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Ciné-Asie Critique - Le Festin Chinois

Vendredi, 27 Avril 2012 à 09h00

Le Festin Chinois n'est sans doute pas le film le plus connu de Tsui Hark, mais il mérite quand même le détour!

Voici l'analyse de Rogue sur ce film datant de 1995 !


 
 
Chiu (Leslie Cheung) refuse d'être une énième petite frappe dans la mafia locale. Il préfère embrasser la carrière de maître cuisinier. Admis comme apprenti dans un des restaurants les plus réputés de Hong Kong, il ne laisse pas insensible la fille du patron (Anita Yuen), légèrement excentrique. Mais lorsque le patron, Au Siu-Fung, se voit proposer le « défi du festin chinois » par un ancien adversaire, Wong (Xiong Xin Xin), qui veut prendre le contrôle de son restaurant et établir un monopole, toute l'équipe le délaisse. Le « défi du festin chinois » n'est pas anodin : il s'agit d'un concours où deux équipes doivent cuisiner trois soirs d'affilée et présenter à un jury de nombreux plats sophistiqués demandant des heures d'entraînement, évalués sur les critères du goût, de l’odeur, de la forme et de la couleur. Rapidement, Chiu et la fille du patron se mettent en quête d'un maître cuisinier capable de concevoir les plats demandés. Ils font la rencontre de Kit (Kenny Bee), qui a perdu ses capacités après avoir été quitté par sa femme et cédé à la tentation de l'alcool. L'équipe composée de Chiu, Kit et la fille du patron parviendra-t-elle à remporter le défi du festin chinois ?

Sorti en janvier 1995 à Hong Kong et trois ans plus tard en France, le Festin chinois est réalisé par Tsui Hark, connu comme un maître du film de sabres chinois (wu xia pian). Le Festin chinois a inauguré la recette du mélange des genres 100% fun, mais certainement pas dénué de finesse, en proposant de croiser cuisine et kung-fu. Explications : il ne s'agit pas de retrouver dans ce film de la cuisine et du kung-fu, mais de voir comment la cuisine peut être pratiquée comme du kung-fu ! Ce film de Tsui Hark est-il savoureux ou indigeste ? Levons le voile du mystère tout de suite : soi-disant mineur dans la filmographie du très prolifique réalisateur hongkongais, le Festin chinois était incontestablement le plus divertissant depuis le récent Détective Dee.

Le « défi du festin chinois » est tiré d'un fait historique, celui du repas organisé par l'empereur Kangxi au début du XVIII°s pour rapprocher la dynastie Han et les peuples mandchous. Les puissants des deux camps s'étaient réunis dans la Cité interdite autour de plus de 100 plats copieux différents, issus de leurs traditions gastronomiques respectives. Parmi ces plats figuraient des compositions toutes plus improbables les unes que les autres, à base d'animaux sauvages (bosse de chameau et trompe d'éléphant farcies, singe, etc !!!). Le défi exposé dans le film reprend cet événement, en exigeant que les concurrents élaborent ce genre de plats issus de la cuisine impériale, tombés en désuétude, dont l'élaboration est réservée à des initiés peu nombreux.

Ne vous attendez pas à trouver dans le Festin chinois une déclinaison hongkongaise de Tampopo (célèbre film nippon qui est une belle tranche-de-vie autour de la cuisine), on en est très loin. Il faut que cela soit dit : le Festin chinois a été conçu comme une comédie familiale devant être rentable. A Hong Kong et en Chine, des films sont programmés lors des fêtes du Nouvel An chinois, mettant généralement en valeur un casting composé de stars hongkongaises, dénués de violence. Le Festin chinois est de ceux-là, sachant que Tsui Hark a su proposer d'autres oeuvres bien moins uniformisées, comme, la même année, le violent et bestial The Blade. Pour autant, s'il est conçu comme un bon divertissement, le Festin chinois perd-il en intérêt ce qu'il gagne en accessibilité ? Et bien non. On peut aussi faire du divertissement fait de fun, d'humour et de personnages attachants tout en proposant du cinéma maîtrisé.

Du kung-fu en cuisine, cela donne à peu près ça : les aliments sont coupés avec une maîtrise hors du commun, les cuisiniers se déplacent à la vitesse de la lumière entre plusieurs plats afin de surveiller la cuisson, les animaux encore vivants avant d'être cuisinés mettent la pagaille. Les couteaux de cuisine, hachoirs, poêles remplacent les épées, les poings, les lances. Tsui Hark associe une mise en scène outrancière basée sur cette cuisine martiale à un humour explosif. Le Festin chinois est tout à la fois loufoque et délirant tout en permettant une découverte savoureuse des traditions culinaires issues de la Chine impériale. L'esthétique est savamment basée sur ce qui fait la richesse de la cuisine : la profusion des plats nous en met plein les mirettes, de même que les couleurs, les formes... Le rythme est maîtrisé avec un final consacré au concours très efficace. Tsui Hark fait fi du réalisme pour se tourner vers du fun à l'état brut. Les cuisiniers qui se déplacent comme des combattants, les animaux qui sont en réalité protégés et ne peuvent donc pas être cuisinés, tout ceci n'est pas réaliste, mais tellement original et tellement fun.

Le film se permet même de glisser un clin d'oeil à son acteur principal, puisque lors d'un dialogue, les personnages se demandant quel chanteur passe à la radio, l'un d'entre eux précise qu'il ne s'agit pas de Leslie Cheung, qui a effectivement mis sa carrière de chanteur entre parenthèses pendant une certaine période.

Le Festin chinois est donc rempli à ras bord d'humour, sachant qu'on a même pas évoqué les meilleurs moments, qui sont certainement ceux de la rencontre et de la remise à niveau de Kit, ancien génie culinaire, et des coups bas pendant la compétition finale, jouissive. Au niveau du casting, on apprécie évidemment Leslie Cheung, le meilleur acteur hongkongais des années 1990, aujourd'hui décédé. Il est entouré notamment d'Anita Yuen et de Kenny Bee, qui s'ils ne sont pas aussi connus sont tout à fait géniaux, faisant de l'humour du Festin chinois un régal.

Pourtant, on regrette que l'humour ne soit pas toujours efficace, car fortement digressif, Tsui Hark amenant ses personnages dans des situations délicieusement improbables... ou tristement lourdingues. Tout ce qui concerne l'amourette entre la fille du cuistot et le jeune coq n'est en effet pas toujours très opportun, l'humour fonctionnant en l'occurrence une fois sur deux. Pour tout ce qui concerne la cuisine, c'est nettement mieux, l'originalité et la mise en scène dynamique et pétillante prévalant.

Les bonus sont assez faiblards, surtout qu'on dispose là de deux DVD ! Les galettes ne sont pas franchement très farcies, si l'on peut dire, avec seulement une interview du réalisateur, un documentaire autour de la cuisine chinoise (le minimum pour aller au-delà du film), le plus intéressant demeurant le court-métrage.

Le Festin chinois a laissé sa patte dans le cinéma hongkongais comme modèle maîtrisé du mélange de la comédie, des arts martiaux et d'une discipline quelconque, ayant d'ailleurs pu servir d'inspiration au Shaolin soccer de Stephen Chow, qui croise football et arts martiaux (du « kungfoot ») dans un délire plus grand qu'un stade.

Dictons chinois : « Bien manger, c'est atteindre le Ciel ». « Celui qui a bien mangé est en compagnie des dieux ». Tsui Hark a sans doute repris ces dictons en considérant que « celui qui s'est bien diverti est repu ».

commentaires

bakagoku

De bakagoku [4548 Pts], le 01 Mai 2012 à 18h32

Une franche rigolade pour ma part ^_^

Karakuri

De Karakuri [3196 Pts], le 28 Avril 2012 à 00h51

J'ai beaucoup aimé ce film aussi

IchigoSan

De IchigoSan [998 Pts], le 27 Avril 2012 à 10h35

Un bon film ^^

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