Chronique Anime - Détective Conan - Film 6 : Le Fantôme de Baker Street- Actus manga
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Dvd Chronique Anime - Détective Conan - Film 6 : Le Fantôme de Baker Street

Dimanche, 19 Avril 2020 à 17h00 - Source :Chronique Animation

Poursuivant sa formule consistant en un film annuel, Détective Conan voit son sixième long-métrage atteindre les salles obscures du Japon le 20 avril 2002, avec pour titre Baker Street no Bôrei. Sans grande surprise, Kenji Kodama reprend le flambeau en tant que réalisateur, mais une originalité vient cette fois marquer l'écriture du scénario. Ce n'est pas Kazunari Kôchi qui se charge de l'intrigue du long-métrage, mais Hisashi Nozawa, un écrivain japonais spécialisé dans le roman policier, dont les œuvres lui vaudront plusieurs prix littéraires comme le Prix Kuniko Mukôda et le Prix Edogawa Ranpo. Malheureusement, l'homme de lettres mettra fin à ses jours un peu plus de deux ans après la sortie du film, en 2004.

En France, il convient de noter que le métrage est le premier inédit à paraître depuis 2009, année de sortie de « Décompte aux cieux » aux éditions Kazé. En même temps que les 5 premiers films et les 10 suivants, ce sixième opus paraît dans une édition combo DVD et Blu-ray début 2020, chez l'éditeur Black Box, et sous le titre « Le Fantôme de Baker Street ».


Entre polar et jeu-vidéo en VR

L'implication de Hisashi Nozawa dans l'écriture du film laissait forcément présager une histoire qui sort de l'ordinaire, par rapport à ce qu'on avait pu connaître précédemment dans la saga. Le métrage débute lorsqu'un enfant surdoué, Hiroki, achève le programme qu'il préparait : L'Arche de Noé. Une œuvre qu'il met au point juste avant de mettre fin à ses jours, sautant du building où il travaillait.

Bien plus tard, Conan, Ran, Kogoro et les Detective Boys sont conviés à la soirée de lancement de Cocoon, un jeu-vidéo en Réalité Virtuelle plongeant le joueur dans différents environnement, dont le Londres du XIXe siècle, connaissant alors les horreurs de Jack l’Éventreur. Une invitation qui se fait grâce à Sonoko, dont le père a participé à l'élaboration du soft... mais pas seulement. Yusaku Kudo, le père de Shinichi, ainsi que le professeur Agasa sont de la partie, tous deux ayant contribué à l'aspect scénaristique des aventures de Cocoon. Mais au cours de la soirée, et tandis que les enfants de l'élite du pays sont sur le point de pouvoir tester le jeu en avant-première, un drame survient : Tadaaki Kashimura, un autre acteur du développement de Cocoon, est assassiné par Thomas Schindler, gérant d'une puissante entreprise. Mais ça, personne ne le sait... Pourtant, avant de mourir, Kashimura a laissé un message : les lettre JTR, renvoyant à Jack The Ripper. Pour Conan, aucun doute : il va devoir lui aussi tester Cocoon en choisissant le niveau du Londres du XIXe siècle, afin de trouver un indice qui permettrait de résoudre l'affaire. Mais alors que la partie démarre, un autre drame survient : L'Arche de Noé, IA conçue par Hiroki avant de mourir, se met en marche et prend le contrôle du jeu, imposant un chantage de taille. Alors, si aucun des enfants ne termine le jeu, L'Arche de Noé tuera les participants. C'est à la fois une enquête et un jeu de la mort qui démarre pour Conan...


Un hommage à Sherlock Holmes

Dès son premier chapitre (ou son premier épisode), Détective Conan fait référence à l’œuvre d'Arthur Conan Doyle, par son protagoniste notamment, et un Shinichi qui voue un amour inconditionnel pour Holmes. Avec ce concept de jeu-vidéo en Réalité Virtuel, l'occasion rêvée de justifier une immersion du héros dans l'univers de Doyle ne pouvait être ignorée. Alors, Le Fantôme de Baker Street ne rate jamais l'occasion d'imprégner la nouvelle aventure de Conan du folklore de Sherlock Holmes, et ne s'en cache pas. Outre un plaisir coupable de marier les deux univers, les références sont à chaque fois expliquées, comme pour donner aussi l'envie au spectateur de découvrir toute la richesse des romans de Conan Doyle. Outre le respect des parallèles entre Conan Edogawa et Sherlock Holmes, sans doute y a-t-il un plaisir de fan derrière la démarche, et un hommage fait dans le plus grand respect, justifiant l'implication du romancier Hisashi Nozawa dans l'écriture du scénario.


Un jeu-vidéo mortel avant Sword Art Online

Le concept de jeu mortel a été fortement popularisé au début des années 2010 avec la première saison de l'anime Sword Art Online, adaptée du light-novel de Reki Kawahara. Mais avant ça, en avril 2002, une autre œuvre d'animation jouait de l'aspect « jeu dont on ne peut parti » : .hack//Sign, tiré de la foisonnante licence cross-media .hack. Fruit du hasard, c'est durant ce même printemps que le sixième film de Détective Conan a vu le jour, preuve que naissait une véritable tendance à associer les univers virtuels et les scénarios à suspense, ce bien avant les aventures de Kirito qui ont remis un style aux goûts du jour plus que l'inventer.

Alors, c'est Conan, Ran et les Detective Boys, parmi d'autres, qui se retrouvent plongés dans un jeu où ils risquent leur vie. Une nuance est toutefois faite : les jeunes joueurs mourront seulement si aucun d'entre-eux ne parvient à terminer Cocoon. Une double pression repose donc sur les épaules du jeune détective, à savoir celle de la réussite de l'enquête autour de la mort de Kashimura, et la survie de tous ces enfants et de Ran. Et il faut reconnaître qu'à l'échelle de Détective Conan, le choix scénaristique est plutôt audacieux. Jusqu'ici, la série restait très terre à terre, reposant sur des scénarios plausibles d'assassinats ou de moments spectaculaires, et ne puisait que rarement dans une certaine fantaisie. Un cap est alors franchi, dans les films du moins, mais c'est aussi ce qui donne au Fantôme de Baker Street cette aura si particulière, un peu improbable, tout en lui permettant de réaliser quelques fantasmes que nous avons évoqués précédemment.

La formule aboutit alors à un film globalement très efficace. L'intrigue jongle alors sur le point de vue du monde réel, où le charismatique Yusaku fera sa propre enquête avec les indices qui sont sous son nez, tandis que Conan se chargera de l'aspect virtuel, et arpentera donc un Londres victorien pour une ambiance datée et angoissante qui procure à l'ensemble un charme indéniable (outre le fait d'une délicieuse confrontation entre notre héros et le professeur Moriarty, mais nous n'en dirons pas plus...). Un cocktail original au sein des films, mais savoureux si on accepte le parti-pris proposé.


Une certaine critique de la société

Un autre point qui marque l'implication d'un scénariste différent, c'est sans aucun doute la dimension sociale de ce sixième film. Outre le dramatique événement de début d'histoire qui met immédiatement dans le bain (un enfant se suicidant en guise de lancement du film), le scénario ne prend pas longtemps à pointer sur doit la domination des élites, presque généalogique, les conquérants de demain étant actuellement des enfants emplis de l'arrogance de leurs génitrices et géniteurs. C'est assez incisif dans une licence comme Détective Conan, mais le propos a le mérite d'être là, avec toutefois un développement et une ouverture plus douce autour de l'inné et de l'acquis, cette mauvaise graine n'étant pas vouée à être totalement néfaste si elle y met du sien. Par certaines tirades, on se demande si Hisashi Nozawa n'était pas un adepte de la lutte des classes. Néanmoins, le film ne prend jamais l'allure d'un pamphlet sociétal, la thématique étant surtout là pour donner un petit fond supplémentaire à l'histoire.


Et puisque nous évoquons le scénariste de écrivain, difficile de ne pas faire un certain parallèle entre Hisashi Nozawa et Yusaku Kudo. Tous deux sont écrivains, aussi le romancier de notre réalité, aujourd'hui décédé malheureusement, a pensé à utiliser son personnage pour faire un écho. Car comme Yusaku a mis de son image dans Cocoon, Hisashi Nozawa a sélectionné le personnage pour le représenter. Lui qui est adepte des romans policiers, il prend alors part à l'affaire en même temps que Conan, tout en établissant un rapport presque mystique avec le protagoniste par la complicité distante entre Yusaku et Conan. Une réflexion peut être exagérée, mais qui peut soulever le sens de l'implication du romancier dans le processus scénaristique du long-métrage.


Fin de partie

Par son concept, assez éloigné des enquêtes habituelles présentes dans Détective Conan, La Fantôme de Baker Street pourra déplaire, ou bien laisser de marbre. Reste que le parti-pris est audacieux, et confère à ce sixième long-métrage une ambiance toute particulière. Chacun sera évidemment juge, mais il y a de quoi apprécier l'ambition de la démarche, notamment avec l'implication d'un romancier sur le scénario, afin de lui donner une petite profondeur inédite, tout en poussant habilement certains hommages très bien trouvés à l’œuvre d'Arthur Conan Doyle. Ça passera ou ça cassera selon le spectateur, mais ce sixième film laissera difficilement indifférent.

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