Ciné-Asie Chronique Ciné Asie - Terra Formars, le film live
Depuis déjà 2011 au Japon et 2013 en France via les éditions Kazé Manga, le manga Terra Formars de Yû Sasuga (scénario) et Kenichi Tachibana (dessin) nous apporte régulièrement notre lot d'adrénaline et de brutalité, essentiellement à base d'affrontements improbables d'humains mutants insectoïdes contre des cafards ayant beaucoup (trop) évolué, pour de la série souvent fun. On peut toutefois dire qu'au fil des années, la série a connu des coups de mou, et que depuis quelques volumes l'histoire tend à se rallonger, mais dans l'ensemble le divertissement reste bien là, avec son lot de personnages badass (aaaaah, Asimov, Michelle...) et de moments nanardesques assumés. Très gros succès dans son pays pendant ses premières années d'existence (au point qu'elle figurait dans les tops vente annuels de mangas), et également très bien accueillie dans notre pays, l'oeuvre a forcément connu des adaptations, à commencer par deux saisons animées en 2014 et 2016 qui furent proposées en France en dématérialisé par les plateformes Crunchyroll et ADN, mais également en DVD & Blu-ray par Kazé. Toutefois, l'adaptation qui nous intéresse aujourd'hui est autre...
Quand, en février 2015, fut annoncée au Japon une adaptation en film live de Terra Formars, les avis furent très divisés: comment adapter en live un récit pareil sans risquer de tomber dans le mauvais kitsch ? Mais un nom avait de quoi rassurer voire enthousiasmer: celui du réalisateur, Takashi Miike, qu'on ne présente plus, et qui semblait bien être l'homme de la situation. Par la suite, les bandes-annonces affluèrent en divisant toujours autant, le long-métrage d'1h49 finit par sortir dans les salles nippones le 29 avril 2016 en recevant un accueil plutôt mitigé autant côté avis que côté box-office... mais ça ne l'a pas empêché de faire son chemin jusque chez nous ! Ainsi, après une diffusion au Festival International du Film fantastique de Gérardmer en janvier 2017, le film live Terra Formars arriva en DVD et en Blu-ray chez Kazé en septembre de la même année, en vf et vostf.
Nous voici ici dans un futur où l'humanité qui n'a cessé de croître épuise dangereusement les ressources de la Terre au point de risquer l'extinction. Pour remédier à cela, un plan de sauvetage a été mis en place : envoyer sur Mars l'unique être vivant capable d'endurer l'environnement de la planète rouge et de rendre celle-ci habitable : le cafard. 500 ans plus tard, en 2599, la terraformation de Mars est sur le point d'être bouclée, et les insectes qui y pullulent doivent désormais être exterminés. Succédant à une première équipe, celle du "Bugs 1", qui a mystérieusement disparu alors qu'elle était en mission d'extermination sur mars 20 ans auparavant, une deuxième équipe composée de 15 personnes est à son tour envoyée par l'U-Nasa sur Mars à bord du "Bugs 2" pour éliminer les insectes... Mais est-ce là leur vraie mission, ou leur cache-t-on des choses ? Et comment ont-ils été sélectionnés ? A peine les 15 membres de l'équipe ont-ils débarqué sur la planète nouvellement terraformée qu'ils y découvrent d'étranges créatures très peu amicales. La théorie de l'évolution ne s'applique pas qu'à l'homme, et les habitants de Mars sont bien décidés à se venger de ceux qui les persécutaient autrefois et à éliminer tout intrus...
Celles et ceux ayant lu au moins le début du manga le remarqueront vite: là où l'anime faisait le choix de ne pas s'y intéresser tout de suite, le film live de Terra Formars, lui, se concentre uniquement sur le récit du volume 1, sorte de "volume pilote" se suffisant plus ou moins à lui-même avant que les choses sérieuses ne démarrent réellement à partir du 2e tome. Pour un film de ce type devant se suffire à peu près à lui-même, le choix est logique, même s'il n'y a pas non plus de réelle fin à tout ceci et qu'il faut alors plutôt voir ce métrage comme le "récit d'une mission qui a échoué".
