Samurai Champloo

Samurai-attitude

Au-delà des incohérences volontaires pour créer un effet comique ou pour dédramatiser une situation, Samurai Champloo prend place dans un contexte historique tendu. En effet, nous sommes en pleine période du Bakufu, où les samouraïs et le shôgun ont obtenu le pouvoir absolu après la bataille de Sekigahara. Plus précisément, l’histoire prend place quelques années après la révolution de Shimabara, menée par les paysans et les seigneurs chrétiens. En effet, les prêtres jésuites avaient débarqués un siècle auparavant avec les Portugais et les Espagnols (qui formaient un empire), répandant la parole de Dieu afin de s’assurer le contrôle des Japonais convertis. Mais après la victoire du shôgun, l’influence des prêtres « barbares » (dont un des plus connus est Saint François Xavier, qui fut un des premiers à évangéliser le Japon, en 1549, et dont le « petit-fils » est représenté dans un épisode de l’animé) devint gênante, et risquait de compromettre les plans de domination absolue du shôgunat. Il fut ainsi décidé l’expulsion des étrangers, et donc des prêtres, ce qui marqua la fin de la pratique ouverte de la religion catholique. Sans compter que les seigneurs qui ne s’étaient pas soumis tout de suite après Sekigahara étaient encore considérés avec beaucoup de méfiance, car leur allégeance au régime shôgunale ne pouvait être considérée comme absolue.

Bref, c’est peut-être un des défauts de Samurai Champloo : pour parfaitement comprendre les tenants et aboutissants de certains épisodes, il faut déjà avoir une certaine maîtrise de l’histoire du Japon, de ses conflits politiques, de son système de caste, de l’époque particulière à laquelle l’histoire prend place et de ses figures historiques, c’est-à-dire le début de la fermeture du Japon au monde, qui durera pendant deux siècles. Pas de panique cependant, Samurai Champloo est un anime fun avant tout, et ces éléments historiques n’empêchent en rien de profiter de l’histoire, sans prise de tête. Mais certains passeront sans doute à côté de nombre de références, ne saisiront sans doute exactement pourquoi la situation est tellement difficile ou dangereuse à un tel moment.

Mais de nos jours, on trouve facilement les informations dont on a besoin, et il ne tient qu’à vous de renforcer un peu vos connaissances sur une culture et une histoire fascinante. La curiosité n’est pas un vilain défaut, loin s’en faut. Bref, Aucun problème pour ceux qui ne veulent pas en savoir plus, Samurai Champloo vous apportera beaucoup de plaisir, mais ne venez pas vous plaindre si vous ne saisissez pas une référence, et saisissez plutôt votre encyclopédie ou votre bouquin d’histoire du Japon, virtuel ou non.
  
 
  
 
 

Cowboy Champloo ?

 
Difficile de nier les ressemblances avec l’autre réalisation de Shinichiro Watanabe, Cowboy Bebop. Dans plus d’un épisode, on sent même un schéma semblable, aussi bien dans le déroulement que dans la conclusion. On pensera notamment à l’épisode 7 « Le port de la Drogue à Osaka » dans Champloo, qui fait irrémédiablement penser à l’épisode 8 de Bebop, « Waltz for Venus ». L’ambiance de « Pierrot le fou » sera repris dans une certaine mesure dans un épisode de Champloo avec « Quatrième Dimension », l’épisode de la météorite (avec certes le côté délire en plus). Même l’épisode « Fausse monnaie et petite pépée » ressemble assez au délire de « Cowboy Funk » dans Bebop.

Mais Champloo reste néanmoins une création purement original, à l’ambiance unique et maîtrisée, et aux personnages attachants et différents. La série est aussi plus lumineuse, plus optimiste, avec un dénouement final qui laisse beaucoup plus place à l’espoir que la fin presque dépressive de Cowboy Bebop. Les scènes de combat sont évidemment aussi radicalement différentes, plus rapide et expéditive, et donc prennent moins de place dans l’épisode bien souvent.

D’un point de vue personnel, et malgré toute l’affection que j’ai pour les aventures des cowboys de l’espace, je trouve les samouraïs de Champloo plus travaillés et plus logiques, ou du moins plus compréhensibles et moins imprévisibles dans leurs actions, même Mugen. En effet, des personnages comme Spyke ont un passé parfois un peu trop obscur pour qu’on s’y attache totalement, pareil pour Jet et Ed, aux passés un peu trop flous, même une fois arrivé au bout de la série. Alors que dans Champloo, on comprend mieux ce qui motive les personnages, les raisons qui les ont amenés à être ce qu’ils sont, et leurs blessures intérieures. Mais ce n’est qu’une question de goût, très certainement.

Maintenant, difficile de considérer qu’une des deux séries est supérieure à l’autre. Certains seront plus sensibles à l’ambiance « Space/Jazz » de Bebop, et donc préférons ce dernier. D’autres sont fans de samouraïs, et c’est donc tout naturellement qu’ils se tourneront vers Champloo. Personnellement, dans certains déroulements plus ou moins similaires, je préfère la scène de flashback de Mugen plongeant dans les abysses à celle de Spyke tombant du vitrail de la cathédrale, par exemple. Mais en même temps, je préfère dans une certaine mesure la fin de Bebop, plus imprévisible, plus tragique, et donc d’autant plus mémorable (sans compter « Blue » comme musique de fin pour laisser une empreinte indélébile).

Bref, faut-il faire un choix ? Non, je ne crois pas. Chaque série a d’immenses qualités et ses propres spécificités, et ceux qui adorent le style de Shinichiro Watanabe accrocheront sans aucun doute au deux (à moins d’être un puriste ou un nostalgique irréductible). Pour les autres, c’est selon vos préférences : pistolets et vaisseaux, ou sabres et getas. Le choix vous appartient.