Rendez-vous au crépuscule Vol.2 - Actualité manga
Rendez-vous au crépuscule Vol.2 - Manga

Rendez-vous au crépuscule Vol.2 : Critiques

Kimi wa Tsukiyo ni Hikarikagayaku

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 08 Décembre 2020

A force de rendre visite à l'hôpital à Mamizu et de réaliser ses différents "derniers souhaits" comme autant d'étapes à passer lui-même, Takuya a déjà quelque peu changé, lui qui était effacé et distant avec tout et tout le monde depuis longtemps, en particulier depuis la mort de sa soeur Meiko qu'il n'est jamais parvenu à comprendre. Mais e contraire est tout aussi vrai: en la voyant si souvent, nul doute que l'adolescent apporte lui aussi à la jeune fille et qu'il égaye son quotidien, à elle qui est condamnée à vivre ses derniers moments de vie cloîtrée dans l'hôpital. Naturellement, un lien très fort est né entre les deux jeunes gens... mais quand, lors d'une soirée sur le toit illuminée par la lumière de Mamizu, Takuya a fait sa déclaration à la jeune fille, celle-ci l'a rejeté, dans des excuses qui en disent long... C'est alors, étonnamment, auprès de son camarade de classe Akira Kayama que notre héros pourrait trouver des éléments de réponse quant à la réaction de Mamizu.

Tandis que le refus par Mamizu de sa déclaration a forcément un certain impact sur Takuya qui est un peu dans le doute, c'est donc Kayama que ce deuxième tome commence par approfondir, en filigranes d'événements qui se poursuivent autour de la fête culturelle du lycée à préparer. Comme supposé suite à certains détails évoqués dans le tome 1, les deux garçons, bien qu'ils ne se fréquentent pas vraiment, ont plus d'un point qui les relient, que ce soit vis-à-vis de la raison pour laquelle Takuya le considère un peu comme son "sauveur", d'un rapport commun à la mort d'un proche, ou tout simplement de Mamizu elle-même, puisque, comme on pouvait s'y attendre, la jeune fille a, sans le savoir, également ébloui la vie de Kayama.

A partir de là, le récit, tout en poursuivant non sans quelques difficultés les retrouvailles entre nos deux héros et les souhaits à exaucer, accélère l'abord de ses différentes thématiques, qui s'entremêlent très bien. Il y a bien sûr, en tête, les questionnements sentimentaux autour de Takuya, de Mamizu puis de Kayama, ce dernier servant surtout de catalyseur permettant à Takuya de comprendre la réaction de la jeune fille suite à sa déclaration. Une réaction qui cache, bien sûr, tout un rapport conflictuel de l'adolescente face à la mort qui l'attend bien trop tôt: entre désir de ne plus s'attacher au monde et donc rejet des autres pour moins les faire souffrir ou moins souffrir soi-même, résignation, acceptation difficile, ou simplement la peur qu'il n'y ait absolument plus rien après, le romancier d'origine Tetsuya Sano et le mangaka Daichi Matsuse décortiquent avec sobriété mais richesse, sans forcément avoir besoin de nous plonger directement dans les pensées de Mamizu, toute la complexité du rapport qu'elle peut avoir à son inévitable fin. Mais face à ça, face à cette peur de mourir, c'est bien autre chose qu'a dévoilé au fond de lui Takuya: la peur de vivre. On le sent bien, et c'est pour ça qu'il est resté si longtemps distant, l'adolescent n'a jamais pu faire comme il se doit le deuil de Meiko, n'a jamais pu comprendre ce qui l'avait poussée à mourir, et en a gardé longtemps une difficulté à avancer et à s'ouvrir. Maintenant qu'il connaît lui aussi l'amour, il a le sentiment de comprendre un peu plus, au risque de faire la même chose que sa soeur à la fin... mais est-ce réellement là que se trouve la solution ? Les réponses données par Mamizu au jeune garçon seront évidemment très importantes, émouvantes et belles, avec au bout du compte une peur de vivre et une peur de vivre qui se transformeront, pour tous les deux, en volonté de vivre, même si Takuya devra vivre pour deux personnes à la fois.

A ce titre, l'évolution de Takuya au fil du récit aura été bien menée, chacun des souhaits de Mamizu ayant ouvert son monde, l'ayant poussé à faire des choses qu'il n'aurait jamais faites de lui-même (l'ultime exemple étant ce rôle de Juliette dans la pièce de théâtre), et les sentiments des deux adolescents ayant fini par cristalliser tout ça, poussant Takuya à vivre malgré la mort, chose que n'avait pas choisie sa soeur. Par ailleurs, on reste aussi intéressé par les différentes manières de vivre le deuil que plusieurs personnages ont montré. Takuya est devenu plus distant et morne, tandis que Kayama a pris en quelque sorte le chemin inverse en décidant de profiter sans trop se prendre la tête mais sans pour autant oublier l'essentiel. Meiko est elle-même allée vers la mort, tandis que leur mère à elle et à notre héros a gardé la peur permanente de perdre son autre enfant. Mais au bout du chemin, chacun de "ceux qui restent" pourrait évoluer, réapprendre à vivre, voire vivre pour ceux qui partent.

Enfin, on appréciera certaines petites références littéraires pleines de sens, en vers un poème de Chûya Nakahara en premier lieu, sans oublier l'abord d'un auteur fictif, Sô Shizusawa, écrivain préféré de Mamizu et auteur du roman (fictif, donc) "Un unique rayon de lumière", cet auteur imaginaire ayant lui-même été atteint de luminite et ayant vécu son rapport à la mort d'une manière finalement différente de Mamizu. De même, on pourra se régaler de toute la part symbolique liée à cette maladie de luminite, à cause de laquelle Mamizu brille toujours plus, tandis que c'est le coeur de Takuya qu'elle fait aussi briller. Le choix des rendez-vous quand il fait noir voire nuit n'est lui non plus pas anodin, puisque c'est dans ces instants que Mamizu brille, telle un lueur éternelle face à la nuit de sa maladie.

Jusqu'au bout, l'adaptation manga par Matsuse reste particulièrement soignée. Si l'on ressent éventuellement quelques petits raccourcissements (notamment pour le rôle de Riko), le mangaka fait très souvent les bons choix pour faire ressortir l'essentiel et l'intégralité des thématiques du roman, le tout dans un style visuel qui reste très sobre et adapté, sans déferlante d'émotions exagérées et de pathos. On sent le mangaka touché par l'oeuvre d'origine, et ça ne manque pas de se confirmer dans les deux postfaces de lui et de Sano, où tous deux font part avec sincérité de leur amitié qui dure depuis la fac, de leur ressenti face à l'oeuvre, voire de certaines faces de leur passé.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
15.5 20
Note de la rédaction