Bambi - Actualité manga
Dossier manga - Bambi

Un incroyable impact graphique



Un trait pas comme les autres


Bambi est le premier manga de Kaneko à connaître une réputation, le premier titre qui le rendra célèbre parmi les amateurs de bandes dessinées alternatives. Alimenté par la musique punk et la culture underground, Kaneko dessine comme un boxeur donne des coups dans l’abdomen. Le dessin de Bambi est une sacrée expérience pour tout lecteur de bandes dessinées : trait épais et net, personnages tous plus grotesques les uns que les autres, découpage barré… Le trait de Kaneko évoque celui des auteurs de comics underground comme Charles Burns ou Daniel Clowes. Kaneko s’en est défendu, déclarant qu’il n’a jamais vraiment lu ces bandes dessinées.

Dans tous les cas, dans le milieu du manga, ce design, cette esthétique est totalement inédite. Le manga dit « alternatif » ne date pourtant pas des années 1990 (où Kaneko s’est fait connaitre avec Bambi). Empruntant autant à la furie filmique de Tarantino qu’à l’étrangeté graphique de Charles Burns, Bambi est une petite synthèse artistique de toutes formes de représentations de la violence. Quand Bambi et ses adversaires tuent et assassinent, ce n’est jamais dans la demi-mesure et Kaneko ne rechigne pas à représenter cette violence à l’état brut.





Netteté du trait, représentation de la crasse


L’une des caractéristiques du trait de Kaneko dans Bambi, c’est donc une étrange netteté, un trait épais et clair. Il est d’autant plus marquant qu’il contraste avec ce que lui-même représente, c’est-à-dire une violence inouïe, grasse et poisseuse, où le corps humain est constamment malmené. Kaneko rend esthétique la mocheté. La mocheté concrète d’abord, où les séquences d’échanges de coups de feu meurtriers relèvent d’un véritable choc graphique pour le lecteur. Mais aussi la mocheté intérieure, psychologique. Tous les personnages de Bambi sont mauvais et viciés, tous sans exception. Les traits tirés de leur visage, leur saleté, relèvent aussi de l’exercice de style pour l’auteur du manga, qui ne se prive pas d’insérer beaucoup de détails dans ces dessins.


Des expérimentations dessinées, la couleur


Par la suite, Kaneko conservera ce trait incroyable (avec plus ou moins de constance dans sa qualité, pour un résultat toujours convaincant toutefois). Mais là où l’impact graphique de Kaneko gagne en puissance dans Bambi, c’est dans le jeu des couleurs. Les différents tomes de Bambi ont une particularité dans le choix des encres utilisées pour l’impression du manga.

Le premier tome est imprimé non pas en noir mais avec une nuance de rose. Le deuxième volume est imprimé pour sa première moitié avec une encre verte, la suite avec une encre rouge, et enfin une encre foncée sur un fond coloré rougeâtre. Le troisième tome commence en vert, puis en rose foncé puis à nouveau en vert. Dans le quatrième tome, l’encre est noire, mais certains éléments du dessin sont remplis avec une peinture argentée. Les autres tomes (les cinquième et sixième, ainsi que Bambi Alternative, le prequel), sont imprimés normalement. Ces effets colorés montrent clairement la posture alternative du manga, arborant ainsi une esthétique bizarroïde, à la marge de ce qui se fait d’ordinaire.





L’empreinte d’un artiste


Au vu de toutes ces qualités, ces expérimentations, le style de Kaneko dans Bambi a rendu célèbre l’auteur pour sa qualité d’artiste. Sans négliger la portée scénaristique de ses œuvres, Kaneko a surtout marqué son lectorat pour son dessin. Et dans Bambi, bien que n’étant pas le manga le plus récent de l’auteur, le trait est déjà d’une incroyable maturité. Il est totalement réfléchi et pensé pour accrocher les lecteurs en quête d’une beauté peu commune, d’une esthétique épaisse et percutante. Dès Bambi, donc, Kaneko a été reconnu en tant qu’artiste de la bande dessinée en France, alors que pendant longtemps, il était le seul manga disponible de la bibliographie de Kaneko sous nos latitudes.
  
  
  


© 2000 ATSUSHI KANEKO / ENTERBRAIN INC.

