Table ronde avec Naoki Urasawa- Actus manga
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Manga Table ronde avec Naoki Urasawa

Vendredi, 12 Octobre 2012 à 08h38 - Source :Japan Expo

Nous continuons notre tour d'horizon des rendez-vous consacrés à Naoki Urasawa, invité d'honneur de la dernière Japan Expo !
Au lendemain d'une "conférence de presse" qui aura fait grincer bien des dents parmi le milieu de la presse de par ses mauvaises surprises (lire le compte-rendu), une seconde chance était offerte à une poignée de médias spécialisés, dont nous faisions partie. Au cours de cette table ronde, huit journalistes entouraient le maître, mais la petite vingtaine de minutes sembla bien trop courte pour qu'il n'y ait que des heureux... Voici donc les quelques questions qui ont pu être posées au cours de ce bref entretien.
     
     
Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez rencontré votre fidèle comparse, Monsieur Takashi Nagasaki ?
Naoki Urasawa : La première année que j’ai passée dans le monde professionnel, j’avais un autre tantô (responsable éditorial) que monsieur Nagasaki. Au bout d’un an, on m’a dit : « Il faut que tu rencontres quelqu’un, je connais un homme un peu particulier avec qui tu pourrais bien t’entendre ». Je suis allé au café de la Shogakukan. Quand je suis rentré, je suis tombé sur un homme qui n’avait pas un air sympathique, qui m’a dit de m’asseoir, un peu froidement. Il m’a demandé si j’avais un sujet intéressant à aborder. Je lui ai répondu que j’avais une histoire d’Ultraman, où on le voit se demander ce qu’il doit faire, en paniquant pendant trois minutes. Normalement, Ultraman est connu pour disparaître au bout de ce laps de temps, mais j'ai réalisé une variante en le faisant mourir. L'homme en face de moi m’a dit : « C’est pas mal, c’est intéressant ». Et c’est comme ça que s’est déroulée ma première rencontre avec monsieur Nagasaki. C’était en 1983.
   
    
Vous avez déclaré à plusieurs reprises avoir été profondément marqué dans votre jeunesse par la série Phénix d’Osamu Tezuka, en affirmant même que tout le monde devrait lire cette série un jour. On peut faire un parallèle entre Phénix et Billy Bat : on retrouve dans les deux histoires une figure fantastique qui va guider l’humanité à travers les âges. Était-ce une volonté de votre part ? Qu’en pensez-vous ?
J’ai effectivement beaucoup d’admiration pour l’œuvre de Monsieur Tezuka, et en particulier pour Phénix, mais je n’ai jamais eu la prétention de vouloir « faire front » à une œuvre aussi importante. Mais après avoir réfléchi au personnage de Billy Bat, c’est vrai qu’on peut y voir une ressemblance sur ce point-là.
    
    
     
     
Vos fans français ont longtemps attendu la sortie de vos séries publiées antérieurement à Monster au Japon, et il s’était dit que vous ne vouliez pas qu’elles sortent et qu’elles soient traduites. Est-ce vrai et si oui, pourquoi ?
On m’a déjà posé cette question hier ou avant-hier, mais je n’ai jamais dit une chose pareille : ce n’est qu’une rumeur. Je souhaite que toutes mes œuvres soient traduites et que tout le monde puisse les lire. Je n’ai jamais eu l’intention d’empêcher leur traduction.
  
On va rétablir la vérité alors ! (rires
(Naoki Urasawa nous demande alors : ) Mais d’où vient cette rumeur ?
  
C’étaient les éditeurs français qui nous répondaient ça. 
Toutes les demandes de droit ont abouti. A mon avis, c’est sûrement un problème entre maisons d’édition.
    
    
  
Vous faites régulièrement des allers-retours temporels dans vos mangas. J’aimerais savoir comment vous vous y prenez pour construire la chronologie de vos œuvres.
Il n’y a pas de technique particulière pour ce genre de scénarios. Mais j’aime beaucoup l’idée qu’à un certain moment dans l’histoire, à une scène précise, quand je dessine, on change d’époque. Ça me rend enthousiaste.
    
   
Est-ce que vous fixez la fin de vos histoires quand vous commencez à les dessiner ou vous y réfléchissez plus tard ?
À la base, j’ai une ambiance précise à transmettre. J’ai déjà une image assez vague de où l’histoire doit atterrir, mais pas de fin exacte. En avançant dans l’intrigue, je dois faire attention à ne pas dévier de cette impression que j’ai dès le départ. Je me dis qu’il y a une colline à atteindre, j’avance, j’avance, en faisant quelques détours, et je suis parfois surpris une fois arrivé au sommet de regarder tout le paysage que je peux voir de ce point. Cette vision peut être totalement différente de celle que j’ai imaginée.
   
