Rencontre avec Kachou Hashimoto pour le manga Cagaster- Actus manga
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Manga Rencontre avec Kachou Hashimoto pour le manga Cagaster

Mardi, 15 Juillet 2014 à 18h30

Invitée des éditions Glénat à Japan Expo, la jeune et souriante Kachou Hashimoto, présente pour présenter sa série Cagaster, n'eut malheureusement pas de chance en se brisant le poignet pendant le salon. Mais avant cela, elle eut malgré tout le temps de tenir une conférence publique, sur laquelle nous reviendrons plus tard, et put accorder quelques interviews, dont la nôtre, que nous vous proposons de découvrir aujourd'hui.
  
Le choix de se passer d'un éditeur au Japon, l'élaboration de l'univers de Cagaster, les grands thèmes de la séries, les influences... Autant de sujets que nous avons pu aborder avec une artiste bavarde et originale !
   
             
       
Manga-News : Kachou Hashimoto, merci beaucoup d'avoir accepté de répondre à nos questions. Comment avez-vous été repérée par Glénat ? Comment s'est déroulée la collaboration pour arriver à l'édition française de Cagaster ?
Kachou Hashimoto : Fin 2012, j'ai reçu un mail des éditions Glénat me proposant une édition française de la série. Etant donné qu'à cette époque les éditions Glénat s'apprêtaient à venir au Japon, ils m'ont proposé de venir directement me rencontrer. J'ai accepté, nous nous sommes rencontrés en vrai et l'entrevue s'est bien passée. Ensuite, nous avons continué à correspondre par mail, et à quelques reprises de vive voix quand l'éditeur était de passage au Japon. Ce sont ces différents échanges qui, petit à petit, nous ont permis de peaufiner ce qui allait être la version française de Cagaster.
    
    
Au Japon, pourquoi avez-vous fait le choix de vous  passer d'un éditeur ? Cela résulte-t-il d'une mauvaise expérience avec un éditeur ? De demandes trop restrictives ? 
Il y avait plusieurs raisons, dont une liée au fait que je ne m'entendais plus très bien avec l'éditeur pour lequel je travaillais à cette époque.
Mais avant ça, il y avait surtout en moi l'envie d'effectuer un retour aux sources, en dessinant une œuvre qui me plaise totalement, loin des considérations professionnelles.
   
   
Peut-être ce choix réside-t-il aussi dans une envie de mêler librement, sans restrictions, l'action et l'univers assez adultes de la série à des choses plus féminines (notamment avec la douce Ilie) ? Etait-ce un moyen pour vous de vous affranchir des codes habituels du manga ?
Oui, c'est exactement ça. Me passer d'un éditeur m'a permis de m'affranchir de toutes les limites imposées par celui-ci, et de mêler pleinement ce que je voulais sans avoir le moindre frein...
             
Vous fixiez-vous des dates limites pour la mise en ligne des chapitres ?
Oui, je m'étais fixé quelques limites, notamment essayer de publier mes planches une fois par mois. Par contre, quand j'avais d'autres travaux qui arrivaient en parallèle, j'avais tendance à privilégier le côté professionnel, et à étirer un peu plus la publication de Cagaster.
  
   
Un choix d'autant plus logique qu'il me semble que Cagaster était publié gratuitement et ne vous rapportait donc rien financièrement ?
Effectivement. Et puis du côté des travaux professionnels qui étaient rémunérés, il y avait des dates limites, et si je ne m'étais pas appliquée à rendre ces travaux dans les temps, ça aurait mis mon commanditaire dans l'embarras !
    
     
Les lecteurs sont-ils facilement arrivés sur la série en terme d'affluence ?
Au début ce n'était pas facile, car il n'y avait aucun réseau social type Twitter ou Facebook pour diffuser largement la série. C'est donc surtout par le bouche à oreille que la série s'est fait connaître. Certains lecteurs racontaient sur leur blog qu'ils avaient aimé la série, et petit à petit cela a amené de plus en plus de nouveaux lecteurs.
   
    
Pensez-vous que cette façon indépendante de publier peut ouvrir une nouvelle voie pour l'avenir du manga, à l'heure où le système des magazines de prépublication tend à régresser avec des tirages plus faibles d'année en année ?
Personnellement je ne voudrais pas que les magazines disparaissent et que tout devienne dématérialisé, car j'adore lire sur papier, j'aime la sensation du toucher, et j'ai l'impression de retenir plus facilement ce que je lis sur papier.
Mon idéal est que les deux supports continuent d'exister, pour avoir à la fois des titres qui se lisent mieux sur papier, et des titres qui se lisent plus facilement sur internet. Je souhaite que le papier et internet coexistent en ayant de bonnes influences l'un sur l'autre.
   
                
Le tome 1 de Cagaster met en place de façon habile un univers assez complexe, apocalyptique, avec différents secteurs, des cités... Comment avez-vous imaginé cet univers ? Par quelles étapes êtes-vous passée ? 
Déjà, merci beaucoup pour le compliment (rires) ! Je pense que mon univers doit beaucoup aux jeux vidéo que j'ai faits. Par exemple, dans les RPG les villes fonctionnent un peu comme ça, avec un système de cités et de secteurs aux caractéristiques spécifiques et souvent séparés par des lieux plus désertiques, et c'est en me demandant comment pouvait marcher la structure d'une société dans un jeu vidéo que j'en suis arrivée à ce résultat.
  
   
On a dans Cagaster des lieux qui semblent assez différents : des déserts, des canyons, et des cités aux accents arabiques, aussi des noms arabiques comme Qasim, les cités marchandes qui ressemblent à des souks arabes... Vous êtes-vous documentée pour retranscrire ce style arabique ?
Merci d'avoir remarqué cela. J'ai effectivement voulu retranscrire une ambiance arabique. Malheureusement, je n'ai pas pu me rendre moi-même dans ces pays, mais j'ai acheté beaucoup de livres dessus : des livres de photos, des carnets de voyage... J'ai également regardé plusieurs émissions télévisées, et je me suis inspirée de toute cette documentation pour créer l'univers de Cagaster.
  
   
Il y a également un gros travail sur les conséquences collatérales de cet univers : inégalités sociales, pauvreté, bidonvilles jonchés d'orphelins livrés à eux-mêmes... On devine facilement que c'est un aspect qui vous tenait à cœur...
L'univers de Cagaster est très sombre, tout le monde ne vit pas dans la joie, et j'ai alors souhaité montrer, dans ce monde apocalyptique assez dur et triste, comment les personnages essaient de trouver du bonheur dans leur vie. Comment surmonter tout ça, comment trouver des aspects positifs dans ce quotidien difficile, c'est quelque chose que j'ai voulu mettre beaucoup en avant. Bien sûr, il y a beaucoup d'autres aspects que j'ai voulu aborder, mais celui-ci est effectivement l'un des grands thèmes qui me tenaient le plus à cœur.
   
   
Et ça se ressent beaucoup à travers le personnage d'Ilie, la touche féminine de la série. Elle reste pure mais a du caractère, et donne toujours le meilleur d'elle-même, surtout quand elle travaille au bar, si bien qu'elle égaye beaucoup le quotidien de son entourage...
Ilie est un personnage qui vient de l'extérieur. Elle n'est pas originaire de la ville, vient d'un endroit plus reculé, et découvre alors avec son innocence caractéristique l'univers plus dur de la ville. Du coup, elle apporte effectivement beaucoup de gaieté et de la fraîcheur, et je pense également qu'elle représente un peu le regard des lecteurs qui découvrent avec elle la ville et le monde qui l'entoure.
Dans le bar, j'ai voulu faire en sorte que, par sa présence, elle devienne en quelque sorte l'idole des lieux.

       
  
    
Elle rappelle un peu un personnage comme Cheeta dans Le Château dans le Ciel : son caractère pur et déterminé attendrit le cœur de son entourage, y compris celui des plus « sales gueules » du bar (et des pirates en ce qui concerne Cheeta dans le film de Ghibli).
Oui ! J'adore les œuvres du studio Ghibli, et je pense avoir connu énormément d'influences de ces films, volontairement ou involontairement !
    
   
Puisqu'on parle des influences de Ghibli, on note aussi vers la fin du tome 1 un insecte qui ressemble un peu aux Omus de Nausicaä de la Vallée du Vent !
C'est amusant que vous disiez cela, car c'est quelque chose que je me suis dit après avoir dessiné ce passage ! Je ne suis pas allée copier Nausicaä, mais les films du studio Ghibli sont tellement présents en moi que quand j'ai imaginé certains insectes, je pense qu'ils m'ont influencé involontairement. Les films de Ghibli sont en moi !
   
   
Et y a-t-il d'autres grandes séries, des films d'animation, des studios qui vous ont inspirée ?
En fait, j'adore les animes s'inspirant de chefs d'oeuvre de la littérature jeunesse, comme Nadia qui s'inspire des romans de Jules Verne, Princesse Sarah, Rémi sans famille... Je suis également très fan des œuvres du studio Gainax, en tête Nadia que j'ai déjà cité, mais aussi Evangelion.
   
    
Puisqu'on parle de la Gainax, le personnage du barman Mario dans votre série rappelle beaucoup Leeron de Gurren Lagann...
Oh (rires) ! En fait, de mémoire, je crois que j'ai commencé à dessiner Cagaster un petit peu avant l'arrivée de Gurren Lagann, mais il est vrai que le personnage du travesti au Japon est une figure que l'on croise souvent et qui est souvent représentée ainsi, surtout chez la Gainax.
   
