Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 08 Mai 2012
Vous qui êtes lecteur de bandes dessinées, qu’elles soient japonaises ou autres, vous avez pu constater l’engouement général qu’il y a pour les super-héros en ce moment. Rien qu’au cinéma, on a droit à deux énormes blockbusters cette année, avec un reboot de Spiderman et les Avengers. Depuis quelques mois aussi, le marché du comic-book américain s’est étendu. Beaucoup d’éditeurs s’y sont lancés, Dargaud rachetant les droits de DC et Glénat éditant des comics indépendants, par exemple. En matière de manga, les éditeurs emboitent le pas. Au mois d’avril, la réédition de Wingman de Masakazu Katsura et un petit nouveau, Ratman, arrivent en librairie. Réelle volonté de surfer sur la vague ou simple hasard ?
Lors de l’annonce de l’acquisition de la licence Ratman par Kana, beaucoup ont émis des doutes, voire ont ri. Un visuel qui n’est pas des plus originaux, un synopsis très shônenisé, un titre pas très séduisant, il n’en faut pas plus pour faire reculer de trois pas le lecteur assailli par les nouveautés et qui trie rigoureusement ses achats. Mais derrière le masque se cache parfois une surprise. Et Ratman en est une excellente.
Le pitch : grâce aux nouvelles technologies, fabriquer des surhommes n’est plus un simple rêve. Les super-héros existent et sont de véritables icônes populaires. Les entreprises s’en servent d’ailleurs pour leur image, en associant leurs produits à ces stars. Shuto Katsuragi est un petit bonhomme de quinze ans qui rêve de devenir un super-héros. Personne ne le prend au sérieux au vu de sa petite taille. La seule personne qui semble y croire est Mirea une de ses camarades de classe, une jeune blonde introvertie. Motivée par l’envie de l’aider à accomplir son rêve, elle décide de l’aider à sa façon. La sœur de Mirea est la patronne d’une organisation criminelle, Jackal. Cette organisation enlève Shuto et le transforme en un surhomme à l’aspect démoniaque. Désormais, son nom est Ratman et il devra œuvrer pour Jackal. Cruelle désillusion pour Shuto qui est devenu l’opposé de celui qu’il rêvait d’être.
Réaliser une bonne série de super-héros sur un ton sérieux avec un résumé comme ça, ce n’est pas le premier venu qui pourra y arriver, car il est facile d’accumuler les clichés consternants. Sekihiko Inui l’a bien compris et n’a pas vraiment opté pour ce cas de figure. Oui, il y a des clichés et des facilités dans l’intrigue, mais l’auteur a décidé de tout prendre au second degré avec un humour très efficace. Du coup, ces clichés et ces facilités passent comme une lettre à la poste. On ne s’étonne pas d’une situation ridicule, on en rit ! L’humour du titre est d’ailleurs incarné par les Jackys, les hommes de main de Jackal. Leur masque de squelette qui leur donne une tête marrante, leur manie de débarquer de nulle part, leur incompétence ne manqueront pas d’amuser grandement le lecteur.
Concernant les autres personnages principaux, ils sont au nombre de quatre : Shuto, Mirea, sa sœur Crea, et Rio, la fille du président de la ligue des super-héros. Celui avec le caractère le plus marqué est le héros, Shuto. Il possède une vraie détermination, il se pose sans cesse des questions sur ce qui l’entoure. Ce type de caractère est très classique pour un shônen. Il a déjà été exploré dans Reborn ! avec Tsuna et Eyeshield avec Sena. Reste qu’il est efficace pour ce type de récit, on a pu le constater dans ces mangas justement. Les autres protagonistes ont pour l’instant un rôle certain, mais trop ténu pour pouvoir réellement appréhender leur intérêt dans l’intrigue. On peut toutefois supposer la mise en place d’un triangle relationnel pour trois d’entre eux.
Le dessin est un peu standard. Le style n’est pas particulièrement original, mais l’auteur le maitrise complètement. Les mouvements sont très nets, le design des personnages est très sympathique, notamment les Jackys (pardonnez l’insistance, mais ces personnages sont vraiment bien trouvés !).
L’édition de Kana est particulièrement bonne. Le papier et l’impression sont de bonne qualité, la traduction est fluide, on a droit à quelques pages couleur en début de tome et aux gags des première et quatrième en dessous de la jaquette. On saluera aussi le rapport qualité/prix, car la série est en format « seinen » (comme Monster, Pluto, Arms) et le prix est celui d’un format « shônen » (Naruto, Hunter X Hunter). Kana a vraiment bichonné sa série !
Après Kongoh Bancho et Zettai Karren Children, on ne doute plus beaucoup de la capacité de Kana à choisir de bonnes séries dans les catalogues japonais, même si elles n’en ont pas l’air de prime abord. Ratman, c’est ce genre de séries qui se lit pour le fun uniquement, sans arrière-pensée. Une petite dose d’héroïsme, de la baston, un humour qui fait mouche, le tout bien mélangé par un auteur qui maitrise parfaitement la façon de raconter son histoire. On a bon espoir que Ratman soit le nouveau Zatchbell ! : un scénario jeune mais beaucoup de plaisir à la lecture.