur sa faim. La fin de Blue Thermal n'est pas pessimiste : Elle est poignante, mais a l'ambition de nous faire positiver plus que nous attrister.
Le rondouillet pur de Kana Ozawa
Derrière le bleu du ciel, il y a un esprit de liberté, une dimension qu'on imagine retrouver dans la patte graphique de Kana Ozawa. Force est de constater que c'est le cas, la mangaka développant un style en adéquation totale avec l'optimisme de son titre, à travers sa manière de dessiner les personnages notamment.
Blue Thermal se déroule en période universitaire, et met en scène des personnages approchant de la vingtaine. Pourtant, les protagonistes dépeints par l'artiste s'apparentent souvent plus à des lycéens, une impression qui découle de la manière qu'a l'autrice de représenter ses figures. Car globalement, Kana Ozawa présente un style très arrondi, ce qui lui permet de véhiculer beaucoup de légèreté et de bonne humeur. Sa patte est idéale pour renforcer les expressions des personnages et créer bon nombre de petites touches d'humour, ce qui rend d'ailleurs la lecture très souvent amusante, notamment grâce aux trognes affichées par Tamaki, la protagoniste. Mais derrière ça, on peut imaginer un véritable choix, ne serait-ce dans la manière de présenter l'héroïne. Car Tamaki n'est pas bien grande, elle-même ayant d'ailleurs du mal à se considérer comme "féminine". Le rondouillet du style de Kana Ozawa met en exergue cette dimension, dans le sens où on a du mal à considérer la demoiselle comme une femme épanouie. Ça a du sens quand on observe le développement du personnage, Tamaki étant une fille manquant de confiance en elle, et qui a largement été sous-estimée par l'ensemble de sa famille. Dans notre esprit, on se demande comment une étudiante qui semble si juvénile peut se confronter à une pratique aussi risquée que l'aéronautique, le récit ayant ensuite la charge de nous contredire dans cette opinion, et le fait de manière réussie.
Néanmoins, cette patte arrondie ne s'applique pas qu'à l'héroïne, puisque la quasi intégralité du casting bénéficie de cette touche. S'il est intéressant de chercher un sens à ce choix artistique, il ne faut pas non plus omettre qu'il s'agit simplement de l'art de la mangaka, et tant mieux si elle l'utilise à bon escient. La légèreté du trait est un attribut du style de Kana Ozawa, aussi il y a de quoi être curieux de le voir décliné sur des titres encore différents. Car on espère bien la mangaka être publiée de nouveau dans nos contrées à l'avenir, ce qui tombe bien vu que celle-ci a achevé une autre série depuis Blue Thermal (Nonomiya Tsukiko wa itsumo Nemui), tandis que sa troisième œuvre (Blue Moment) est en cours de parution.
© Kana Ozawa 2015 / SHINCHOSHA PUBLISHING CO.
De Emea [306 Pts], le 03 Janvier 2022 à 10h19
Super dossier très intéressant. On arrive à porter un regard différent sur ce manga que je vais relire de ce pas !
Mais pour moi, je trouve que l'histoire et la personnalité des personnages sont traitées trop rapidement. J'aurais préféré avoir des développements plus poussés. Et plus de scènes de vol aussi !
De Theodoryna [2278 Pts], le 17 Octobre 2020 à 19h55
Merci beaucoup pour ce dossier ☆◇☆