Une intrigue survoltée
Film d’action
Passé l’impact graphique du trait d’Atsushi Kaneko, nous avons affaire à un scénario qui multiplie les références au cinéma de genre. Par ailleurs, ces allusions cinéphiliques servent le dessin et le style, qui demeurent la qualité principale du manga.
En premier lieu donc, Bambi est un manga d’action. Bambi est systématiquement remarquée sur son passage pour les affrontements à grands coups d’armes à feu auxquels elle participe. C’est l’occasion pour l’auteur de mettre en valeur son trait et sa capacité de représentation, en faisant appel à son imaginaire. Outre la qualité de la mise en scène, les scènes d’action sont marquées par des bad guys expressifs, totalement barrés et bardés d’armes improbables. Loin des clichés des films d’action décérébrés américains ou d’arts martiaux asiatiques, les séquences d’action de Bambi sont jouissives, dynamiques au plus haut point et complètement alternatives.

Road movie sanglant
L’intrigue de fond de Bambi relève du Road Movie. Bambi a kidnappé le fameux gamin énigmatique décrit ci-dessus à Gabba King et Charly pour le livrer à des personnages mystérieux. Son voyage n’est pas franchement marqué par l’exotisme des paysages ou un certain dépaysement nostalgique, comme le veut le genre (mise-à-part une incursion dans un village type far-west). Elle rencontre en revanche souvent des ennemis qui l’attendent à tel ou tel point. C’est la linéarité du voyage qui marque le plus le côté road movie du scénario. Et tels les plus grands maitres du cinéma, Kaneko maitrise l’art du flashback. Cette qualité est plus notable dans Wet Moon, plus récent, mais elle est déjà présente dans Bambi.
L’une des vertus du flashback est de relancer l’intérêt que l’on porte à un scénario quand le rythme commence à s’essouffler, en montrant des éléments passés qui expliquent la situation actuelle d’une intrigue. S’il est bien ficelé, en duo avec l’intrigue, un flashback peut aussi être un twist, un retournement de situation qui scotche le lecteur. C’est ce qui arrivera à un certain moment dans Bambi, lorsqu’on en saura sur plus sur le petit…
Film de gangsters
L’aspect « combat de flingues » clinquants permet aussi à Kaneko de faire référence aux films de gangsters. Notamment dans le fait que Bambi ait à se frotter à des gangs et des factions terroristes.
Même si les yakuzas n’appartiennent finalement pas au fond de l’histoire, Kaneko présente les luttes entre personnages principaux et antagonistes presque comme des luttes de gangs. Les adversaires de Bambi par exemple, les hommes de main de certains bad guys, ont l’attitude typique, le style des gangsters et yakuzas dans les films de genre. Et donc, même si les antagonistes ne sont pas des yakuzas à proprement parlé, ils se comportent comme tel : en marge de la légalité, appartenant à des organisations secrètes et faisant appel à une économie de la mise de la mise à mort (en l’occurrence, la mise à prix de la tête de Bambi).

Thriller politique et éléments de SF
Enfin, Kaneko octroie quelques influences un peu plus « fantaisistes » à son intrigue, notamment à travers le personnage de Charly. Etant un terroriste à la doctrine politique radicale, le personnage permet à l’auteur d’évoquer le terrorisme et la lutte idéologique. Bien entendu, le tout est toujours traité avec beaucoup de second degré, et il ne faut pas voir en Bambi un manga très politisé.
Cette facette entre en corollaire avec un autre élément scénaristique du manga, que nous ne dévoilerons pas dans ce dossier, car il s’agit d’un spoil majeur. En tout cas, cet élément du manga le fait complètement sortir d’un certain réalisme pour se rapprocher de la science fiction « technologique » (c’est-à-dire qui a attrait à l’évolution de la science). Ces deux genres se rencontrent ainsi pour donner du corps à l’intrigue et en faisant converger toutes les pistes vers le même but.
© 2000 ATSUSHI KANEKO / ENTERBRAIN INC.
De Koiwai [13046 Pts], le 20 Février 2016 à 13h01
Comme Raimaru, j'ai aussi une grosse préférence pour Wet Moon, que j'ai trouvé maitrisé de bout en bout et qui est totalement dans le type d'ambiance que j'adore. Mais Bambi reste le manga qui m'a fait découvrir l'auteur (merci Imho !) et ses autres titres m'ont captivé aussi, j'adore la façon dont l'auteur varie les ambiances et références à chaque oeuvre tout en gardant des gimmicks et une vraie patte Kaneko reconnaissable entre toutes. Toutes ses oeuvres ont énormément de choses en commun et sont en même temps totalement différentes.
Très chouette dossier sinon, mettre Bambi en valeur ne fait jamais de mal, même si Bambi elle-même doit s'en foutre royalement :3
J'ai ouïe dire je ne sais plus où que Sakka/Casterman pourrait envisager de reprendre les droits du manga si le succès est là pour Deathco (j'ai peut-être rêvé).
De Minkunette [6811 Pts], le 20 Février 2016 à 09h43
Pas mon style graphique.
De Blood [2541 Pts], le 19 Février 2016 à 21h07
@Manga-News : je te rejoins en partie sur Asano, j'ai bien aimé Punpun mais ça ne m'a pas transcendé. Kaneko, j'aime beaucoup ce qu'il fait, même sir je ne comprends généralement rien au scénar (Wet Moon et Soil en tête) ^^ Mais il y a une vraie inventivité, une vraie originalité dans ses mangas. Rien ne ressemble à du Kaneko, à part du Kaneko. Ce dossier me fait d'ailleurs penser que je n'ai toujours pas acheté Bambi, ce qui est impardonnable :-)
De Manga-News [3746 Pts], le 19 Février 2016 à 19h12
je dois être le seul dans l'équipe mais j'accroche pas à kaneko atsushi. j'ai un souci avec le dessin qui fait trop comics ou pas assez manga...je lui reconnais une certaine patte graphique, très distincte des autres mangaka. j'ai l'impression de lire un comics indé, ca me fait pas ce choc que certains lecteurs peuvent avoir.
Bref je reconnais un grand artiste mais il me laisse de marbre. C'est aussi ca l'art, on acrroche ou pas. Je regarde un tableau mais l'émotion passe pas.
J'ai aussi ce ressenti avec Asano. L'émotion passe pas, je lis sans plaisir, sans être emporté par quelque chose.
Autant je peux pleurer sur un Murakami autant la il se passe rien
De Raimaru [1219 Pts], le 19 Février 2016 à 18h35
Merci pour votre commentaire, il me fait très plaisir ! J'avoue que l'oeuvre que je préfère de lui est Wet Moon aussi, car en plus d'un autre choc graphique, le scénario est particulièrement fouillé.
De Alphonse [421 Pts], le 19 Février 2016 à 18h03
J’aime ces auteurs atypiques, ces artistes qui sortent du lot, reconnaissables entre milles, qui, lorsque l’on les li, avons l’impression que c’est tout un monde, un univers, qui débarque et nous emporte ; Kaneko Atsushi est de ceux là.
Difficile de conseiller l’œuvre de cet auteur avec laquelle commencer pour y pénétrer comme il se doit. A ce jour celle que je puis préférer est probablement Wet Moon, éditée par, comme vous l’indiquiez, Casterman ; qui a d’ailleurs fait un travail remarquable pour l’édition : ce qui sert un plaisir de lecture optimal à la hauteur de ce chef d’œuvre.
J’attend encore un peu avant d’acheter sa dernière production : Deathco ; je fais monter le plaisir comme dirait l’autre. A tous les amateurs de seinen rutilant, sophistiqué et, tout simplement, gastronomique : se jeter dessus et s’en mettre plein les babines !
Merci bien pour cet article Raimaru ; à la fois succinct et exhaustif, cool et sérieux, en sus d’être servi par des estampes aux petits oignons. J’ai notamment pu apprécier votre analyse concernant la particularité du trait de l’auteur ou le prisme de ses influences.