Fanzinat et Jeunes créateurs
Pourtant situées dans deux halls différents (les jeunes créateurs étaient dans le hall 5, l'espace fanzine dans le hall 6) les zones fanzine et jeunes créateurs brillaient par leurs ressemblances. En effet dans chacune de ces zones on retrouvait des petits stands tenus par des passionnés, désireux de montrer et faire connaître leur talent, qu'il soit artistique, littéraire ou les deux à la fois.
Cette année, nous avons choisi de mettre en avant un stand pour chaque zone, sous la forme d'une interview courte qui aura le mérite de vous faire découvrir le travail de personnes passionnées par ce qu'elles font !
L'espace Fanzine
Comme chaque année, ce lieu est un incontournable de Japan Expo. Des dizaines de stands occupaient cet espace plutôt grand dont l'exploration pouvait facilement prendre une demi-journée si l'on prenait le temps de s'attarder sur chaque stand. Et ce qui était vraiment bien dans cet espace, c'est que l'on pouvait prendre le temps de parler avec les exposants, qui n'étaient jamais avares en temps ou en parole pour présenter leur projet. Certains dessinateurs pouvaient réaliser des dessins gratuitement, ou être commissionnés. Certains stands étaient particulièrement animés, comme celui de l'artiste Clover-Doe ou de l'association Meluzine (photos ci-dessous).




Après ces quelques photos de l'espace fanzine, nous vous proposons une interview de Loli et Sophie, membres du collectif La Nostra Vita, et qui étaient présentes sur le salon avec un stand qui faisait notamment la promotion de leur projet Dernier Jeu. L'interview sera agrémenté des photos de leur stand, ainsi que de leurs ouvrages.

Bonjour Sophie et Loli, pouvez-vous nous présenter votre projet ?
Bonjour. Notre projet vient d'abord de la création de notre collectif La nostra vita. Ce qui nous a réunies ? Le forum RP ! Nous nous sommes rencontrées dessus. Nous avons longuement discuté, nous nous sommes rencontrées IRL et sommes devenues amies. Un été, à la Japan Expo, nous avons verbalisé notre rêve à nous deux auteurs : passer de l’autre côté des stands de fanzinat et d’écriture amateur. Se lancer. Faire vivre nos personnages et les partager avec d’autres, même quelques personnes, même en déficit. Vendre nous même notre bouquin, essayer de convaincre… Et notre illustratrice actuelle nous a suivies, dans cette entreprise complètement folle et très onéreuse. Depuis, c’est un réel plaisir !
Nous nous sommes donc lancées dans le roman illustré boy's love. Nous présentons à ce jour une série de 6 volumes: Dernier Jeu. La série a été écrite avec comme leitmotiv de se débarrasser de certains clichés du yaoi. Cela fait plus de dix ans que je lis du yaoi, et j’y retrouve un schéma très semblable. Je vais volontairement le grossir un peu, mais si l’on y réfléchit c’est bien cela que l’on retrouve plus ou moins fortement :
- Les deux personnages se retrouvent des années plus tard alors qu’ils se sont rencontrés quand ils étaient enfants.
- Ils se rencontrent, l’un abuse de l’autre (aphrodisiaque, oubli du consentement, viol avéré) mais le petit uke fragile, souvent maigre et efféminé, finit par aimer ça et avoue son amour lors de la scène de sexe. Le gros seme badass a un grand cœur et avoue également ses sentiments.
- Tout l’entourage est gay et il n’y a aucune femme.
- Généralement, l’histoire se termine une fois qu’ils sont ensemble au lieu d’exploiter le reste de la relation.
Je n’oserai pas dire que nous nous détachons de tous ces clichés. Pourtant, nous avons essayé de faire des personnages réalistes. Nous utilisons la femme comme personnage à part entière et non pas comme potiche ou comme personnage utile parce qu’elle est une femme. Nous avons des couples hétérosexuels. Nous avons certes un cliché facile (le meilleur ami), pourtant c’est une réalité également et nous essayons de nous en servir pour développer la relation du meilleur ami et les problèmes que cela pose. Nous essayons aussi de parler de différents stades des relations, comme les naissances parfois difficiles mais également la fidélité après l’officialisation, le regard des autres... De plus, nous ne les emmenons pas vraiment là où nous avons besoin (les faire finir ensemble et peu importe ce qu’il se passe au milieu) mais laissons nos personnages évoluer seuls. On a parfois même cru que les relations se briseraient, purement et simplement. Enfin, on essaye de créer un background qui s’étoffe au fur et à mesure des tomes (discret dans les deux premiers puis de plus en plus présent) afin de porter l’histoire et finalement en devenir l’intérêt principal. Dans beaucoup de yaoi, l’histoire et l’univers ne sont pas des plus importants…