    
Quels outils utilisez-vous pour dessiner ?
Je dessine en semi-traditionnel et semi-digital. 
Je commence par dessiner sur papier avec le traditionnel J-pen, puis je scanne mes pages pour poser les trames par ordinateur.
Au moment d'envoyer les fichiers à l'imprimeur c'est en version digitale, mais je commence toujours par dessiner sur papier.
  
   
Qu'est-ce qui était le plus dur à dessiner ?
Le plus difficile pour moi était de dessiner le visage de Kidow. Mais le plus compliqué était le design des insectes, parce qu'il fallait dessiner beaucoup de traits et que ça prenait donc beaucoup de temps.

       
 
  
Justement, les insectes promettent d'avoir des designs travaillés. Comment avez-vous procédé pour élaborer leur design ?
Au niveau du design, ce ne sont pas à 100% des insectes, mais plutôt un mélange entre humain et insecte. Par exemple, au niveau du menton j'ai laissé des os humains. Ou au niveau des pattes, au lieu d'en mettre six, j'ai préféré en mettre quatre à la façon des insectes et deux repliées au milieu.
   
On sait que vous vous êtes essayée à plusieurs types d'histoires : récit apocalyptique comme Cagaster, biographie, pachinko... Quels autres styles aimeriez-vous essayer ?
J'aimerais continuer dans le domaine du divertissement, dans des œuvres d'aventure dans la continuité de Cagaster. Mais peu-être des œuvres un peu moins sombres. Cagaster n'est pas forcément une œuvre ultra sombre, mais ça reste un univers dur qui peut rebuter certaines personnes, donc j'aimerais désormais faire une œuvre plus accessible à tout un chacun.
    
   
De plus, les séries biographiques et sur le pachinko que vous avez faites étaient des travaux de commande. Vous aimeriez éviter ce genre de travaux à l'avenir ?
En fait, si j'avais deux corps j'aimerais pouvoir faire les deux, car dans les œuvres de commandes il y a des biographies historiques que j'ai trouvées très amusantes et intéressantes.
Mais si je dois faire un choix, je pencherais sans aucun doute pour les histoires originales.
   
   
A votre avis, quels sont actuellement les ingrédients d'un shônen original, d'un bon shônen, à une époque où ce genre est saturé ?
Je pense que c'est ce que tous les éditeurs japonais sont en train de se demander en ce moment (rires). 
Personnellement, je pense que plutôt que de chercher absolument une recette qui marche et de rechercher le succès, il faut plutôt faire confiance à ce que l'on ressent, dessiner ce que l'on a envie de dessiner, et peut-être que dans le flot de nouvelle œuvres il y en aura une qui marchera, parce que ce qui est important est de faire partager ce que l'on ressent, de faire plaisir au lecteur tout en se faisant plaisir.
  
     
Merci beaucoup pour cet entretien.
Merci à vous !
   
  
Remerciements au staff de Japan Expo, à Fanny Blanchard pour la mise en place de l'interview, à Satoko Inaba pour la qualité de sa traduction, et à Kachou Hashimoto pour sa gentillesse, et à qui nous souhaitons un bon rétablissement !
    


commentaires

YuuriRei

De YuuriRei [256 Pts], le 28 Janvier 2015 à 15h08

En premier lieu, je ne pensais pas l'acheter,  jai déjà enormement de series en cours... mais lademarche de cette auteur me plaît,  je pense que je jetterais un oeil a Cagaster.

Koiwai

De Koiwai [12669 Pts], le 28 Juillet 2014 à 23h09

Une jeune auteure très bavarde et très intéressante, en plus d'être sympathique. Elle parlait avec beaucoup d'entrain de sa série et elle mérite clairement qu'on la suive !

LadyKya

De LadyKya [1310 Pts], le 22 Juillet 2014 à 17h06

Interview très interréssante!!! Bon rétablissement à l'auteure!!

fannymelody

De fannymelody [463 Pts], le 16 Juillet 2014 à 10h40

j'aime bien son avis sur l'avenir du papier et sur les shonen. elle est trés sympathique. elle a fait une trés jolie dédicace!

DjinnGenie

De DjinnGenie [220 Pts], le 16 Juillet 2014 à 08h20

Une mangaka très sympathique, et très humble dans ses propos comme dans sa démarche. Cela donne envie de découvrir la série.

erotaku

De erotaku, le 15 Juillet 2014 à 20h09

ah je savais pas que c'etait une femme qui est l'auteur de ce manga

Nabouro

De Nabouro [687 Pts], le 15 Juillet 2014 à 19h40

Sympa mais elle n'a pas de l'air de sourire sur la photo Mdr :).

winipouh

De winipouh [2147 Pts], le 15 Juillet 2014 à 19h24

oui tres jolie dedicace

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