Manga Rencontre avec Rossella Sergi (Deep Scar)
Cette année encore, les éditions H2T se sont offerte un stand lors de Japan Expo, l'occasion pour l'éditeur de mettre en avant certains de ses auteurs. Cette année, pas moins de quatre artistes étaient présent dont Rossella Sergi, mangaka italienne que nous avons découvert en juin dernier avec le premier tome de Deep Scar...
L'autrice a accepté de jouer au jeu de l'interview pour nous parler de son travail et des messages que véhicule son manga, le tout appuyé par la présence de Mahmoud Larguem, directeur éditorial des éditions H2T
Bonjour Rossella, pouvez-vous vous présenter et nous dire comment vous en êtes venue au manga en tant qu'autrice ?
Rossella Sergi : Je suis Rossella Sergi, l'autrice de Deep Scar. Ma passion pour le dessin me vient depuis petite, c'est à dire depuis l'école élémentaire. Pendant cette période, je regardais les dessins animés qui passaient à la télévision. Ils m'ont donné l'envie de raconter des histoires et faire passer des messages.
Par exemple, quels dessins animés vous ont influencée ?
Rossella Sergi : Quand j'étais petite, il y avait Kodomo no Omocha, anime renommé Rossana en Italie. Une autre série d'animation qui m'a marquée est Marmalade Boy, une œuvre qui raconte différentes histoires de cœur.
Comment a eu lieu la prise de contact avec les éditions françaises H2T ? A l'instar de Redjet, l'auteur de Space Duck RG, est-ce Mahmoud Larguem, le directeur éditorial, qui est venu vers vous ?
Mahmoud Larguem : Tout à fait, c'est moi qui l'ai contactée personnellement. J'avais vu les travaux de Rossella sur les réseaux sociaux, notamment les planches et la couverture d'une de ses bandes-dessinées qui m'intéressait : Impossibile Amarsi ("Impossible de s'aimer"). Quand je suis venu vers elle pour lui proposer une parution française, elle m'a répondu négativement car la série était déjà publiée en Italie, chez un éditeur nommé Kasaobake. Mais elle nous a proposé un autre projet en parallèle : Deep Scar.
Pouvez-vous nous parler d'Impossibile Amarsi, série inédite en France ?
Rossella Sergi : J'ai débuté cette série quand j'avais 20 ans, dans une revue en ligne intitulée Mangakukan. La publication était d'un chapitre tous les deux mois. J'ai ensuite été contactée par les éditions Kasaobake pour publier la série au format relié.
Impossibile Amarsi se déroule à Turin, comme Deep Scar. En route pour un examen universitaire, dans le métro, l'héroïne se prend la tête avec un type qui la met en retard. En arrivant sur place, elle s'aperçoit que l'individu en question est son futur professeur, ce qui créera des situations particulières entre eux et justifie le titre de l'histoire, celui d'un amour impossible entre un prof et son élève.
Parlons maintenant de Deep Scar, le récit d'une jeune femme issue de la campagne qui emménage à Turin. Comment vous est venue l'idée de cette histoire ? Est-ce le reflet d'une expérience personnelle ?
Rossella Sergi : Dans cette histoire, c'est l'idée des grands changements qui est évoquée, plus précisémentde l'indépendance et de la possibilité de se détacher de son cercle familial. C'est un sujet qui me semble intéressant car il est universel : nous sommes tous amenés, à un moment donné, à prendre notre indépendance.
Il y a aussi une part d'expérience personnelle puisque j'ai quitté ma campagne pour venir à Turin. Il faut savoir que j'ai une sœur jumelle dont j'étais très proche, tout comme j'étais proche de ma famille. Ce fut une véritable épreuve de me détacher d'eux et de changer de ville, mais aussi d'apprendre à faire les choses par moi-même et de m'assumer en tant qu'individu.
Chose amusante dans le scénario : cette histoire de colocation avec une jeune femme au caractère totalement opposé rappelle le manga Nana d'Ai Yazawa dans la forme. Est-ce une référence voulue ou un total hasard scénaristique ?
Rossella Sergi : Pas du tout, il se trouve que je n'ai jamais lu Nana, même si j'en ai entendu parler. C'est une sorte de coïncidence. (rires)
Le détachement familial est donc une thématique phare de Deep Scar. Selon vous, quels sont les autres sujets importants développées dans votre récit ?
Rossella Sergi : Je cherche vraiment à pousser le développement psychologique de Sofia à travers sa transformation. Je veux voir jusqu'où l'héroïne est capable d'aller, sans pour autant se renier elle-même. En faisant les efforts nécessaires et en se faisant violence, elle peut aussi changer son environnement. Ça questionne alors sur notre possibilité à influencer notre entourage par notre force de caractère ou, au contraire, à la contrainte de nous moduler à lui.
