Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 27 Juin 2023
Quatre années sont passées, et Nachi et Utsumi, désormais jeunes adultes, forment un joli petit couple non-marié. Côté professionnel, elle exerce son job d'infirmière tandis qu'il travaille dans une boîte de journalisme. Et côté personnel, ils vivent ensemble dans un bonheur simple, en continuant soigneusement de panser à deux leurs blessures de jeunesse. Mais à l'heure où sont grand-père paternel décède et que son père s'interroge sur le bonheur de son fils, Utsumi se pose lui-même une question: peut-il se permettre de fonder une famille ? Il a effectivement peur de donner naissance à un enfant qui pourrait subir la même souffrance qu'il a connue. Et puis, autour d'eux, d'autres personnes, amis comme famille, se questionnent aussi sur leur vie, sur leur parentalité, sur l'héritage transmis par leurs parents, sur leur différence...
Le voici enfin, ce quatrième et dernier volume d'A Tail's Tale, 9 longs mois après le précédent volume ! L'heure est donc enfin venue de découvrir la nouvelle étape de la vie de Nachi et d'Utsumi, désormais adultes et en couple, avec tout ce que cela peut impliquer de doutes quant à la logique étape suivante de leur relation. Alors qu'Utsumi a peur de donner naissance à un enfant car sa progéniture pourrait souffrir des mêmes tourments que lui a traversés autrefois, prend-il vraiment le problème dans le bon sens ? D'un côté, il y a le désir d'aller plus loin dans son bonheur avec Nachi, celle qui compte tant pour lui. Et d'un autre côté, il y a la leçon que va, mine de rien, lui donner Nishimura, un collègue qui, malgré les limites que montre son petit dernier, l'aime de tout son coeur, en voyant surtout les qualités de son enfant pour mieux l'encourager.
Il en ressortira des avancées importantes en Utsumi, mais notre héros et Nachi sont loin d'être les seuls à l'honneur dans ce tome final, puisque Mizu Sahara prend toujours autant soin de ses personnages secondaires qui, tous, avancent aussi et ont des choses à véhiculer. Ici, le père d'Utsumi, à l'heure où son propre papa meurt, s'interroge sur son fils: est-il heureux d'être venu au monde ? Là, la mère de Nachi, désormais quasiment seule dans sa maison en s'interrogeant sur le sens de sa vie (tout ça était-il exactement l'existence à laquelle elle aspirait ?), va pouvoir, sur conseil d'une amie, apprendre à chérir chacun des souvenirs qui ont laissé un trace dans sa demeure. Quant à Shiho, devenue policière et ayant accepté les avances de son prétendant qui n'avait d'y eux que pour elle depuis bien longtemps, elle fait face à sa situation de femme non-mariée et sans enfant, marquée à la fois par sa propre enfance et par une affaire où elle est amené à s'occuper d'un bébé lâché par une mère démissionnaire.
Sous l'habituel style tout doux de la mangaka, chacun de ces visages se voit brièvement mais suffisamment abordé en cristallisant, chacun à leur manière, selon leur parcours, des idées similaires: les relations familiales et la manière dont elles peuvent nous conditionner, l'importance de s'aimer comme on est et d'apprécier nos différences, la façon dont l'amour de nos proches peut nous aider dans cette démarche, le fait que le regard des autres n'a sans doute pas tant d'importance que ça tant qu'on a l'amour des siens... sans oublier le fait que, même si le temps passe avec ses hauts et ses bas, la vie continue. Et tout ceci, un nouveau personnage, sur qui on en dira un minimum pour ne pas spoiler, vient très bien le cristalliser dans la dernière phase de la série: Sena, à la fois humaine (car elle aussi à ses moments de faiblesse en craquant dans son bain) et rayonnante et porteuse d'espoir dans son optimisme, un optimisme qu'elle a précisément acquis grâce à l'amour permanent des siens.
Ainsi, le conte moderne de Mizu Sahara se referme magnifiquement, en cristallisant très bien tout ce que la mangaka souhaitait véhiculer, elle qui prouve à quasiment chacune de ses oeuvres son attachement pour la différence et l'acceptation de soi-même. Retrouver tout le talent de cette autrice est toujours un immense bonheur, si bien que rendez-vous est déjà pris à la fin de cette dernière semaine de juin, toujours chez Noeve Grafx, avec Une autre moi, un recueil de l'autrice que l'on a là aussi hâte de découvrir.