Et ce que les fans du manga remarqueront aussi, c'est que Miike est resté, dans le déroulement et dans le schéma narratif, très, très fidèle au manga. On retrouve donc les spécificités du support d'origine: des bastons brutales, des morts assez bourrines voire atroces touchant même des personnages présentés comme les visages principaux, un côté assez direct et sans détours dans ces morts pouvant survenir soudainement sans laisser le temps de dire ouf, des évolutions de blattes bien puissantes et musclées qui se veulent ridiculement effrayantes... sans oublier, bien sûr, ce qui fait peut-être le plus fortement la "patte Terra Formars" : la nature de ses "héros" envoyés dans l'espace. Pourquoi ces 15 personnes en particulier, qui n'ont aucune compétence d'astronaute, ont-elle été sélectionnées, et que leur a-t-on fait subir pour qu'elles puissent accomplir leur mission ? Les réponses arrivent vite: simples miséreux hors-la-loi ramassés aux quatre coins du monde, allant du yakuza au terroriste en passant par la maquerelle, la prostituée, etc, les membres du "Bugs 2" se sont vus injecter des sérums leurs conférant les pouvoirs de différents insectes : ainsi, l'un est devenu quasiment immortel, tandis que l'autre possède un souffle capable de le propulser à une vitesse folle, ou qu'une autre encore peut manipuler les cafards... Un côté nawak bien assumé puisque chaque nouveau pouvoir dévoilé donne lieu à des explications 100% véridiques sur les insectes concernés. Ainsi a-t-on droit, au beau milieu de l'action, à des informations sur les différents insectes qui ont inspiré les pouvoirs. C'est rigolo et ça contribue à l'ambiance pour peu qu'on entre dans le trip, même si, bien souvent, les focus sur ces insectes ne servent pas à grand chose, puisque les personnages auxquels ils sont rattachés ont la fâcheuse tendance à finir en plusieurs morceaux quelques secondes ou minutes plus tard. C'est sur ces bases que se déroulent un scénario qui, en dehors de ça, est hyper classique du genre, avec des héros au background très standard et expédié (en fait, ce sont plus des fonctions que de vrais personnages), victimes de manigances qui sont loin de se résumer à la simple élimination de blattes.
Bref, après avoir lu tout ça, vous vous dites peut-être : chouette, avec Takashi Miike aux commandes, Terra Formars en live, ça a tout pour dépoter. Après tout, le bonhomme est déjà coutumier des adaptations de manga barrés (Ichi the Killer, MPD Psycho...) mais aussi des films de SF aux accents sentaï bien fumés voire rigolos (Yatterman, Zebraman...), et en plus il est réputé pour son action violente et régressive jusqu'au-boutiste, chose qu'il a encore récemment bien démontrée avec le très fun First Love, le dernier Yakuza. Mais il ne faut pas oublier qu'avec ce réalisateur, on a souvent tout ou rien, les excellents petits films côtoyant les trucs complètement oubliables dans sa très riche filmographie (le gars étant très productif). Et malheureusement, le film live Terra Formars penche plutôt dans la deuxième catégorie...
En premier lieu, parce que son aspect visuel est un peu aux fraises. La démarche est pourtant intéressante: en choisissant de rester hyper fidèle aux designs des cafards (aux visages creux et inexpressifs) et aux mutations de nos héros, tout en s'appuyant sur un côté qui semble plutôt volontairement cheap (encore que), l'équipe du film semble vouloir tendre elle aussi vers le nanar assumé... mais non seulement le ton est souvent trop sérieux, mais surtout, l'ensemble est... comment dire... moche. Trop souvent plombé pas de la bouillie numérique au rabais rendant toutes les couleurs et toutes les textures assez hideuses, au point que ça en pique les yeux et que ça nuit aux affrontements, ni clairs ni intenses. D'autant moins intenses que le rythme, qui se veut pourtant assez soutenu, tombe régulièrement dans ses plans qui se rallonges, dans des scènes qui se répètent... En fait, le film paraît souvent un peu mou, chose assez étonnante au vu de sa base. Enfin, bien que les morts soient assez brutales, le tout est surprenamment très aseptisé par rapport au manga: pas de sang, pas de gros coups de folie combattifs... alors que Takashi Miike est souvent capable d'aller très loin dans de l'action excessive, ici on a tout le contraire. Comme si chaque moment d'intensité, chaque montée d'adrénaline était systématiquement contenue, étouffée avant d'éclater... Et le casting n'arrange rien. Il y a pourtant quelques jolis noms dans celui-ci, notamment dans le rôle-phare l'acteur Hideaki Itô que l'on a vu dans d'autres oeuvres de Miike (Lesson Of Evil, Over Your Dead Body), Emi Takei (Kenshin Le Vagabond), ou encore Rinko Kikuchi (Pacific Rim), mais aucun(e) ne semble hyper impliqué dans son rôle comme s'il se demandait ce qu'il/elle fait là, d'autres sont dans un surjeu beaucoup trop forcé (l'insupportable yakuza en tête), et même le célèbre Shun Oguri campe ici un inquiétant/méchant Honda qui ne colle pas du tout avec le reste. Ca manque de consistance et de cohérence dans le jeu.
Au bout du compte, il semble difficile de ne pas ressortir déçu de ce film. La fidélité totale au tome 1 du manga est louable, mais on attendait forcément beaucoup plus d'un pitch aussi barré, nanardesque et régressif en le voyant placé entre les mains de l'enfant terrible Miike. Sans jamais avoir le sentiment d'être devant un film de Takashi Miike, on a juste l'impression d'être face à un travail de commande où toute la créativité du cinéaste aurait été aspirée ailleurs, pour un résultat tout fade.
Concernant les éditions sorties chez Kazé, on pourra saluer la présence d'une vf plutôt correcte pour un film de ce genre, chose qui devrait satisfaire les allergiques à la vo. Egalement, image et son s'avèrent de très bonne qualité. En revanche, ne vous attendez à aucun bonus: il n'y en a tout bonnement pas.
Quand, en février 2015, fut annoncée au Japon une adaptation en film live de Terra Formars, les avis furent très divisés: comment adapter en live un récit pareil sans risquer de tomber dans le mauvais kitsch ? Mais un nom avait de quoi rassurer voire enthousiasmer: celui du réalisateur, Takashi Miike, qu'on ne présente plus, et qui semblait bien être l'homme de la situation. Par la suite, les bandes-annonces affluèrent en divisant toujours autant, le long-métrage d'1h49 finit par sortir dans les salles nippones le 29 avril 2016 en recevant un accueil plutôt mitigé autant côté avis que côté box-office... mais ça ne l'a pas empêché de faire son chemin jusque chez nous ! Ainsi, après une diffusion au Festival International du Film fantastique de Gérardmer en janvier 2017, le film live Terra Formars arriva en DVD et en Blu-ray chez Kazé en septembre de la même année, en vf et vostf.
Nous voici ici dans un futur où l'humanité qui n'a cessé de croître épuise dangereusement les ressources de la Terre au point de risquer l'extinction. Pour remédier à cela, un plan de sauvetage a été mis en place : envoyer sur Mars l'unique être vivant capable d'endurer l'environnement de la planète rouge et de rendre celle-ci habitable : le cafard. 500 ans plus tard, en 2599, la terraformation de Mars est sur le point d'être bouclée, et les insectes qui y pullulent doivent désormais être exterminés. Succédant à une première équipe, celle du "Bugs 1", qui a mystérieusement disparu alors qu'elle était en mission d'extermination sur mars 20 ans auparavant, une deuxième équipe composée de 15 personnes est à son tour envoyée par l'U-Nasa sur Mars à bord du "Bugs 2" pour éliminer les insectes... Mais est-ce là leur vraie mission, ou leur cache-t-on des choses ? Et comment ont-ils été sélectionnés ? A peine les 15 membres de l'équipe ont-ils débarqué sur la planète nouvellement terraformée qu'ils y découvrent d'étranges créatures très peu amicales. La théorie de l'évolution ne s'applique pas qu'à l'homme, et les habitants de Mars sont bien décidés à se venger de ceux qui les persécutaient autrefois et à éliminer tout intrus...
Celles et ceux ayant lu au moins le début du manga le remarqueront vite: là où l'anime faisait le choix de ne pas s'y intéresser tout de suite, le film live de Terra Formars, lui, se concentre uniquement sur le récit du volume 1, sorte de "volume pilote" se suffisant plus ou moins à lui-même avant que les choses sérieuses ne démarrent réellement à partir du 2e tome. Pour un film de ce type devant se suffire à peu près à lui-même, le choix est logique, même s'il n'y a pas non plus de réelle fin à tout ceci et qu'il faut alors plutôt voir ce métrage comme le "récit d'une mission qui a échoué".
Et ce que les fans du manga remarqueront aussi, c'est que Miike est resté, dans le déroulement et dans le schéma narratif, très, très fidèle au manga. On retrouve donc les spécificités du support d'origine: des bastons brutales, des morts assez bourrines voire atroces touchant même des personnages présentés comme les visages principaux, un côté assez direct et sans détours dans ces morts pouvant survenir soudainement sans laisser le temps de dire ouf, des évolutions de blattes bien puissantes et musclées qui se veulent ridiculement effrayantes... sans oublier, bien sûr, ce qui fait peut-être le plus fortement la "patte Terra Formars" : la nature de ses "héros" envoyés dans l'espace. Pourquoi ces 15 personnes en particulier, qui n'ont aucune compétence d'astronaute, ont-elle été sélectionnées, et que leur a-t-on fait subir pour qu'elles puissent accomplir leur mission ? Les réponses arrivent vite: simples miséreux hors-la-loi ramassés aux quatre coins du monde, allant du yakuza au terroriste en passant par la maquerelle, la prostituée, etc, les membres du "Bugs 2" se sont vus injecter des sérums leurs conférant les pouvoirs de différents insectes : ainsi, l'un est devenu quasiment immortel, tandis que l'autre possède un souffle capable de le propulser à une vitesse folle, ou qu'une autre encore peut manipuler les cafards... Un côté nawak bien assumé puisque chaque nouveau pouvoir dévoilé donne lieu à des explications 100% véridiques sur les insectes concernés. Ainsi a-t-on droit, au beau milieu de l'action, à des informations sur les différents insectes qui ont inspiré les pouvoirs. C'est rigolo et ça contribue à l'ambiance pour peu qu'on entre dans le trip, même si, bien souvent, les focus sur ces insectes ne servent pas à grand chose, puisque les personnages auxquels ils sont rattachés ont la fâcheuse tendance à finir en plusieurs morceaux quelques secondes ou minutes plus tard. C'est sur ces bases que se déroulent un scénario qui, en dehors de ça, est hyper classique du genre, avec des héros au background très standard et expédié (en fait, ce sont plus des fonctions que de vrais personnages), victimes de manigances qui sont loin de se résumer à la simple élimination de blattes.