Les parents et le petit-ami de Sofia sont représentés comme toxiques... Peut-on aussi s'attendre à ce genre de développement les concernant ? Sofia aura-t-elle une influence sur eux ?
Rossella Sergi : C'est difficile à expliquer puisque les réponses arriveront au fil de l'histoire... Mais il est vrai que les parents de Sofia et son environnement proche vont devoir admettre, à un moment donné, qu'elle n'est plus leur petite fille mais bien une individualité à part entière.
La série est prévue sur quatre volumes. Le plan du scénario a-t-il été prévu à l'avance ? Pouvez-vous nous en parler ?
Mahmoud Larguem : Avec l'accord de Rossella, je vais répondre pour elle. Elle sait parfaitement ce qui va se passer dans la série. Nous avons discuté ensemble du découpage de l'histoire et des événements relatés dans chaque tome. Pour ce qui est des futures péripéties, la tendance du volume 2 ira plutôt vers le rapport entre Sofia et Lorenzo, garçon qui semble être lié à son passé d'une certaine façon. Il y a toute une zone nébuleuse autour de lui que nous découvrirons, tandis que Sofia s'interrogera à ce sujet.
Justement, Lorenzo est un personnage mystérieux, un peu effrayant au début mais finalement bienveillant et touchant. Comment vous est venue l'idée de la création du personnage ?
Rossella Sergi : Lorenzo représente un archétype de personnage que j'ai beaucoup vu dans les livres qui m'ont inspirée, c'est à dire le jeune homme bienveillant mais qui a une grande zone d'ombre en lui. Je lis beaucoup de livres et de romans à la mode, aussi bien pour me tenir au courant que pour trouver des inspirations. Je cherche ainsi à construire une sorte de quintessence du personnage un peu bad-boy, c'est en tout cas comme ça que j'ai pensé Lorenzo.
Un autre élément remarquable de Deep Scar est sa représentation de la jeunesse et de sa liberté, par exemple à travers les soirées arrosées. Nous sommes loin du manga japonais, et ça correspond aussi à une réalité en France. Est-ce une démarche volontaire de conférer au titre une identité occidentale ?
Rossella Sergi : Oui, c'est une véritable volonté de me détacher de la manière dont les choses sont montrées dans les shôjo et jôsei japonais. Je met un point d'honneur à montrer la réalité telle qu'on la connait dans nos pays européens pour justement créer une forme d'originalité. Il y a aussi une certaine résonance avec ma vie personnelle car j'ai connu la vie étudiante. Ce côté vécu apporte peut-être un peu plus d'authenticité, et permet ainsi à Deep Scar de se démarquer des récits créés au Japon.
Une question davantage d'ordre éditoriale : Peut-on s'attendre à vous revoir publiée en France, aux éditions H2T, après Deep Scar ?
Mahmoud Larguem : Comme on en parlait un peu plus tôt, Rossella est actuellement publiée en Italie avec sa série Impossibile Amarsi, aux éditions Kasaobake. Elle est un peu notre enfant commun car nous "partageons" une autrice. (rires)
Cet échange n'est pas quelque chose auquel on pensait au départ, mais c'est une résultante éditoriale hyper intéressante car grâce à Rossella, il y a une véritable collaboration de chaque côté des Alpes. C'est aussi une aventure humaine passionnante à vivre. Ainsi, dans un premier temps, c'est Deep Scar qui va aller au bout de sa publication, sachant que Rossella a mis en pause Impossibile Amarsi pour se consacrer à cette série. Dans un deuxième temps, la série reprendra, sachant qu'un seul tome est paru actuellement. Elle devrait ensuite être publiée aux éditions H2T, on sera alors entre la création originale et le licencing. La série appartient aux éditions Kasaobake mais comme nous collaborons déjà autour de Rossella, nous avons la volonté de nous impliquer. Ça fait partie de notre processus de création, c'est dans notre ADN. De la même manière, Deep Scar sortira en Italie en fin d'année. En tout cas, nous aimerions travailler le plus longtemps possible ensemble, même si nous sommes focalisés sur l'instant présent. Pour ce qui arrive au-delà d'Impossibile Amarsi, je laisse Rossella répondre.
Rossella Sergi : Pour l'instant, je suis impliquée à 100% sur Deep Scar, avant de reprendre Impossible Amarsi. J'ai donc deux projet en cours, mon agenda est un peu chargé... (rires).
Je continuerai sur cette route et je souhaite aussi évoluer aux côtés des éditions H2T. J'aimerais que mes histoires soient connues du grand public et je ne compte pas abandonner la voie que j'ai emprunté.
Remerciements à Rossella Sergi et à Mahmoud Larguem, son éditeur, pour la traduction.
L'autrice a accepté de jouer au jeu de l'interview pour nous parler de son travail et des messages que véhicule son manga, le tout appuyé par la présence de Mahmoud Larguem, directeur éditorial des éditions H2T
Bonjour Rossella, pouvez-vous vous présenter et nous dire comment vous en êtes venue au manga en tant qu'autrice ?
Rossella Sergi : Je suis Rossella Sergi, l'autrice de Deep Scar. Ma passion pour le dessin me vient depuis petite, c'est à dire depuis l'école élémentaire. Pendant cette période, je regardais les dessins animés qui passaient à la télévision. Ils m'ont donné l'envie de raconter des histoires et faire passer des messages.
Par exemple, quels dessins animés vous ont influencée ?
Rossella Sergi : Quand j'étais petite, il y avait Kodomo no Omocha, anime renommé Rossana en Italie. Une autre série d'animation qui m'a marquée est Marmalade Boy, une œuvre qui raconte différentes histoires de cœur.
Comment a eu lieu la prise de contact avec les éditions françaises H2T ? A l'instar de Redjet, l'auteur de Space Duck RG, est-ce Mahmoud Larguem, le directeur éditorial, qui est venu vers vous ?
Mahmoud Larguem : Tout à fait, c'est moi qui l'ai contactée personnellement. J'avais vu les travaux de Rossella sur les réseaux sociaux, notamment les planches et la couverture d'une de ses bandes-dessinées qui m'intéressait : Impossibile Amarsi ("Impossible de s'aimer"). Quand je suis venu vers elle pour lui proposer une parution française, elle m'a répondu négativement car la série était déjà publiée en Italie, chez un éditeur nommé Kasaobake. Mais elle nous a proposé un autre projet en parallèle : Deep Scar.
Pouvez-vous nous parler d'Impossibile Amarsi, série inédite en France ?
Rossella Sergi : J'ai débuté cette série quand j'avais 20 ans, dans une revue en ligne intitulée Mangakukan. La publication était d'un chapitre tous les deux mois. J'ai ensuite été contactée par les éditions Kasaobake pour publier la série au format relié.
Impossibile Amarsi se déroule à Turin, comme Deep Scar. En route pour un examen universitaire, dans le métro, l'héroïne se prend la tête avec un type qui la met en retard. En arrivant sur place, elle s'aperçoit que l'individu en question est son futur professeur, ce qui créera des situations particulières entre eux et justifie le titre de l'histoire, celui d'un amour impossible entre un prof et son élève.
Parlons maintenant de Deep Scar, le récit d'une jeune femme issue de la campagne qui emménage à Turin. Comment vous est venue l'idée de cette histoire ? Est-ce le reflet d'une expérience personnelle ?
Rossella Sergi : Dans cette histoire, c'est l'idée des grands changements qui est évoquée, plus précisémentde l'indépendance et de la possibilité de se détacher de son cercle familial. C'est un sujet qui me semble intéressant car il est universel : nous sommes tous amenés, à un moment donné, à prendre notre indépendance.
Il y a aussi une part d'expérience personnelle puisque j'ai quitté ma campagne pour venir à Turin. Il faut savoir que j'ai une sœur jumelle dont j'étais très proche, tout comme j'étais proche de ma famille. Ce fut une véritable épreuve de me détacher d'eux et de changer de ville, mais aussi d'apprendre à faire les choses par moi-même et de m'assumer en tant qu'individu.
Chose amusante dans le scénario : cette histoire de colocation avec une jeune femme au caractère totalement opposé rappelle le manga Nana d'Ai Yazawa dans la forme. Est-ce une référence voulue ou un total hasard scénaristique ?
Rossella Sergi : Pas du tout, il se trouve que je n'ai jamais lu Nana, même si j'en ai entendu parler. C'est une sorte de coïncidence. (rires)
Le détachement familial est donc une thématique phare de Deep Scar. Selon vous, quels sont les autres sujets importants développées dans votre récit ?
Rossella Sergi : Je cherche vraiment à pousser le développement psychologique de Sofia à travers sa transformation. Je veux voir jusqu'où l'héroïne est capable d'aller, sans pour autant se renier elle-même. En faisant les efforts nécessaires et en se faisant violence, elle peut aussi changer son environnement. Ça questionne alors sur notre possibilité à influencer notre entourage par notre force de caractère ou, au contraire, à la contrainte de nous moduler à lui.
Les parents et le petit-ami de Sofia sont représentés comme toxiques... Peut-on aussi s'attendre à ce genre de développement les concernant ? Sofia aura-t-elle une influence sur eux ?
Rossella Sergi : C'est difficile à expliquer puisque les réponses arriveront au fil de l'histoire... Mais il est vrai que les parents de Sofia et son environnement proche vont devoir admettre, à un moment donné, qu'elle n'est plus leur petite fille mais bien une individualité à part entière.
La série est prévue sur quatre volumes. Le plan du scénario a-t-il été prévu à l'avance ? Pouvez-vous nous en parler ?
Mahmoud Larguem : Avec l'accord de Rossella, je vais répondre pour elle. Elle sait parfaitement ce qui va se passer dans la série. Nous avons discuté ensemble du découpage de l'histoire et des événements relatés dans chaque tome. Pour ce qui est des futures péripéties, la tendance du volume 2 ira plutôt vers le rapport entre Sofia et Lorenzo, garçon qui semble être lié à son passé d'une certaine façon. Il y a toute une zone nébuleuse autour de lui que nous découvrirons, tandis que Sofia s'interrogera à ce sujet.
Justement, Lorenzo est un personnage mystérieux, un peu effrayant au début mais finalement bienveillant et touchant. Comment vous est venue l'idée de la création du personnage ?
Rossella Sergi : Lorenzo représente un archétype de personnage que j'ai beaucoup vu dans les livres qui m'ont inspirée, c'est à dire le jeune homme bienveillant mais qui a une grande zone d'ombre en lui. Je lis beaucoup de livres et de romans à la mode, aussi bien pour me tenir au courant que pour trouver des inspirations. Je cherche ainsi à construire une sorte de quintessence du personnage un peu bad-boy, c'est en tout cas comme ça que j'ai pensé Lorenzo.
Un autre élément remarquable de Deep Scar est sa représentation de la jeunesse et de sa liberté, par exemple à travers les soirées arrosées. Nous sommes loin du manga japonais, et ça correspond aussi à une réalité en France. Est-ce une démarche volontaire de conférer au titre une identité occidentale ?
Rossella Sergi : Oui, c'est une véritable volonté de me détacher de la manière dont les choses sont montrées dans les shôjo et jôsei japonais. Je met un point d'honneur à montrer la réalité telle qu'on la connait dans nos pays européens pour justement créer une forme d'originalité. Il y a aussi une certaine résonance avec ma vie personnelle car j'ai connu la vie étudiante. Ce côté vécu apporte peut-être un peu plus d'authenticité, et permet ainsi à Deep Scar de se démarquer des récits créés au Japon.
Une question davantage d'ordre éditoriale : Peut-on s'attendre à vous revoir publiée en France, aux éditions H2T, après Deep Scar ?
Mahmoud Larguem : Comme on en parlait un peu plus tôt, Rossella est actuellement publiée en Italie avec sa série Impossibile Amarsi, aux éditions Kasaobake. Elle est un peu notre enfant commun car nous "partageons" une autrice. (rires)
Cet échange n'est pas quelque chose auquel on pensait au départ, mais c'est une résultante éditoriale hyper intéressante car grâce à Rossella, il y a une véritable collaboration de chaque côté des Alpes. C'est aussi une aventure humaine passionnante à vivre. Ainsi, dans un premier temps, c'est Deep Scar qui va aller au bout de sa publication, sachant que Rossella a mis en pause Impossibile Amarsi pour se consacrer à cette série. Dans un deuxième temps, la série reprendra, sachant qu'un seul tome est paru actuellement. Elle devrait ensuite être publiée aux éditions H2T, on sera alors entre la création originale et le licencing. La série appartient aux éditions Kasaobake mais comme nous collaborons déjà autour de Rossella, nous avons la volonté de nous impliquer. Ça fait partie de notre processus de création, c'est dans notre ADN. De la même manière, Deep Scar sortira en Italie en fin d'année. En tout cas, nous aimerions travailler le plus longtemps possible ensemble, même si nous sommes focalisés sur l'instant présent. Pour ce qui arrive au-delà d'Impossibile Amarsi, je laisse Rossella répondre.
Rossella Sergi : Pour l'instant, je suis impliquée à 100% sur Deep Scar, avant de reprendre Impossible Amarsi. J'ai donc deux projet en cours, mon agenda est un peu chargé... (rires).
Je continuerai sur cette route et je souhaite aussi évoluer aux côtés des éditions H2T. J'aimerais que mes histoires soient connues du grand public et je ne compte pas abandonner la voie que j'ai emprunté.
Remerciements à Rossella Sergi et à Mahmoud Larguem, son éditeur, pour la traduction.