Famille
Au fil de la série pupa, et de façon plus prononcée dans le tome 3, Sayaka Mogi fait ressortir une notion : celle de famille.
En premier lieu, il y a évidemment la relation entre Utsutsu et Yume, dépassant toujours plus voire sublimant le cadre d'un lien frère/soeur .
Mais il y a aussi la découverte un peu plus approfondie du père, Onijima, dont le passé terrible (et en lien étroit avec le reste) l'a conditionné dans le plaisir qu'il ressent en faisant saigner et crier les êtres qui lui sont chers. Lui qui n'a jamais été aimé, ne sait pas comment aimer, mais aime pourtant son enfant.
Il y a, enfin, dans le tome 3, la question du monstre que Maria va mettre au monde. Un monstre qui est l'enfant d'Utsutsu et Yume. Un monstre très loin d'être si monstrueux que ça, et qui l'est sans doute moins que certains humains déviants et sans morale de la série. Tout le passage mettant en avant cette créature est parfaitement mené en soulevant certaines choses. Tandis que l'on découvre l'innocence attachante de ce "monstre", Utsutsu s'interroge : peut-il accepter d'être père, sachant qu'il pourrait reproduire les horreurs de son propre paternel ? Et Yume dans tout cela ? Hé bien, son rôle de "mère" est riche de sens : il confirme qu'elle s'est humanisée, elle le prouve en protégeant son "enfant" au péril de sa vie.
La notion de famille telle qu'on l'entend est constamment remise en cause dans la série. Sayaka Mogi joue avec elle de façon dérangeante et y détricote les fondements et habitudes.
Cruauté, gore, malsain
Avec sa jaquette monstrueuse sur fond noir, ses premières pages aux couleurs riches et nuancées, et son mini flashback de début laissant deviner la violence familiale via des oursons en peluche, on peut dire que Sayaka Mogi parvient d'emblée à poser une ambiance sombre, cruelle et un brin dérangeante.
Cette atmosphère, elle ne fera ensuite qu'aller crescendo dès lors qu'Utsutsu et Yume se retrouvent tous deux touchés par le virus pupa, puis tout au long de la série. Car disons-le tout de suite : le récit ne fait pas semblant en terme de gore et de malsain.
Mogi offre quelques bains de sang très morbides, et, pour accentuer encore l'aspect dérangeant, se fait un plaisir de tirer largement parti du fait qu'Utsutsu, pour protéger sa petite soeur, n'hésite pas à se laisser bouffer par celle-ci avec ce que ça implique de contact charnel étrange se finissant par des giclées de sang très douloureuses. Cet aspect se voit encore accentué par quelques dialogues forcément bizarres, comme quand Yume, dans le premier volume, avoue à son grand frère adoré qu'elle trouve sa chair délicieuse.
L'un des plus beaux exemples du côté dérangeant et déviant du récit est toutefois à cherche du côté de Maria, car ses expériences confinent à la folie et à l'amoralité, sans aucune limite. Ainsi après avoir fécondé l'ovule de Yume avec le sperme d'Utsutsu, et avoir implanté l'embryon dans son utérus, elle s'apprête à mettre au monde un monstre... Vous voila prévenus sur le ton jusqu'où Sayaka Mogi est capable d'aller.
La symbolique de la chrysalide
La série est imprégnée de toute une symbolique autour de la chrysalide.
D'emblée, notons que le titre de la série, "pupa", veut tout bonnement dire "chrysalide" en latin. Et ce n'est donc pas anodin.
Au début de la série, le mal est transmis par des étranges papillons rouges, puis la façon dont nos héros deviennent des monstres s'apparente à une éclosion,l'enveloppe humaine étant une chrysalide laissant éclore le papillon/monstre.
De nombreux petits passages font également appel à cette symbolique. Par exemple, dans le tome 1, à un moment Utsutsu s'enferme dans un cocon de pierre. Ou dans le volume 3, il y a le passage avec Utsutsu et son "enfant", où la maison semble tel un cocon où ils pourraient vivre loin de tout heurt.
Sans oublier l'idée permanente que le héros sorte de son rôle de grand frère modèle pour "accomplir sa mue" et montrer sa véritable nature.
© 2015 Sayaka Mogi (AKITASHOTEN)
