BB Project

Un shonen "à la française" très prometteur!

Avant toute chose, il est important de se détacher des aprioris encore tenaces pour apprécier pleinement BB project.
Oui, BB project est un global manga. Non, être un global manga n'est pas un gage de médiocrité. J'avais moi-même des aprioris peu flatteurs sur ce que j'appelais le "manfra", pensant que ce style n'était qu'une pâle copie du manga, et qu'une "simple copie" ne pourrait jamais dépasser "l'original"... Quelle grossière erreur! Car BB project surpasse de loin beaucoup de shonens disponibles en France. Portrait d'un shonen prometteur!

De la baston et du fantastique
Le héros de l'histoire s'appelle Franck. Ce jeune étudiant de 17 ans débarque à Kyoto pour étudier mais également trouver des réponses à certaines questions concernant ses origines. Dès les premières pages, le lecteur se rend compte que le récit créé par Kaze et Shonen est clairement tourné vers l'action! D'un tempérament à la fois altruiste et bagarreur, notre héros va se sentir obligé de remettre dans le droit chemins des lycéens en train de racketter un camarade. Après avoir lu scène, j'ai tout d'abord cru que le récit allait prendre une tournure de "manga furyo", c'est à dire un récit nous racontant les tribulations réalistes d'un lycéen castagneur... Pourtant, quelques pages plus loin, changement de ton radical: certains étudiants ont un pouvoir, le "seishin", qui leur donne des capacités spéciales lors des combats (nous y reviendrons plus tard). Ainsi Kaze et Shonen ont choisi d'intégrer des éléments fantastiques dans leur histoire!

Tournoi et entraînements
A partir du moment où Franck découvre l'existence du seishin, sa vie va radicalement changer. Il va tout d'abord faire la connaissance de Megumi, une splendide demoiselle qui va lui venir en aide, alors qu'il était en mauvaise posture face à un détenteur du seishin venu venger ses camarades. Il fera par la suite la connaissance d'autres personnages qui vont lui proposer de participer au BB project. Ce tournoi décide de l'intégration des étudiants "gaijin" (= étrangers en japonais) dans la ville de Kyoto. Deux camps vont donc s'affronter: ceux qui sont pour l'intégration d'étudiants étrangers dans la ville de Kyoto, et ceux qui sont contre. Chaque camp regroupe plusieurs lycées et chaque lycée a sa propre équipe de combattants. C'est ainsi que commencent les éliminatoires du Black Boat Project.
Dans la plus pure tradition shonenesque, nos auteurs ont eu la bonne idée d'intégrer, entre les combats, des phases d'entraînement par lesquelles notre héros apprendra à maîtriser son nouveau pouvoir.



De l'humour
Il faut également signaler l'omniprésence de séquences humoristiques dans l'œuvre de nos jeunes auteurs, qui se manifeste de différentes manières. Tout d'abord, nous retrouvons le classique comique de situation, qui se caractérise par des quiproquos ou autres "bourdes" de notre héros gaffeur, ou encore le comique d'intrusion, qui se manifeste par les interventions de l'auteur dans son propre récit.
Ensuite, on note la présence d'une "french touch", un humour qui est particulièrement efficace et qui consiste à confronter les travers des cultures françaises et nippones. Cela se manifeste, entre autres choses, par la volonté de notre héros à appeler ses camarades de lycée par leur prénom, à faire le légendaire "french kiss" (alors que le baiser est considéré comme un acte très intime au pays du soleil levant), ou encore à mettre en place le concours de l'aliment le plus nauséabond, en opposant le camembert contre le natto!
Enfin, la présence des comparses Hon-sen et Ali n'est pas étrangère aux nombreuses crises de rire qui ont parsemé ma lecture. Véritable duo comique, à l'instar d'Eric et Ramzy, ses deux personnages sont probablement le moteur comique principal du récit, tant et si bien qu'on a vraiment hâte de les retrouver! D'ailleurs, il faut savoir que ces deux personnages s'inspirent directement de nos deux auteurs!

Des thématiques secondaires sensibles
A ceux qui penseraient, notamment après avoir lu les lignes précédentes, que BB project ne serait qu'un shonen au scénario plutôt léger, je tiens à préciser que de nombreuses thématiques plutôt sensibles sont abordées. Ces dernières donnent bien évidemment une profondeur non négligeable à l'histoire.
Tout d'abord, le tournoi met en évidence une des thématiques centrales du récit, à savoir le racisme. Volonté de traiter d'un thème qui tient à cœur à nos deux auteurs? Souhait de donner un peu de nuance à une société nippone qui passionne aujourd'hui une certaine frange de la jeunesse occidentale, mais qui reste néanmoins un pays plutôt hostile à l'arrivée d'étrangers sur son sol? En tout cas, en tant que gros consommateur de manga, j'ai tendance comme beaucoup d'autres à idéaliser la culture nippone qui me fascine... Mais il ne faut pas oublier qu'une tradition plutôt isolationniste a régné sur ce pays pendant des siècles. Je remercie donc Shonen et Kaze d'avoir intégré ce difficile sujet dans le récit.
Ensuite, j'ai ressenti de-ci de-là une certaine dénonciation du système scolaire nippon, qui tend à opprimer les plus faible. Après le racket de "l'ijime" du premier tome (tête de turc de la classe), nous abordons le thème des "otakus" dans le volume 3. Il est vrai que ces thèmes ont été multi-revisités dans bon nombre d'œuvres sorties chez nous. Mais dans le cas de BB project, le scénariste Kaze traite ce thème de manière différente, en laissant la parole à la victime plutôt qu'au héros de l'histoire.
Enfin, une trame beaucoup plus sombre, qui dépasse de loin le cadre d'un tournoi inter-lycées, se dessine à l'horizon au fil de l'aventure. Plusieurs indices, disséminés dans les trois premiers volumes, vont dans ce sens...