Suicide Island - Actualité manga
Dossier manga - Suicide Island
Lecteurs
17.50/20

Retour aux sources

   

Le sens de la vie

   
Suicide Island réussit donc le pari de proposer une étude sociale, dans un contexte pourtant éloigné de la société : une île complètement coupée du reste du monde. Dans le cadre de notre dossier sur La Mosca, série d'action caféinée se déroulant en contexte insulaire, nous étions revenus sur les nombreuses situations qu'ont inspirées les îles dans le domaine de la fiction, sources d'aventures, de trésors et de mystères. Si Suicide Island ne revêt aucun caractère fantastique, l'île porte les traces d'une occupation humaine pas si lointaine. Les nombreux bâtiments encore en place (port, commerces, école, hôpital...) prouvent que les lieux ont dû être abandonnés du jour au lendemain. Ils permettent d'ailleurs à nos robinsons en herbe de ne pas être complètement pris au dépourvu, puisqu'ils trouveront notamment du matériel de plongée ou des vestiges d'exploitations agricoles. A moins que le tout n'ait été laissé sciemment pour leur laisser une chance de salut ? 
   
Pour reprendre goût à la vie, nos héros doivent d'abord appréhender la survie. En l'absence des avantages du confort moderne, ils doivent se débrouiller par eux-mêmes, ayant ainsi moins de temps pour se lamenter sur leur sort, et retourner à des valeurs simples, tels les premiers hommes : la cueillette, la pêche, la chasse, puis l'agriculture et l'élevage. La série fourmille ainsi d'informations (dont les références sont données en fin de volume) sur ces pratiques intemporelles, de la confection d'un arc à la pêche à la palangre, en passant par le fumage de la viande et la fabrication de fromage. Dans ces passages, il n'est pas rare de voir Kôji Mori s'exprimer directement aux lecteurs, en évoquant diverses anecdotes. Pour le reste, ce sont les personnages eux-mêmes qui prennent la parole, et on peut rester parfois perplexes quant à leurs connaissances sur des sujets aussi inhabituels pour des jeunes citadins, même si l'auteur propose toujours une justification, plus ou moins convaincante. 
   
    
    
    
Outre le fait de maintenir les personnages en vie, ces procédés permettent également de reconsidérer la position de l'Homme dans la Nature. Le passage le plus éloquent à ce sujet reste la première chasse au cerf de Sei : lui, qui n'aspire qu'à mourir, quel droit a-t-il de tuer un animal si débordant de vie ? Après avoir décoché sa flèche et retrouvé sa proie, Sei prend conscience de sa position au sommet de la chaîne alimentaire, et du grand cycle de la Vie en général. Si ces animaux sont là, sur cette île, c'est pour pouvoir prolonger son existence à lui et, par respect pour eux, il ne peut plus se permettre de la gâcher. Plus tard, alors qu'ils découvrent des chèvres en train de paître en liberté, Sei et ses amis comprennent qu'ils ont aussi un rôle à jouer dans l'équilibre de leur écosystème : ainsi, en sauvant la Nature, l'Homme se sauve lui-même. Grâce à cette raison d'être, grâce à cette motivation, nos héros peuvent enfin avancer...
   
   

Naissance d'une société

   
Laissés pour compte par une société dont ils ne peuvent plus jouir ni des droits, ni des devoirs, nos survivants verront également dans l'île un pur espace de liberté, où ils peuvent faire ce que bon leur semble. Nous apprendrons très vite qu'avant d'être « L'île du suicide », l'endroit était auparavant appelé « L'île sans lois », une zone de confinement pour meurtriers et autres criminels, préalablement condamnés à mort. Selon le dernier témoin de cette époque, l'île s'est transformée en enfer terrestre, signant l'échec du programme. L'expérience sera-t-elle différente avec nos suicidaires récidivistes, où sont-ils sur le point de suivre le même chemin ?
    
Comme nous l'avons vu précédemment, le reset social permet à nos personnages de repartir sur des bases neuves, certes marquées par leurs blessures passées, mais dans une relation d'égal à égal où tout le monde partage les mêmes douleurs. Mais, en pratique, le groupe a tout de même besoin d'hommes forts et charismatiques pour se protéger, se rassurer et être guidé. Il est ainsi intéressant de suivre la naissance de cette micro-société, qui savoure son absence de règles au départ, mais qui finit par en instaurer. Les fainéants et les profiteurs sont pointés du doigt, et ne pourront jouir des privilèges du groupe que s'ils se mettent à participer au mouvement. Une hiérarchie s'installe, envers et contre tout, s'installant de gré... ou de force. 
     
     
   
    
Si nos héros ont réussi à créer un groupe où règnent la confiance et le respect mutuel, il n'est pas de même pour le groupe du port, mené par Sawada sous un règne de terreur. Ayant rapidement pris conscience de sa position dominante sur ses faibles compagnons, cet inquiétant leader a mis en place une société où la loi du plus fort prévaut. Il flatte les plus bas-instincts des siens, promettant un paradis de luxure aux travailleurs, les jeunes femmes de son groupe étant alors réduites à l'état d'objets sexuels. Ses envoyés viennent régulièrement exiger un tribut à nos protagonistes, poussés par la convoitise, mais aussi par la peur de leur chef qui  les réprimandera sévèrement en cas d'échec. Les valeurs tyranniques du « roi » Sawada sont ainsi en totale contradiction avec celles de nos héros, amenant à un inéluctable conflit... 
   
Même avec une chance de nouveau départ, l'Homme est donc toujours prompt à reproduire les mêmes erreurs, à asseoir sa domination et à profiter sans vergogne des ressources offertes par la Nature. Dans un microcosme pourtant dépourvu de lois, les héros de Suicide Island recréent la société dont ils ont pourtant été exclus. Deux visions s'opposent clairement, et il reste à savoir quelle solution de salut sera possible, pour que nos héros ne finissent pas comme ceux qui les ont précédés …
  
   

JISATSUOU © 2009 by Kouji MORI / Hakusensha, Inc.

Commentaires

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Dharma

De Dharma [1870 Pts], le 06 Décembre 2014 à 03h54

17/20

Un très bon dossier pour une super série !

Une de mes séries préférées actuellement. L'envie de disparaitre est un bon prétexte pour mettre en valeur la vie, ses bons côtés et son importance. Tout n'est pas noir dans cette histoire, au contraire. C'est ce qui en fait une petite pépité d'humanité à mon sens.

Je la recommande à tous les suicidaires potentiels ! =p

winipouh

De winipouh [2147 Pts], le 22 Juin 2014 à 17h35

merci pour ce dossier l'histoire est interessante mais je n'aime pas beaucoup les graphismes en particulier le visage des personnages je pensse m'acheter le tome 1 pour me faire un avie sur se manga

JohnDoe

De JohnDoe [598 Pts], le 22 Juin 2014 à 16h35

18/20

Un chouette dossier, merci !

DjinnGenie

De DjinnGenie [220 Pts], le 21 Juin 2014 à 14h01

Merci pour cet excellent dossier ! Cela donne vraiment envie de découvrir la série.

Jinfuushen

De Jinfuushen, le 20 Juin 2014 à 23h33

18/20

Très bon dossier :-)

Je dirais même que cette série outrepasse sur quelques séquences la question du suicide en proposant une éloge à la vie, une éloge à la nature.

Suicide Island est vraiment très bien ficelé niveau scénario, et le psyché des personnages vraiment est très intéressant.

Avec Vinland Saga et The Arms Peddler, ceux sont 3 belles séries qui nous sont arrivés ces dernières années.

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