Quelle est l'importance d'un festival comme Japan Expo pour votre fanzine ?
En tout premier lieu, de la visibilité ! C'est un point incontournable. Tous les festivals sont importants, mais la Japan Expo est incontournable lorsque l'on démarre en tant qu'amateur. Les fanzineux / amateurs connus peuvent se permettre de ne faire que de plus petites conventions, des rencontres plus humaines puisqu'ils ont un lectorat fortement ancré à leur suite. Pour démarrer, il est important de pouvoir être là pour ceux qui ont commencé à nous faire confiance. Il faut qu'ils puissent nous retrouver facilement, venir à notre rencontre. C'est donc important pour ceux qui nous connaissent et ne viennent qu'à la Japan Expo, mais aussi pour les nouveaux visiteurs ! Les lecteurs de boy's love ne peuvent pas forcément se permettre de venir à plusieurs conventions dans l'année et s'il faut n'en choisir qu'un, sans doute que beaucoup préféreront la Japan Expo où se regroupent un maximum de stands et de choses à faire.
De plus, le fait d'avoir quatre jours de convention est intéressant. En effet, il y a toujours beaucoup de choses à faire à la JE ou dans d'autres festivals. En quatre jours, un visiteur aura le temps de faire les stands pro, les activités, les stands culturels... et aura peut être plus de temps le dimanche pour venir du côté amateur !


Quel bilan tirez-vous de ces quatre journées à Japan Expo ? Positif, plutôt positif, négatif ?
Positif ! Nous avons pu rencontrer et convertir de nouveaux lecteurs. Des gens nous ont fait confiance, et c'est vraiment un sentiment génial. Nous avons vraiment à coeur de papoter autour du boy's love et quand j'explique à quelqu'un nos motivations de nous détacher des gros clichés et que je vois cette personne être d'accord avec moi, c'est magique. En plus de ça, d'anciens lecteurs sont venus nous voir en nous disant nous avoir cherché et nous avoir marqué dans leur liste de stands à faire absolument ! Quand on a autant travaillé pour écrire, illustrer, maquetter, faire imprimer, mettre en avant une œuvre c'est une gratification énorme.
Nous sommes un petit collectif et pourtant ce salon nous a permis de rentrer dans nos frais d'impression et de pouvoir ainsi repartir sur les prochaines éditions sans trop avancer de notre poche.

Si vous deviez présenter votre série en quelques phrases ?
Des personnages plein de failles, de défauts et de faiblesses qui malgré leurs responsabilités et leurs forces se débattent dans un univers légèrement fantastique pour trouver une issue. Un contexte sans bien ni mal, avec différents idéaux qui s’affrontent silencieusement puis de plus en plus fortement afin de prendre le dessus. Des passages difficiles, une action réelle, des problématiques matures et variées qui soutiennent une vision moins clichée de l’homo romance.

Les jeunes créateurs
La zone occupée par les jeunes créateurs était beaucoup plus restreinte que celle du fanzinat. On y retrouvait divers stands proposant des posters, pin's, goodies, livres, des sculptures et parfois même des œuvres originales à des prix assez onéreux. Comme pour l'espace fanzine, ce lieu se caractérisait par sa convivialité, même si le merchandising avait une place plus importante.
Parmi les divers stands présents, on aura remarqué la stand Gensodô qui vendait divers produits mettant en valeur le travail de l'illustratrice japonaise Shiitake, qui a illustré plusieurs albums pour les éditions nobi nobi. L'artiste n'était cependant pas présente sur le salon. A noter également la présence d'un stand pour le collectif Niddheg, dans lequel on pouvait trouver des livres auto-édités et des goodies.




A l'instar du fanzinat, nous allons conclure cette partie du dossier avec l'interview d'un stand situé dans cet espace. Nous avons choisi le stand du Collectif étoile, qui faisait découvrir aux visiteurs le pixel art. C'est, Thierry alias Cimenord (vous pouvez découvrir ses créations sur DeviantArt), membre du collectif, qui a répondu à nos questions.

Pourriez-vous nous dire en quoi consiste le collectif Étoile ? A-t-il été créé de longue date ou peu avant Japan Expo ? Quelle est votre place au sein de ce collectif ?
Le collectif étoile dans sa forme actuelle a pour but de rassembler plusieurs artistes (dessin, bijoux, pixel art, sculpture). Les conventions comme Japan Expo ont souvent un coût conséquent pour une personne seule surtout si elle commence, et donc dans cette optique nous avons choisi de former ce collectif pour partager les différents frais inhérents à notre présence en salon.
La création du groupe est toute récente et remonte à février 2016. Pour ma part je n'ai aucun rôle particulier mais faisant des conventions de ce type depuis fin 2014 je suis là pour apporter mon "expérience" car je suis un mordu de pixel art !

