Enigma - Actualité manga
Dossier manga - Enigma

Enigmes, pouvoirs et liens sociaux



Entre mystère et intrigue


Le Shônen Jump est souvent synonyme de mangas d’action démentiels qui ont su faire parler d’eux : Naruto, Dragon Ball, et même des séries un peu moins connues comme Reborn ! ou Neuro ont respecté la recette. D’un autre côté, nous trouvions des séries qui n’avaient pas vocation à couvrir plusieurs vingtaines de volumes tant leur histoire se limitait sur un nombre de chapitres, et tirer en longueur ces intrigues n’aurait pas eu grand sens. Comme exemple pour ce deuxième cas de figure, nous pouvons citer Bakuman, et bien évidemment Death Note qui n’a plus grand-chose à prouver en termes de qualités scénaristique. D’autres genres de titres ont visité les pages du Jump, comme la tranche de vie ou la comédie sentimentale, mais les deux cas expliqués sont les seuls intéressants maintenant, car Enigma puise en eux et se construit autour d’un judicieux compromis : L’œuvre de Kenji Sasaki a donc un scénario limité dans le temps, qui ne peut trop s’étendre, le tout en incluant des pouvoirs mystiques et du surnaturel.
  
  
  
  
  
Dans Enigma, chaque personnage (ou presque) est le possesseur d’un don très particulier. Attention, nous ne parlons pas de capacités offensives telles que la projection de flammes, mais de talents plus étranges, plus passifs, qui n’ont pour vocation que de permettre aux personnes de s’extirper de situations diverses et variées. Les pouvoirs ne sont pas sans rappeler ceux de Jojo’s Bizarre Adventure ou, dans une certaine mesure, de One Piece tant leur caractère étrange domine. Sumio Haiba peut ainsi dessiner des prédictions lors de phases de somnolences, et d’autres ont des capacités aussi hautes en couleur, citons par exemple et sans spoiler l’aptitude de rembobiner le cours du temps d’un objet ou encore celle de rendre invisible toute cible, animée ou non. Sans trop rentrer dans l’histoire, nous pouvons reconnaître à Enigma l’audace d’intégrer des talents si farfelus dans ce type d’œuvre où l’on s’attend à ce que les personnages utilisent uniquement leur matière grise.

Toutefois, ce choix peut paraître assez gratuit. Après tout, pourquoi une poignée d’individus développerait tant de capacités, au détriment de leurs contemporains qui, eux, restent des humains tout à faire normaux. Penser ainsi, c’est croire que l’intrigue d’Enigma n’aurait pas été pensée à l’avance, ce qui est un tort. Oui, les débuts de l’histoire peuvent laisser ce sentiment assez amer en bouche : pourquoi tant de pouvoirs ? Pourquoi seuls les élèves d’un lycée semblent en être détenteurs ? Tant que questions que le lecteur est en droit de se poser, et qui trouvent une réponse à un moment clef de l’intrigue. Oui, la mangaka a pensé nombre d’ingrédients de son œuvre au préalable et tente de les justifier le mieux possible. Au terme du premier arc, si des questions restent en suspens, les grands mystères de la série ont trouvé des réponses convaincantes. Sous-estimer le scénario de l’œuvre, car elle figure parmi ces titres du Jump qui n’ont pas trouvé grâce aux yeux des lecteurs japonais serait un tort, et Enigma nous le prouve. Le récit enchaîne les rebondissements, mais le fait en justifiant chacun de ses choix narratifs. Les sept tomes agissent ainsi comme les pièces d’un puzzle, celui-ci se complétant au fil de notre lecture même si la mangaka, hâtée par le peu de temps restant avant la fin de la publication, a dû user de subterfuges pour donner aux fans les éléments de réponses nécessaires pour la compréhension globale de la série dans le temps imparti. Mais ceci est une autre histoire sur laquelle nous reviendrons.
  
  
  
  
  

A l’honneur, les personnages


Un manga si scénarisé se devait d’avoir des personnages intéressants ou, au moins, de les développer un minimum et de jouer sur les interactions entre eux. L’histoire part ainsi de manière bancale en nous proposant six individus (le héros non compris) dont nous ne savons rien. Il convient que si l’effet de surprise est là, il est difficile de s’attacher immédiatement à des figures qui nous sont totalement inconnues, mais les introduire au compte-gouttes aurait empêché à l’histoire d’être ce qu’elle est. L’astuce pour traiter correctement ce petit monde, c’est d’utiliser la recette classique du « une épreuve = un personnage ». On le comprend assez vite, la collecte des mots de passe de l’E-test passe par différents défis, chacun mettant l’accent sur l’un des possesseurs de pouvoirs. La mission est alors accomplie, car plus que développer leurs capacités, Kenji Sakaki traite le background de chacun en profondeur, expliquant par exemple le vœu de chacun ou encore le motif de sa personnalité. Son plus grand outil pour cela, c’est les flash-back, ceux-ci étant nombreux au cours de l’œuvre. En tombant certes dans quelques clichés comme celui de la lycéenne belle, mais solitaire et brimée par ses camarades, la mangaka parvient à nuancer le tout en rendant intéressant le personnage : on s’intéresse à la figure elle-même plus qu’à son vécu, le caractère de chacun étant justifié et donnant à l’intéressé un attrait beaucoup plus humain. Ainsi, bien que nous n’échappions pas à quelques stéréotypes du genre, chaque personnage important s’octroie un intérêt et on a vite fait de choisir notre chouchou parmi tout ce petit monde.

Le schéma de l’auteure pour traiter ses personnages est donc efficace, mais classique, et le tout ne manque pas de défauts. Le plus flagrant réside dans la formule elle-même : les participants à l’E-test sont mis en avant un par un, chacun son tour, et il était important de les faire accompagner par Sumio Haiba, héros de la série. La conséquence est directe : quand l’un est mis en avant, les autres se contentent de jouer aux figurants. Le scénario tente heureusement de gommer ce défaut en faisant intervenir différents possesseurs de pouvoirs lors de certaines épreuves, mais la formule de l’E-test et la courte durée du titre a empêché un épanouissement véritablement complet des personnages de la série. Dommage, car en creusant un peu plus, nombre d’entre eux auraient pu marquer les lecteurs au-delà de la simple lecture de l’œuvre.
  
  
  

© 2009 by Kenji Sakaki / SHUEISHA Inc.

Commentaires

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Xsico

De Xsico, le 27 Janvier 2015 à 22h46

Manga avec du mystère, une ambiance réussie et de bonnes idées. Il y avait vraiment du potentiel, mais le succès ne fut malheureusement pas au rendez-vous, puis l'arrêt suivit...

Encore un bon dossier, en tout cas.

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