Couleurs de Yuki (les) Vol.1 - Actualité manga
Couleurs de Yuki (les) Vol.1 - Manga

Couleurs de Yuki (les) Vol.1 : Critiques

Yuki no Iro

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 02 Janvier 2018

Quelque part à Tokyo, dans une galerie de peinture contemporaine, à l'heure où tout le monde s'extasie devant le tableau du prodige montant Akira Oogami qui vient d'obtenir un prix spécial, une jeune fille débarque en se montrant surprise qu'une telle peinture ait gagné une récompense : pour elle, le tableau ne transmet aucune émotion, ne dégage aucune impression forte, et elle en est la première étonnée vu qu'elle a toujours beaucoup aimé ce peintre. Dans la foule, tous la prennent pour une ignorante qui n'y connaît rien. Tous, sauf un vieil homme qui décide de se rapprocher d'elle, intrigué. L'homme en question n'est autre que Gentarô Honda, peintre de génie il n'y a pas si longtemps, mais qui avait disparu de la circulation depuis dix ans. Autrefois, Akira Oogami fut son disciple, mais désormais il l'a renié. Et s'il a décidé de se montrer à nouveau auprès de la jeune Yuki, c'est soi-disant parce qu'il veut faire un tableau d'elle, car elle ressemble à la fille qu'il a aimée autrefois... Mais est-ce vraiment la seule raison ? Entre le vieux peintre et la jeune fille, un lien fort va petit à petit se nouer, et risque de changer la vie des deux personnes.


Parue au Japon de 2001 à 2003, la série en 4 tomes Les Couleurs de Yuki nous permet de retrouver seul aux commandes le mangaka Saburô Ishikawa, déjà connu en France pour les dessins d'Aya conseillère culinaire et d'Une sacrée mamie, et nouvel auteur phare des éditions Black Box qui ont déjà aussi sorti de lui les récits Plus haut que le ciel, Fermé pour la journée et Bunza l'insouciant. Assez sommaire, le synopsis proposé par les éditions Black Box en quatrième de couverture a le mérite de ne pas trop en dire sur une oeuvre qui, sur ce premier tome, s'avère riche et plutôt étonnante. Car au-delà du sujet de la peinture qui reste plutôt un prétexte pour l'instant, l'oeuvre offre avant tout un portrait très humain de deux personnages à la base très différents et qui vont se rapprocher pour, peut-être, donner ou redonner une direction à leur existence.


Une fois les premières pages passées, Ishikawa nous immisce dans une tranche de vie où l'on va découvrir petit à petit le quotidien, le passé et les problèmes de Yuki et de Honda. Et l'une des premières grandes forces de la narration est de nous présenter chacun des personnages en passant avant tout par l'autre : le lecteur découvrira en même temps que Honda la vie de Yuki, et prendra connaissance en même temps que Yuki de la vie de Honda, ce qui crée d'emblée un lien très fort entre les deux personnages principaux, mais aussi avec le lecteur qui, rapidement, ne peut que se sentir très proche de ces deux-là. Dès lors, en apprendre petit à petit sur ce peintre sur le déclin et sur cette jeune fille un peu perdue et qui n'a pas encore 20 ans devient un véritable plaisir, d'autant que le mangaka a à coeur de les présenter sous différentes facettes. Pour Honda, son sentiment d'être un peu sur le déclin, son regard sur son passé et sur Oogami qui fut son assistant, ses problèmes de santé... Et pour Yuki, la situation difficile dans laquelle elle s'est retrouvée en arrivant à Tokyo, le job qu'elle est contrainte de faire pour subsister, puis sa situation familiale et les doutes qu'elle garde en elle concernant ce qu'elle veut faire de sa vie.


Difficile d'en dire plus sans trop spoiler, alors signalons simplement que les deux personnages principaux d'Ishikawa transpirent d'une humanité authentique que l'auteur prend soin d'exposer par touches, dans ce qu'ils peuvent avoir de faiblesses et de bons côtés. Cela ne se limite d'ailleurs pas à eux deux dans la dernière partie du tome, qui s'intéresse également de près aux doutes de la famille de Yuki, mais aussi à Tanaka, l'ancien professeur d'arts plastiques au collège de Yuki, qui fait face à de gros doutes dans sa vie. Le point commun entre ces personnages ? Peut-être bien que la peinture et le dessin pourront leur ouvrir de nouveaux horizons. C'est surtout le cas pour Yuki, jeune fille que l'on sent perdue même si elle ne veut pas le montrer. Toujours gentille avec ses proches, ne réclamant rien, mais s'interrogeant en réalité pas mal sur la direction floue de son existence et sur elle-même, elle pourrait évoluer grâce au retour dans sa vie du dessin et de la peinture, un art pour lequel elle dit n'avoir aucun talent, mais où elle montre une indéniable sensibilité, une capacité à véhiculer des émotions même si ses oeuvres très amatrices ne peuvent toucher beaucoup de monde. Et dans l'oeuvre, toute l'idée de l'évolution de Yuki (mais pas uniquement d'elle) est symbolisée par la notion de couleur (jusque dans le titre de la série) : selon les dires de Honda, la jeune fille doit trouver quelle est sa "couleur", soit tout simplement se trouver elle-même et définir son existence. La jeune fille dit à un moment qu'elle n'a peut-être pas de couleur et est simplement "invisible", mais est-ce réellement le cas ?


On retrouve avec plaisir le trait d'Ishikawa, qui a toujours ce côté un peu old school chez les personnages, à la fois assez simple et capable d'offrir des expressions nuancées qui laissent bien deviner leur ressenti. L'auteur se permet également volontiers quelques notes d'humour agréable (comme quand Yuki est cachée sous le lit), et séduit plus d'une fois dans le soin qu'il accorde aux décors, que ce soit en ville, ou surtout dans la campagne de Hokkaidô où vit la famille de Yuki.


Du côté de l'édition, le principal point faible vient d'un gros problème de relecture, qui a laissé passer un nombre assez important de coquilles, allant de fautes d'orthographe ou de conjugaison à des petits oublis de mots (mention spéciale aux 3 fautes en une seule case page 132). C'est dommage, car en dehors de ce problème le reste de l'édition est excellent, à commencer par la traduction de Gaëlle Garcia qui, en soi, trouve souvent de bonnes formulations, qui ont un côté très "parlé", crédible et vivant. On appréciera aussi le papier et la reliure souples qui rendent le livre très facile à manipuler, la bonne impression, et les six premières pages en couleurs.


Avec ce premier volume des Couleurs de Yuki, Saburô Ishikawa offre une tranche de vie qui commence de très belle manière, et où l'on retrouve tout le talent du mangaka pour offrir des personnages qui ont quelque chose de très humain et vrai. Autant dire que l'on a hâte de découvrir la suite de l'histoire de la mignonne Yuki et de l'attachant Honda.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs