Nippon no Haikyo - Actualité manga

Nippon no Haikyo : Critiques Vestiges d’un Japon oublié

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 12 Novembre 2013

Les éditions issekinicho nous ont habitué à l'excellence avec leurs deux premiers ouvrages parus fin 2012, Neko Land et Tokyo Ohanami, qui nous faisaient découvrir par le prisme des chats et des cerisiers en fleurs un Japon très différent de celui qu'on avait l'habitude de voir dans les guides et autres ouvrages plus classiques.

Avec Nippon no Haikyo, l'éditeur nous invite à entrer dans un tout autre univers, très atypique pour nous autres occidentaux : celui des haikyo, qui sont le pendant japonais du terme "Urban Exploration" (ou URBEX), qui désigne des lieux et ruines abandonnés par leurs anciens occupants. L'ouvrage va ainsi compiler de nombreuses photos d'un seul et unique chasseur de haikyo, Jordy Meow, un français domicilié au Japon et qui a pour principal hobby de photographier ce genre de lieux.

Le livre est divisé en plusieurs thématiques, chacune d'entre elles s'intéressant à un type d'endroit : les écoles, les lieux de loisirs (parcs d'attractions...), les hôtels, l'île d'Hashima, les édifices industriels, les bases militaires, les domiciles (maisons et appartements) et enfin les hôpitaux. Des centaines de photos, sur 250 pages, s'offriront au regard curieux des lecteurs qui n'auront sans doute jamais la chance de s'approcher de ces divers sites, qui sont autant de témoignages d'un Japon relativement ancien et méconnu.

Après un préambule dans lequel Jordy Meow nous raconte la naissance de sa passion pour l'exploration urbaine et une introduction visant à nous expliquer le rôle et les codes propres à cette activité, nous allons entrer dans le vif du sujet en découvrant les nombreuses photos contenues dans le livre.

Bien évidemment, il est très difficile de revenir sur chaque cliché de Nippon no Haikyo, tant ils sont nombreux.
Personnellement, j'ai beaucoup apprécié les photos en plan large qui nous permettent d'observer la façade d'un lieu, et plus particulièrement celles où un bâtiment est perdu au milieu d'une verdure "envahissante", qui nous donne l'impression que le site est doucement mais sûrement capturé dans une prison végétale aussi belle que puissante. D'ailleurs, on ressent souvent cette idée d'opposition entre l'éphémérité d'une bâtisse (et par extension de l'homme qui l'a construite) qui finira tôt ou tard par s'effondrer, et la souveraineté de la nature, qui finit toujours par reprendre ses droits. En ayant cette notion en tête, j'ai été littéralement subjugué par les trois clichés suivants :

- La photo du Screw Coaster du parc Nara Dreamland de la page 34, où l'attraction, rattrapée par la végétation qui s'élève inexorablement, est baignée par les rayons doux et chaleureux du soleil. L'ambiance est apaisante mais aussi hypnotique, car on est vite captivé par l'effet de spirale induit par la position des rails en arrière-plan. Magnifique.


 
- Sur l'île d'Hashima, sur laquelle l'auteur consacre tout un chapitre, la photo de la page 124 m'a également fait ressentir beaucoup d'émotion. Ici, on a l'impression qu'un petit océan de verdure sauvage est pris au piège par les façades sombres et intimidantes des bâtiments, qui font de la résistance face à la nature qui essaie de reprendre ses droits. Un contraste se créé alors entre la sérénité des végétaux (renforcée par les épis rendus dorés par le flash ou un travail sur la photo) et du ciel limpide, et cet effet d'inquiétude induite par les appartements, qui apparaissent en contre-plongée.

- Enfin, j'ai beaucoup aimé la photo de la page 208 qui s'intéresse à la Maison Royale. De prime abord, cette photo ne semble pas particulièrement magnifique... mais pour moi elle révèle ses secrets si l'on prend le temps de s'y attarder. Déjà, le contraste saisissant entre les tuiles rouges et les différentes teintes de vert de la végétation donne un certain cachet. Mais surtout, les deux chaises posées sur le perron, qui semblent être encore en bon état, et la bouteille posée juste à côté, nous font prendre conscience que ce lieu a bel et bien été habité à une époque, voire même qu'il le serait encore aujourd'hui...

En plus de toutes ces images, de très nombreux textes nous permettent d'en savoir plus sur les lieux présentés dans le livre. D'une grande richesse, ces écrits apportent un éclaircissement historique, ou dévoilent une anecdote de Jordy sur tel ou tel lieu. Cela nous permet d'apprécier encore plus les photos !

Enfin, après le contenu, intéressons-nous en contenant. C'est simple, les éditions issekinicho nous offrent un ouvrage tout simplement magnifique. Mise en page soignée, papier de qualité, reliure présentant des reliefs... C'est un bel et bien un "beau livre" que nous avons entre les mains, doté d'une réalisation très soignée, et ce à tous les niveaux. Le prix (29,95€), qui pourra sembler élevé à certains, est pourtant amplement justifié.

En définitive, Nippon no Haikyo est un ouvrage d'une extrême qualité et à la portée artistique indéniable. Parvenant à sublimer la beauté de divers lieux japonais abandonnés depuis des années, Jordy Meow est bien plus qu'un photographe Urbex, c'est un vrai magicien.
Un magicien qui a pu compter sur l'édition particulièrement soignée d'issekinicho pour cet ouvrage, qui mérite de trôner fièrement dans les bibliothèques des personnes passionnées par le Japon et la photographie.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur

19 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs