Critique de la série manga

Publiée le Mercredi, 21 Décembre 2011

Cisse est un enfant né dans d’étranges circonstances : il a été trouvé en pleine mer. Sauvé par des dauphins et finalement recueilli par un Polynésien, il grandit dans les îles où il peut communier avec l’océan. Alors que vers ses seize ans, il nageait paisiblement, un ancien recordman de plongée, Claude, est témoin de la symbiose qui existe entre la mer et lui. C’est décidé, il en fera un champion qui surpassera le record de Petit, l’actuel détenteur du titre de meilleur plongeur ! Coaché par Claude et épaulé par la doctoresse Haruka, Cisse tentera de repousser les limites de son corps afin de pouvoir aller explorer l’océan dans ses eaux les plus profondes. Mais avant, il devra rencontrer des hommes de tout horizons et leurs ambitions, qu’il aura parfois bien du mal à comprendre…

Bien qu’il soit question de sport, Glaucos est avant tout un manga contemplatif, c’est-à-dire qu’il faut surtout s’attendre à voir des séquences pensives et lentes, comme en arrêt sur image sur la nature, plutôt que des affrontements sportifs effrénés. Et ce, dès le premier chapitre.

En effet, le manga d’Akio Tanaka propose en toile de fond une réflexion sur les bienfaits de la mer, le respect qu’on lui doit et le mal qu’on lui fait. Cet aspect est invoqué par le biais de références modernes, tels que les essais nucléaires, ou bien par la vision antique de l’océan, qui a donnée son nom au manga, Glaucos étant une divinité aquatique de la mythologie grecque. C’est toutefois par la mise en scène que cette philosophie ressort le plus. Cet aspect du manga connait plus ou moins de réussite le long de la série. Souvent, le lecteur est happé dans l’ambiance onirique des profondeurs marines, grâce au talent de cette mise en scène de l’auteur. Tanaka parvient très bien à retranscrire l’ambiance à la fois apaisante et inquiétante des abysses, graphiquement notamment. Il utilise des trames plus ou moins foncées pour évoquer la profondeur, les teintes les moins foncées faisant référence aux eaux proches de la surface. Comme si le fond de la mer absorbait la lumière. Dans ces cas-là, l’immersion du lecteur est totale. En revanche, certaines autres séquences peuvent faire sourire, car un tantinet ridicules. Pour commencer, Cisse a la fâcheuse tendance à franchir les obstacles de son entrainement un peu trop rapidement. Lorsqu’en plus, ce sont des exercices à visée spirituelle, on ne peut que se demander comment Cisse peut y arriver si vite alors que c’est quelqu’un de totalement irréfléchi. Après, tout dépend de la vision de chacun. Certains lecteurs y verront tout simplement une progression fulgurante probable d’un jeune sportif, d’autres douteront de la vraisemblance de cette lucidité mentale soudaine de Cisse. Admettons toutefois ces séquences sont réussies la plupart du temps, et offrent de beaux moments de lecture.

Une autre grande qualité du manga réside dans le trio de personnages Claude-Haruka-Cisse. Chacun poursuit un but bien précis, semble déterminé à y parvenir. Mais pour y arriver, ils ont besoin de l’aide des deux autres. Chacun possède aussi un caractère bien marqué, et ils s’avèrent tous attachants et charismatiques. On pourrait décrire le triangle relationnel ainsi : Cisse est un porteur d’espoir pour Claude, qui voit lui un champion potentiel, et Haruka, qui peut découvrir grâce à lui des secrets sur la rate humaine. Cisse lui-même souhaite connaitre au mieux la mer, qui est sa raison de vivre, mais étant trop du genre fonceur-tête baissée, il a besoin de Claude qui peut l’aider à améliorer ses propres performances en tenant compte de ses capacités physiques, lui-même ayant besoin qu’Haruka évalue l’état de santé de Cisse durant son entrainement. Ces relations sont admirablement bien faites, puisque bien que très différents, ces personnages coopèrent pour leurs objectifs respectifs, mais partagent une forme d’intégrité, matérialisée par le respect de la nature. Cet élément central du manga contribue indéniablement à l’intérêt du lecteur pour la série.

Graphiquement, le style de Tanaka est reconnaissable et de qualité. Son trait fait prendre aux personnages des expressions tirées, qui peuvent être vues comme une marque de détermination dans leurs yeux. Toutefois, ils sont ainsi l’air de toujours tirer la tronche, ce qui peut paraitre assez monotone à la longue.

Mais le vrai problème du manga reste sa fin. À force d’évoquer la spiritualité liée à la mer, on pouvait se douter d’une fin quelque peu « intellectuelle ». Pour autant, Tanaka avait-t-il le talent pour offrir une fin digne de ce nom, avec un dosage savant entre vraisemblance et philosophie ? Il faut croire que non, il n’a même pas essayé. Le grand final de Glaucos est très proche de celui du Grand Bleu, le film de Luc Besson, trop proche pour relever d’une coïncidence. Si dès le début, on pouvait se douter que Tanaka ait été inspiré par le film (présence régulière de la France avec des personnages comme Claude et Petit, un héros amoureux de la mer depuis toujours), on ne pensait pas que le bouchon serait poussé si loin. Et c’est dommage, car les trois premiers volumes regorgent de qualités ! Outre celles sus-citées, d’autres thématiques intéressantes sont évoquées, comme la médecine, les techniques et les règles de la plongée, la politique et l’écologie. Le manga nous fait voyager aussi, Cisse nagera dans le Pacifique, dans la mer du Japon et en Méditerranée.

Bref, vous l’aurez compris, Glaucos propose en quatre tomes seulement une histoire riche dotée de qualités et de défauts. Qu’en retenir au final ? Il vous faudra pour cela vous faire votre propre avis…


raimaru


Note de la rédaction

Evolution des notes des volumes selon les chroniques:

17.00,15.00,16.00,12.00

Les critiques des volumes de la série