    
   
Pour en revenir à Monsieur Nagasaki, on voit bien qu’aujourd’hui, il est plus qu’un tantô de l’ombre puisqu’il est crédité comme co-scénariste de vos œuvres. Quelle est la part de chacun dans la création de vos histoires ? Comment travaillez-vous ensemble ?
Au début, Monsieur Nagasaki était le supérieur de mon tantô et faisait partie de la maison d’édition Shogakukan. Nous avons travaillé ensemble sur Monster, Master Keaton et 20th Century Boys. Vers le milieu de ce dernier, Monsieur Nagasaki est parti de Shogakukan pour devenir indépendant. Il s’est alors dit que, comme il ne faisait pas partie de la maison d’édition, c’était normal qu’il co-signe mes œuvres. Aujourd’hui, pour Billy Bat, il ne travaille plus en tant que tantô mais plutôt en tant que collaborateur.
  
Habituellement, lorsque nous travaillons ensemble, Monsieur Nagasaki vient chez moi. Pour un épisode ou une histoire, le rendez-vous peut durer jusqu'à deux heures. Nous discutons de l’épisode, ça peut tourner en débat, le ton peut monter, mais la fin de la discussion doit aboutir à un accord entre nous deux. Aucun de nous deux ne fait de concession. Cette manière de travailler n’a pas changé depuis le jour où nous nous sommes rencontrés, en 1983.
   
Le statut d’indépendant de Monsieur Nagasaki dans le milieu du manga, qui co-signe les œuvres du mangaka avec lequel il travaille, c’est un pas très important dans le monde du manga, où la plupart des mangakas créent leurs mangas avec leur tantô. En effet, ces personnes s’intéressent aux mangas, aiment le manga et apportent leur contribution à ce milieu. Cette étiquette permet de signifier aux personnes passionnées qui ont de bonnes idées mais qui ne pourront pas être mangakas (parce qu'elle ne savent pas dessiner par exemple) qu’elles peuvent trouver leur place grâce à ce genre de métier.
     
Il y a deux types de mangakas : ceux qui reçoivent un scénario déjà fait et ceux qui discutent du scénario avec leur tantô. Ce n’est pas propre au domaine du manga. Dans la musique par exemple, le producteur des Beatles, George Martin, aidait le groupe pour créer. Créer dans la discussion permet de faire naître une œuvre.
    
    
Merci beaucoup, Monsieur Urasawa !
 
Remerciements à Naoki Urasawa, à son interprète ainsi qu'à l'équipe de Japan Expo.

commentaires

Luciole21

De Luciole21 [2209 Pts], le 12 Octobre 2012 à 16h18

Super intéressant, du coup, toutes les oeuvres d'Urasawa ont intérêt à sortir, les éditeurs n'ont plus d'excuse ! (comment, c'est pas si simple ? ^^)

Kaori17

De Kaori17 [3034 Pts], le 12 Octobre 2012 à 16h13

J'ai vu cette conférence à la Japan Expo. J'ai été aussi étonnée que ce ne soit pas Naoki Urasawa qui s'oppose à la sortie des ses anciens manga. Les éditeurs se sont bien foutus de nous.

Koiwai

De Koiwai [12693 Pts], le 12 Octobre 2012 à 13h00

Plus intéressant que la conférence de presse, ça c'est sûr ^^ Les questions sont globalement chouettes, mais dommage que certaines réponses soient un peu consensuelles ou langue de bois. Je retiens quand même des petites infos intéressantes, notamment sur Nagasaki.

shinob

De shinob [127 Pts], le 12 Octobre 2012 à 11h22

C'est court, mais très intéressant ! Et puis on apprend qu'Urasawa n'est pas responsable du blocage de certains de ses titres en France...

Rouge

De Rouge [358 Pts], le 12 Octobre 2012 à 09h32

Je suis surpris. J'ai toujours cru les éditeurs lorsqu'ils annonçaient que Urasawa ne voulait pas qu'ils éditent ses anciens titres. Du coup, on peut se demander "pourquoi ce mensonge?" sachant que rien que par le nom "Naoki Urasawa" sur le manga, l'oeuvre se vendra.


Mais il est aussi étrange que plusieurs éditeurs français aient sorti cette excuse si elle n'était pas vraie.
Personnellement, si j'étais éditeur de manga, je profiterais plutôt de l'absence de concurrence sur les oeuvres pour en acquérir les droits.

Cependant, je ne suis pas éditeur de manga et, mensonge ou non, il y a sûrement des raisons pour justifier l'absence de la totalité des oeuvres de Urasawa.

Chinoa

De Chinoa [280 Pts], le 12 Octobre 2012 à 08h50

Ce n'est donc pas lui qui nous bloque l'accès à Pineapple Army. Mais, pourquoi on cherche toujours à nous raconter n'importe quoi, sérieux???!!! :/

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