Bref, après avoir lu tout ça, vous vous dites peut-être : chouette, avec Takashi Miike aux commandes, Terra Formars en live, ça a tout pour dépoter. Après tout, le bonhomme est déjà coutumier des adaptations de manga barrés (Ichi the Killer, MPD Psycho...) mais aussi des films de SF aux accents sentaï bien fumés voire rigolos (Yatterman, Zebraman...), et en plus il est réputé pour son action violente et régressive jusqu'au-boutiste, chose qu'il a encore récemment bien démontrée avec le très fun First Love, le dernier Yakuza. Mais il ne faut pas oublier qu'avec ce réalisateur, on a souvent tout ou rien, les excellents petits films côtoyant les trucs complètement oubliables dans sa très riche filmographie (le gars étant très productif). Et malheureusement, le film live Terra Formars penche plutôt dans la deuxième catégorie...
En premier lieu, parce que son aspect visuel est un peu aux fraises. La démarche est pourtant intéressante: en choisissant de rester hyper fidèle aux designs des cafards (aux visages creux et inexpressifs) et aux mutations de nos héros, tout en s'appuyant sur un côté qui semble plutôt volontairement cheap (encore que), l'équipe du film semble vouloir tendre elle aussi vers le nanar assumé... mais non seulement le ton est souvent trop sérieux, mais surtout, l'ensemble est... comment dire... moche. Trop souvent plombé pas de la bouillie numérique au rabais rendant toutes les couleurs et toutes les textures assez hideuses, au point que ça en pique les yeux et que ça nuit aux affrontements, ni clairs ni intenses. D'autant moins intenses que le rythme, qui se veut pourtant assez soutenu, tombe régulièrement dans ses plans qui se rallonges, dans des scènes qui se répètent... En fait, le film paraît souvent un peu mou, chose assez étonnante au vu de sa base. Enfin, bien que les morts soient assez brutales, le tout est surprenamment très aseptisé par rapport au manga: pas de sang, pas de gros coups de folie combattifs... alors que Takashi Miike est souvent capable d'aller très loin dans de l'action excessive, ici on a tout le contraire. Comme si chaque moment d'intensité, chaque montée d'adrénaline était systématiquement contenue, étouffée avant d'éclater... Et le casting n'arrange rien. Il y a pourtant quelques jolis noms dans celui-ci, notamment dans le rôle-phare l'acteur Hideaki Itô que l'on a vu dans d'autres oeuvres de Miike (Lesson Of Evil, Over Your Dead Body), Emi Takei (Kenshin Le Vagabond), ou encore Rinko Kikuchi (Pacific Rim), mais aucun(e) ne semble hyper impliqué dans son rôle comme s'il se demandait ce qu'il/elle fait là, d'autres sont dans un surjeu beaucoup trop forcé (l'insupportable yakuza en tête), et même le célèbre Shun Oguri campe ici un inquiétant/méchant Honda qui ne colle pas du tout avec le reste. Ca manque de consistance et de cohérence dans le jeu.
Au bout du compte, il semble difficile de ne pas ressortir déçu de ce film. La fidélité totale au tome 1 du manga est louable, mais on attendait forcément beaucoup plus d'un pitch aussi barré, nanardesque et régressif en le voyant placé entre les mains de l'enfant terrible Miike. Sans jamais avoir le sentiment d'être devant un film de Takashi Miike, on a juste l'impression d'être face à un travail de commande où toute la créativité du cinéaste aurait été aspirée ailleurs, pour un résultat tout fade.
Concernant les éditions sorties chez Kazé, on pourra saluer la présence d'une vf plutôt correcte pour un film de ce genre, chose qui devrait satisfaire les allergiques à la vo. Egalement, image et son s'avèrent de très bonne qualité. En revanche, ne vous attendez à aucun bonus: il n'y en a tout bonnement pas.