Vous faites découvrir et vendez sur votre stand du pixel art. Pouvez-vous nous faire un petit historique de cette forme d'art ? Quand a-t-elle réellement émergé en France ?
Le pixel art tel qu'il est dérivé en faisant des créations en 2D ou 3D avec des perles à repasser est souvent surnommé Perler Beads. Les américains ont une communauté très grandissante et réceptive.
Beaucoup de personnes voient le pixel art comme un hobby d'un après-midi alors que vous avez des milliers de personnes de par le monde qui s'amusent à refaire des portraits, des maquettes et autre "sprite" en perles à repasser.
La marque la plus présente en Europe; Hama; a été fondée en 1961 mais les perles ne sont apparues que plus de dix ans plus tard. Il existe plusieurs autres marques: Perler, Artkal, Nabbi, Fuse Beads, Photo Pearls. Ce qui change principalement entre ses noms est la gamme de couleur proposée.
Il est assez complexe de dire quand exactement cette mode a commencé, certains adultes des années 1990 s'en souviennent donc je pense que cette forme d'art est présente depuis déjà pas mal de temps !
Pouvez-vous expliquer de façon brève les différentes étapes dans la réalisation d'un pixel art ?
Le pixel art débute toujours avec une base nue avec juste des plaques. Avec le modèle sous les yeux et les perles on vient remplir les plaques avec les couleurs au bon endroit. Les calculs et le positionnement dans l'espace sont très importants pour reproduire avec justesse le modèle souhaité. Une fois les perles mises au bon endroit, comme de la broderie il suffit de mettre du papier cuisson pour ne pas faire attacher le fer à repasser qui lui va vous servir à fondre les perles qui sont en plastique. De nombreux tutoriels sur ce sujet sont présent sur Youtube.

Comment s'est déroulé pour vous cette Japan Expo ? Êtes-vous satisfait de votre venue sur le salon ?
C'est ma première convention sur Paris et je dois dire que je ne suis pas déçu, j'ai vendu la plupart de mes créations, j'ai rencontré quelques fans qui connaissaient mes travaux et cela m'a conforté dans ma pratique du pixel art.
Pourquoi le pixel art n'est pas si représenté dans les salons ?
Je pense que c'est avant tout dû au fait que chaque création dois être fait main. Connaître les tendances aide énormément. Personnellement je suis arrivé avec plus de 140 créations et j'ai passé autour de 120 heures pour tout réaliser. Au delà de ça les gens ont parfois un œil plus critique car tout le monde peut en faire à un certain niveau mais je pense qu'il est plus dur de vouloir faire très grand dès le départ. Le matériel lui même est abordable et présent dans des magasins spécifiques mais il a besoin d'être renouvelé pour chaque création. Pour une convention comme Japan Expo il faut préparer diverses créations des semaines à l'avance pour avoir un stock solide, ce qui peut décourager certains.

Les Youtubers et vidéastes sur le devant de la scène
Ce n’est plus vraiment une surprise, chaque édition de Japan Expo (communément à la majeure partie des autres conventions de l’hexagone) compte parmi ses invités bon nombre d’acteurs de la plateforme YouTube, d’horizons divers et variés mais gardant, pour la plupart du moins, un infime rapport avec la culture japonaise. Des têtes d’affiche qu’on ne présente plus furent de la partie, mais aussi des figures novatrices qui ont peut-être permis aux visiteurs d’élargir leurs perspectives de visionnages internet. On peut évidemment se questionner sur cette mise en avant de passionnés "amateurs" au fil des années tout en sachant que cette fois-ci, Japan Expo a entretenu le mieux possible la thématique du Japon, sans trop digresser vers des créateurs qui ne seraient finalement que des représentants de l’univers geek en général. Dans cette catégorie, on retrouvait curieusement InThePanda ou le collectif Golden Moustache. Si la qualité de leur contenu n’est plus à démontrer, il est curieux de les compter parmi les invités d’un festival dédié à la culture japonaise, ou au moins asiatique.
Ci-dessous, Davy Mourier, membre du collectif Golden Moustache, en dédicace sur le stand Delcourt / Tonkam / Soleil.