Commentaires

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Koiwai

De Koiwai [12693 Pts], le 20 Février 2016 à 13h01

Comme Raimaru, j'ai aussi une grosse préférence pour Wet Moon, que j'ai trouvé maitrisé de bout en bout et qui est totalement dans le type d'ambiance que j'adore. Mais Bambi reste le manga qui m'a fait découvrir l'auteur (merci Imho !) et ses autres titres m'ont captivé aussi, j'adore la façon dont l'auteur varie les ambiances et références à chaque oeuvre tout en gardant des gimmicks et une vraie patte Kaneko reconnaissable entre toutes. Toutes ses oeuvres ont énormément de choses en commun et sont en même temps totalement différentes.

Très chouette dossier sinon, mettre Bambi en valeur ne fait jamais de mal, même si Bambi elle-même doit s'en foutre royalement :3

J'ai ouïe dire je ne sais plus où que Sakka/Casterman pourrait envisager de reprendre les droits du manga si le succès est là pour Deathco (j'ai peut-être rêvé).

Minkunette

De Minkunette [6811 Pts], le 20 Février 2016 à 09h43

Pas mon style graphique.

Blood

De Blood [2541 Pts], le 19 Février 2016 à 21h07

@Manga-News : je te rejoins en partie sur Asano, j'ai bien aimé Punpun mais ça ne m'a pas transcendé. Kaneko, j'aime beaucoup ce qu'il fait, même sir je ne comprends généralement rien au scénar (Wet Moon et Soil en tête) ^^ Mais il y a une vraie inventivité, une vraie originalité dans ses mangas. Rien ne ressemble à du Kaneko, à part du Kaneko. Ce dossier me fait d'ailleurs penser que je n'ai toujours pas acheté Bambi, ce qui est impardonnable :-)

Manga-News

De Manga-News [3732 Pts], le 19 Février 2016 à 19h12

je dois être le seul dans l'équipe mais j'accroche pas à kaneko atsushi.  j'ai un souci avec le dessin qui fait trop comics ou pas assez manga...je lui reconnais une certaine patte graphique, très distincte des autres mangaka. j'ai l'impression de lire un comics indé, ca me fait pas ce choc que certains lecteurs peuvent avoir.

Bref je reconnais un grand artiste mais il me laisse de marbre. C'est aussi ca l'art, on acrroche ou pas. Je regarde un tableau mais l'émotion passe pas.

J'ai aussi ce ressenti avec Asano. L'émotion passe pas, je lis sans plaisir, sans être emporté par quelque chose.

Autant je peux pleurer sur un Murakami autant la il se passe rien

 

 

Raimaru

De Raimaru [1219 Pts], le 19 Février 2016 à 18h35

Merci pour votre commentaire, il me fait très plaisir ! J'avoue que l'oeuvre que je préfère de lui est Wet Moon aussi, car en plus d'un autre choc graphique, le scénario est particulièrement fouillé.

Alphonse

De Alphonse [421 Pts], le 19 Février 2016 à 18h03

J’aime ces auteurs atypiques, ces artistes qui sortent du lot, reconnaissables entre milles, qui, lorsque l’on les li,  avons l’impression que c’est tout un monde, un univers, qui débarque et nous emporte ; Kaneko Atsushi est de ceux là.

 

Difficile de conseiller l’œuvre de cet auteur avec laquelle commencer pour y pénétrer comme il se doit. A ce jour celle que je puis préférer est probablement Wet Moon, éditée par, comme vous l’indiquiez, Casterman ; qui a d’ailleurs fait un travail remarquable pour l’édition : ce qui sert un plaisir de lecture optimal à la hauteur de ce chef d’œuvre.

 

J’attend encore un peu avant d’acheter sa dernière production : Deathco ; je fais monter le plaisir comme dirait l’autre.  A tous les amateurs de seinen rutilant, sophistiqué et, tout simplement, gastronomique : se jeter dessus et s’en mettre plein les babines !

 

Merci bien pour cet article Raimaru ; à la fois succinct et exhaustif, cool et sérieux, en sus d’être servi par des estampes aux petits oignons. J’ai notamment pu apprécier votre analyse concernant la particularité du trait de l’auteur ou le prisme de ses influences.

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