Rencontre avec Cyril Marchiol de Tsume- Actus manga
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Produits dérivés Rencontre avec Cyril Marchiol de Tsume

Lundi, 01 Mai 2017 à 19h00 - Source :Rubrique interviews

Les 10 et 11 septembre derniers se sont déroulés les Tsume Fans Days, événement du fabricant de figurines luxembourgeois qui présente ses produits et ses nouveautés sur fonds d'activités conviviales. A cette occasion, nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec Cyril Marchiol, fondateur de Tsume. Véritable passionné, le chef d'entreprise est revenu sur les origines de Tsume et la conception des différents projets, en profitant aussi pour évoquer les développements de la marque.

Bonjour Cyril. Pour nos lecteurs qui ne connaitraient pas bien l’entreprise, peux-tu nous parler des origines de Tsume ?


Cyril Marchiol : Tsume, c’est l’histoire d’un fan qui avait l’envie d’évoluer dans ce milieu. Je suis surtout fan de jeux-vidéo, j’ai un frère ainé qui a 9 ans de plus que moi et c’est lui qui m’a entrainé dedans. Je n’ai jamais réussi à sortir de cette passion. J’ai commencé à travailler dans un magasin de jeux-vidéo et je savais qu’il y avait quelque chose à faire dans ce milieu, notamment parce que l’importation de produits dérivés devenait massive. Il y avait peut-être un coup à jouer, alors j’ai créé une première boîte d’import de produits dérivés qui s’appelait Kaini. J’ai réussi à obtenir les licences Art of War qui sortaient au Japon. J’avais un bon dossier, donc les japonais m’ont donné les droits de distribution pour l’Europe. A partir de là, je me suis demander si je ne pouvais pas, moi, faire mes figurines. Art of War se cassait la figure, c’était donc l’opportunité pour créer quelque chose de nouveau. Je voulais cibler le shônen car au Japon, il y a très peu de produits de ces séries au-dessus d’un certain prix car ce sont des titres ciblant les enfants. On ne trouve donc pas beaucoup de figurines dérivées de shônen à plus de 100 euros, il y avait donc quelque chose à faire, ne serait-ce sur le plan de la création. Pendant quelques années, j’ai perdu le fil des anime et Naruto est l’œuvre qui m’a permis de me replonger dedans. Naruto fut donc la première licence que j’ai cherché à obtenir, car je voulais travailler sur le projet Gaara.

Peux-tu nous parler du cheminement pour la réalisation d'un projet ? Comment se réalisé ton premier projet ?

Cyril Marchiol : Il faut d'abord une idée, qui viendra de moi ou de l'équipe. On procède ensuite à des sketchs sur papier ou ordinateur. Parmi ces sketchs, on décide du projet le plus intéressant à faire mais aussi le plus réalisable techniquement. On réfléchis par rapport au prix fixé aussi car parfois, on souhaite faire des créations très techniques mais le tarif ne passe pas forcément. Une fois le concept défini, nous prenons contact avec les ayant-droits avec un prototype sous les mains.

C'est ce qui s'est passé pour la figurine de Gaara à l'époque, les japonais se sont même montrés surpris par la réalisation et le fait d'avoir un prototype avant que les négociations aient lieu. Ils ont senti qu'ils pouvaient avoir confiance en nous. D'ailleurs, après avoir travaillé sur Naruto, je suis allé voir Toei Animation pour leur demander de travailler sur Saint Seiya. Ils m'ont fait confiance car ce marché était moins concurrentiel à l'époque. Au Japon, ce sont les sponsors comme Bandai ou Kotobukiya qui finance un anime, ils gardent donc tous les produits dérivés pour eux. Mais la résine, c'est une autre propriété et ça ouvre des portes. Du moins pour nous puisque les ayants-droits ferment ces portes à d'autres vu qu' nous sommes déjà là, ils pense qu'une seule boîte suffit. Si le marché est trop concurrentiel, les sponsors et ayant-droits ne pourront plus vendre leurs produits, leur politique est donc normale. C'est comme ça qu'on trouve toujours un certain équilibre.




Tu réalises donc tes projets en partenariat avec les studios d'anime plutôt que les éditeurs de mangas ?

Cyril Marchiol : Ça dépend. Pour Hokuto no Ken, on travaille avec le studio North Star qui gère les droits papiers, donc avec Tetsuo Hara qui redessine sur nos croquis. Les réalisations sur cette série sont longues car c'est l'auteur qui donne le feu vert. Mais le plus souvent, on travaille sur les anime. Shûeisha et Kôdansha nous donnent les droits de l'ensemble pour que ce soit plus intéressant pour tout le monde.

Pour revenir sur le cheminement d'un projet, que ce passe-t-il après réalisation du prototype et accord des ayants-droits ?

Cyril Marchiol : On lance la production. Les étapes de la conception qui suivent sont assez énormes mais je peux les citer. Il y a la sculpture numérique, l'impression 3D, reprise de la sculpture, découpe, préparation, ponçage, on retexture à la main, puis on peint... Il y a toute l'ingénierie pour que la découpe soit pensée intelligemment par rapport au moulage... Tout est hyper technique. Par exemple, les produits en vente chez Tsume auront tous plus de 100 pièces. Il faut donc bien réfléchir pour qu'aucune découpe ne soit visible. Il faut aussi que les matériaux utilisés soient astucieux, on ne peut donc pas mettre de la résine partout car celle-ci est cassante. On prendra donc aussi du PVC et du métal, parfois. On a aussi créé un système de LED sur Vegeta, mais c'est un système intelligent, c'est à dire que tu peut changer la façon donc le mécanisme va tourner en appuyant sur un bouton. Les LED sont dirigeables une à une et elles sont couplées à un système de son, c'est quelque chose que nous avons breveté. Les vitrines qui sont au Tsume Fan Days sont aussi disponibles à la vente, elles sont faites pour les figurines qui nécessitent des câbles... Tout est fait pour que l'acheteur puisse avoir ce qu'il faut chez lui.

Est-ce que tu travailles toujours avec les mêmes prestataires ?

Cyril Marchiol : Je travaille avec les mêmes usines, en Chine. Au départ, j'ai testé une dizaine d'usines mais je n'en ai gardé que trois, et je travaille énormément avec elles. Je donne toujours du travail aux unes et aux autres afin de garder le contact. Chaque usine aura son expérience sur certains domaines, on les utilisera donc à bon escient. Surtout, j'ai une équipe en Chine, Tsume China, j'ai donc des équipiers sur place qui vérifient la qualité. Si ça se passe mal pour la production, ça se passe mal pour eux aussi, car ils ont à y gagner en vendant un produit nickel.

As-tu peur des contrefaçons ?

Cyril Marchiol : De la copie, il y en a toujours eu et il y en aura toujours. Pour ce prix, les gens veulent une qualité authentique. Mais par rapport à la qualité, nous ne sommes pas chers. Si on vendait nos produits à 1500 ou 2000 euros et qu'on les trouvait à 300 sur internet, ça nous ferait du mal. Mais en vendant une figurine à 400 ou 500 euros, les acheteurs préfèreront mettre 150 euros de plus et avoir une vraie qualité. Il y aura toujours de la contrefaçon mais entre la technique et les certificats, c'est dur pour eux d'atteindre le même niveau que nous.

As-tu déjà vu des contrefaçons de figurines Tsume ?


Cyril Marchiol : Oui, j'en ai déjà eu entre les mains, mais c'est des souvent des blagues. Parfois, on trouve un niveau de réalisation correct mais il reste des détails dont ces fabricants se fichent : les yeux sont retournés, la figurine ne tient pas, la résine est collante donc toxique... Ce sont des défauts qui craignent donc vraiment. Le plus inquiétant reste les produits sans licence qu'ils réalisent et à un niveau correct, mais ça n'aura jamais le niveau de nos réalisations. A une période, beaucoup de contrefaçons de nos figurines Dragon Ball et Bleach circulaient, c'était honorable mais ça n'était pas de notre niveau. De notre côté, on essaye d'atteindre les sommets en terme de qualité.




Est-ce que vous vendez parfois au Japon ?

Cyril Marchiol :
Ça dépend. Pour Raoh de Hokuto no Ken, on a cartonné. Nous avons vendu une centaine de pièces au Japon.

Quelle serait la figurine que tu rêverais de faire ?

Cyril Marchiol : Il y en a plein... Mais je rêverais de faire Jotaro Kujo. Je suis un gros fan de Jojo's Bizarre Adventure mais surtout de Jotaro qui a un charisme de dingue. Je n'ai pas connu Jojo sur son âge d'or, je zappé la série pour la voir plus tard, quand j'avais une vingtaine d'années. J'étais vraiment comme un dingue.

Pour parler des Tsume Fan Days, comment t'est venue l'idée de l'événement ?


Cyril Marchiol : La base, c'est que j'en avais ras-le-bol de Japan Expo. Pour être clair, je n'aime pas du tout le concept de cette convention. J'y ai déjà participé mais j'avais l'impression d'être une vache à lait car je devais payer énormément pour pas grand chose derrière. Je n'ai jamais eu le sentiment d'être bien accueilli là-bas, c'est pourtant un élément très important pour moi. Quand on est partenaires et qu'on travaille ensemble, soit on fait les choses bien, soit on le les fait pas. Quand on loue un stand à 20 ou 25 000 euros, c'est hors de question d'être traité de la sorte. Tout est compliqué là-bas : on n'a pas de climatisation les jours de préparation, les toilettes sont fermées... C'est inadmissible, ce n'est pas professionnel à mes yeux. C'était catastrophique pour mon équipe, on ne veut plus jamais y retourner. Nous avons aussi tenté quelque chose avec Manga Toys lors de Japan Expo, mais ça s'est très mal passé : Nous avons mis le Vegeta sur place, ce qui a attiré des gens qui ont payé leurs billets, et ils nous ont fait payer un droit d'asile, tout simplement parce qu'il y avait une vitrine qui nous appartenait... Ça pourrait être intéressant qu'on retravaille ensemble mais vu ce qui s'est passé ça ne sera plus possible.

C'est pour ça que je me suis questionné sur un événement qui attirerait du monde et qui nous ressemblerait plus. C'est là que j'ai pensé aux Tsume Fan Days.




L'évènement est très différent de ce qu'on connait en Europe : les gens sont assis et observent des présentations, c'est un peu à l'américaine... Comment t'est venue cette réflexion ?

Cyril Marchiol : Au début, c'était un truc tout petit où les fans étaient conviés, une sorte de journée portes-ouvertes. Chaque année, plus de monde venait et il fallait qu'on mette nos produits en avant le mieux possible. C'est là que j'ai pensé à un show et à Tsume Enterteinment qui produit Dedo, où on poste des vidéos sur internet... Tout ça pouvait entrer en corrélation et attirer du monde via l'humour et vers nos produits. Tout est connecté au final. L'idée est de faire parler de nous, même auprès de ceux qui n'aiment pas forcément les figurines mais qui pourraient être curieux sur leur fabrication. Avec Tsume Enterteinment, on ne s'attend pas forcément à vendre mais davantage à communiquer et faire rire les gens. C'est tout un ensemble. De nos jours, les entreprises sont toutes les mêmes et n'ont qu'un petit "truc" en plus. Personnellement, j'ai envie d'avoir ma propre identité et faire les choses comme j'ai envie. Ça me porte chance pour le moment donc tant que j'y crois, je continue.

Tout semble donc bien partie pour un Tsume Fan Days 5, mais qu'aimerais-tu rajouter l'année prochaine ?