Avant tout, difficile de passer à côté des mastodontes du web que sont Le Joueur du Grenier ou le groupe Noob qui brille d’une riche actualité grâce à la saga cinématographique en cours qui fait directement suite à leur websérie. Ces derniers étaient aussi présents sur le stand Olydri pour signer les ouvrages ou goodies liés à la saga, mais ont aussi participé à diverses animations, parfois en partenariat avec d'autres collectifs. Pour le Joueur du Grenier, sa présence est devenue un rituel, et son interminable file d’attente aussi. Notamment présent pour leurs dédicaces sur le stand d’Omake Books qui éditent leur DVD, Frédéric Molas et Sébastien Rassiat étaient toujours aussi difficilement approchable, la file d’attente représentant un sacré bémol puisqu’elle empêchait la visibilité de stands comme celui de Kotoji, comme nous avons pu le voir dans la partie précédente.


Mais quid des vidéastes liés entièrement à la culture japonaise, ou au moins au domaine manga/anime ? Cette année, l’un des brillants représentants de la scène YouTube fut Ichiban Japan, largement présent sur son propre stand afin de présenter son émission du même nom faisant découvrir les paysages nippons sur fond humoristique en direct du Pays du Soleil Levant. Gageons que nous aurons largement l’occasion de revenir sur l’émission par le biais d’une interview à venir sur le site…
Fait amusant, le stand d’Ichiban Japan fut le point de ralliement des podcasteurs YouTube associés à la culture manga. Certains comme Le Chef Otaku, LucassTV ou Gaki Parody étaient présents en tant qu’invités, d’autres comme OnePiece-Passion, Gonzaroo et Tonton Benzz ont simplement été accrédités et ont répondus présents à l’appel des fans pour parler des derniers sujets d’actualité, dont Dragon Ball Super qui relie bien souvent ces vidéastes. Notons aussi qu’Ichiban Japan fut présent dans le cadre des tremplins web, groupement de vidéastes liés surtout à la culture geek comme en atteste la présence des web-séries Zikos et UTK.
Ci-dessous à gauche: Le chef Otaku.

Et il y aurait quelques autres noms à citer comme Brice Duan ou François Descraques, lui aussi présent dans l’optique de présenter un global manga mais cette fois lié à l’univers du Visiteur du Futur. En somme, la scène YouTube continue de se constituer de nombreux invités bien que cette année Japan Expo a pu compter sur plusieurs nouvelles têtes d’affiche. Pour ces derniers, les activités étaient souvent aussi garnies que pour les invités professionnels : entre dédicaces et conférences, difficile pour eux de s’ennuyer tout au long du festival.
On peut alors dire que le choix de Japan Expo de faire venir des intervenant amateurs du web est une bonne chose quand il s’agit de personnalités en phase avec la culture populaire ou traditionnelle nippone, mais on se questionne toujours autant sur la volonté de promouvoir à tout va des Youtuber afin de surfer uniquement sur le mouvement, d’autant plus que le malaise lié au vide de fréquentation de certains stands était palpable...


La Mode
Cette année, faute de temps nous n'avons malheureusement pu couvrir qu'un seul évènement en rapport avec la mode : le défilé Todomachi qui se déroulait du dimanche. Cet évènement qui se déroulait sur la scène Ichigo avait pour but de faire découvrir les collections de cinq stylistes japonais : Takeshi Minakawa, Ohal Aando, le collectif Eily K Jammy, Hiromi Hayashi et Yukihiro Teshima.
L'évènement a été inauguré par un mini live du groupe Orange Port, qui a offert une excellente prestation.

Par la suite a commencé le défilé, les mannequins se succédant dans différentes tenues que nous vous laisserons le soin de juger via ces quelques photos. A certains moments, des musiciens venaient sur scène pour dynamiser un peu l'évènement.



Mais pas besoin d'aller à un défilé pour découvrir les tendances vestimentaires japonaises : plusieurs stands étaient là pour vendre toutes sortes de vêtements, tantôt fashion, tantôt traditionnels. Il y avait aussi plusieurs stands qui vendaient des accessoires de style japonais, parfois d'origine artisanale.



Niveau vestimentaire, si l'on devait citer un stand emblématique de cette édition 2016, ça serait sans doute celui d'Aoi Clothing, proposant un large choix d'habits modernes et plus traditionnels, de la paire de chaussettes à la chemise en passant par le kimono. Le stand était si grand qu'il avait même plusieurs cabines d'essayage !



© Manga-News 2016
De ivan isaak, le 09 Août 2016 à 17h17
Bon, comme prévu, c'est très complet, bravo !
Pour ce qui est de l'affluence, les attentats et l'atmosphère sécuritaire pouvaient y être aussi un peu pour quelque chose non ?