Cyril Marchiol : En fait, j'aimerais faire venir un mangaka. Ça devait être le cas cette année, mais ça n'a pas pu aboutir. Je voudrais aussi avoir un peu plus de temps pour réaliser les Tsume Fan Days. Je pense que nous allons décaler la prochaine édition de quelques mois, elle aura donc lieu un an et demi après la quatrième édition. On veut vraiment se préparer pour faire quelque chose de plus grand et avoir plus de produits disponibles. De plus, il y a toujours des petits couacs qui me dérangent, être mieux préparés permettraient de les éviter. Enfin, j'aimerais organiser un troisième jour un peu plus convivial, une journée d'échange sans programme. Cela permettrait aussi à la presse de profiter pleinement de l'évènement. L'objectif serait donc d'éliminer le stress pour que tout se passe le mieux possible.




Quels sont tes critères de choix pour les licences ?

Cyril Marchiol : Les coups de cœur. Terra Formars par exemple, le manga a été un coup de cœur donc je voulais faire des produits.

Est-ce qu'un de tes associés t'a déjà présenté une série pour faire des figurines ?

Cyril Marchiol : Oui, bien-sûr. Dans ce cas ça peut être très cool tout comme ça peut ne pas marcher. Dans le cas de Shôkichi Komachi de Terra Formars, ça a super bien fonctionné, on est presque sold-out. On ajuste aussi les quantités selon notre ressenti. Pour Terra Formars, c'est 600 exemplaires, ce qui est beaucoup pour cette série. Pour un produit Soul Eater, on sera à 400 exemplaires, pareil pour les Devils Bats de Eyeshield 21. Maintenant, vu que la marque a pris de l'importance, on peut se permettre de sortir des sentiers battus.

Les ayants-droits japonais essaient-il de vous soumettre des projet ? De réaliser une certaine figurine ?

Cyril Marchiol :
Ça arrive de plus en plus. Nous n'avons pas eu le temps mais à la base, on devait faire une statue Naruto spécialement pour eux.

Parlons maintenant d'Iki, la marque de vêtements de Tsume. Hormis sur le plan qualitatif, comment te différencies-tu d'Abyss ou de Neko ?


Cyril Marchiol : La différence, c'est que je veux des produits sobres et classes la plupart du temps. On tente parfois un coup de folie mais en général, on va tenter des produits entre le cosplay et l'élégant. Je pense notamment aux produits Berserk qui ressemblent presque à l'armure de Guts... Évidemment, ça a super bien marché, c'est un succès fou.

Comment cela se passe par rapport aux ayants-droits japonais ? Car se sont des créations personnelles...


Cyril Marchiol : On prépare un concept qu'on leur propose. C'est complètement différent de ce qu'ils font, et c'est ça la force de Tsume. Ils n'ont pas de point de comparaison, c'est totalement nouveau pour eux. Par cet étonnement, ça ne sera pas du tout la même démarche de leur côté. C'est ce qui nous permet d'ouvrir de nouvelles portes.

Tu nous parlais du cheminement pour les figurines Tsume où vous réalisiez un concept ou un prototype avant d'aller voir les ayants-droits, est-ce la même chose pour Iki ?


Cyril Marchiol : Oui, tout était prêt, y compris le type de polo. J'ai aussi eu plein de refus. C'est par exemple le cas de casquettes Dragon Ball Z, elles auraient fait un carton. Ce genre de refus a eu lieu pour une grosse licence, un polo et une statue.

Quel sera le mode de distribution d'Iki ?


Cyril Marchiol : Ce sera bientôt annoncé. Comme Iki est nouveau, je veux maîtriser à fond le produit pour aller plus loin. L'année dernière, la première étape était de comprendre, la deuxième est de faire évoluer le concept, et la troisième sera d'ouvrir les vannes. Nous sommes dans une phase où nous cherchons à maîtriser le concept. Une fois que ce sera fait, on ira à fond.

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