Guerre des mondes (la) Vol.1 - Actualité manga

Guerre des mondes (la) Vol.1 : Critiques

Uchû Sensô

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 29 Mars 2021

Chronique 2 :

"La guerre des mondes" fait parti de ces œuvres cultes que toutes les générations connaissent, et si pour certains ce titre ne fait référence qu'au film de 2005 avec Tom Cruise, il s'agit avant tout d'un roman du célèbre Herbert Georges Wells publié en 1898!
Il s'agit là du tout premier roman de science fiction opposant les humains à une race extra terrestre, il inspira par la suite de nombreux autres auteurs pour un concept qui n'a absolument plus rien d'original à notre époque!
Si le roman a défrayé la chronique en 1938 avec une adaptation radiophonique (les gens n'étant pas familiarisé avec les concepts de la science fiction, entendant ça à la radio, ils ont réellement cru que la Terre subissait une invasion extra-terrestre), il a également connu de très nombreuses adaptations, dont la plus récente n'est autre que le film évoqué précédemment avec Tom Cruise.
Mais forcément, ce qui va nous intéresser ici c'est son adaptation en manga!
Après les adaptations (plus que réussies) des nouvelles de Lovecraft, pas étonnant que les éditeurs Japonais s'intéressent aux grands classiques de la littérature de science fiction...et quoi de mieux que d'adapter le premier roman mettant en scène une guerre entre humains et martiens?
On trouve donc ici Sai Ihara au scénario et Hitotsu Yokoshima aux dessins pour cette adaptation qui ne compte que trois volumes!
Et c'est sans réelle surprise qu'on retrouve ce titre chez Ki-oon en France, après Lovecraft, dans une édition une nouvelle fois très travaillée!

Nous sommes en 1901, à la fin de l'ère Victorienne!
Un événement étrange survient dans le petit village de Maybury en Angleterre, non loin de Londres: un étrange météorite vient de s'écraser dans un champ et attire les badauds...mais ce météorite est bien singulier puisqu'il s'agit d'un cylindre métallique.
Un jeune photographe décide donc de se rendre sur les lieux mais va rapidement être témoin d'une horreur sans nom...un canon sort du cylindre et lance un mortel rayon qui extermine tout sur son passage, la puissance du rayon étant telle qu'elle est capable de rayer les montagnes de la carte!
L'armée est appelée en renfort mais se montrera totalement impuissante face à une telle menace disposant d'une si terrible force de frappe!
Le monde entier va alors connaître un drame similaire puisque de nombreux autres cylindres tombent également à la surface de la Terre!

Force est de constater que le récit de Wells, aussi passionnant pouvait il être à l'époque à malheureusement bien vieilli, et sur de nombreux points sur lesquels nous reviendront. Et si on ne peut nullement blâmer Wells qui a proposé à son époque un chef d’œuvre marquant les esprits, on peut blâmer les auteurs de ce manga qui ont choisi de l'adapter le plus fidèlement possible sans tenir compte de l'évolution des codes du genre.

Il est malgré tout intéressant de se replacer dans le contexte de l'époque pour ainsi trouver une humanité qui ne prend la mesure de la menace qui s'abat sur elle!
A l'ère d'internet, des réseaux sociaux et de l'information permanente, de tels événements seraient connus du monde entier en quelques minutes, mais ici alors que l'envahisseur extermine des dizaines d'humains, personne aux alentours n'est au courant de ce qui se passe, pire, les soldats qui interviennent prennent cela à la légère, pour n'être que plus facilement exterminer...jusqu'à ce que le bataillon suivant intervienne...en sous estimant la menace!

Il apparaît donc difficile pour le lecteur contemporain d'appréhender une telle situation, mais à ce niveau l'ambiance est bien rendue et joue son rôle!
Dans le même ordre d'idée, la technologie de 1901 n'a rien à voir avec celle qui est la nôtre aujourd’hui, d'où une humanité totalement impuissante dans une guerre qui les dépasse!

Ce qui pose vraiment problème c'est de nous vendre cette menace comme martienne, alors que maintenant on sait tous ce qu'il en est, à l'heure où l'homme entame une potentielle colonisation d'une planète Mars sans vie.
Au regard de l'époque Mars semblait évidemment inaccessible et les connaissances scientifiques ignoraient l'absence de vie sur cette planète, mais le récit apparaît d'autant plus dépassé maintenant, et pour ma part cela m'a quelque peu gêné dans la lecture, alors qu'il suffisait de gommer ce détail pour cette adaptation et ne pas mentionner la potentielle planète des envahisseurs...après tout l'inconnu s'avère bien plus angoissant que le connu, surtout s'il est désuet.

Le vrai problème vient du personnage principal et de ses réactions qui apparaissent tout bonnement ahurissantes!
Alors qu'il est témoin du premier massacre (et qu'il a la chance d'en réchapper), il rentre tranquillement chez lui, mange calmement avec sa femme et décide sans stress de retourner photographier tout ça le lendemain!
J'ignore comment c'était raconté dans le roman de Wells, mais là ça apparaît au mieux incohérent au pire ridicule.
Il faudra attendre la deuxième moitié du tome pour qu'enfin il prenne la mesure du danger et décide enfin d'agir...des actes qui apparaissent vains au vu de l'évolution de la menace, mais au moins il réagit!

Graphiquement c'est assez inégal: si la vision des tripodes, les célèbres envahisseurs qui ont eu autant de designs que d’adaptations, est intéressante, plus organique que métallique, renforçant l'idée qu'il y a bel et bien une race belliqueuse derrière cette attaque, pour le reste le dessin est assez pauvre, en particulier pour les personnages et leurs visages! C'est bien simple les premières fois qu'on découvre le protagoniste ouvrant la bouche, étant donné que le dessinateur ne dessine pas celle ci complètement, on a l'impression qu'il a des filets de sang qui coulent sur les joues (difficile à décrire, il faut le voir).

Malgré les nombreux défauts qui viennent entacher la lecture de ce premier tome, on se laisse malgré tout prendre au jeu dans la seconde partie, curieux de découvrir la suite, même si beaucoup d'entre nous savent ce qui nous attend.

Ki-oon de son coté fait une nouvelle fois un remarquable travail avec notamment une couverture rigide renforçant l'aspect de vieux livre. Le papier est épais et de qualité, donnant faussement l'illusion que le volume est relativement épais alors qu'il se lit très rapidement.

Un premier opus intéressant mais qui (et c'est paradoxal) ne révolutionnera pas le genre!


Chronique 1 :

La Guerre des Mondes fait partie de ces œuvres modernes majeures à l'égard de la littérature de science-fiction. Roman de Herbert George Wells (ou H.G. Wells) publié en 1989, il a fait marquer pour présenter pour l'une des premières fois une fiction confrontant l'être humain à un envahisseur extra-terrestre, un concept qui sera ensuite maintes fois repris dans la culture populaire comme le cinéma, la littérature, et même le manga et l'animation. Aussi, La Guerre des Mondes a été plusieurs fois adapté, l'une des itérations les plus célèbres étant le film de 2005 réalisé par Steven Spielberg, avec Tom Cruise dans le rôle phare.

Au Japon, ce sont les éditions Kadokawa Shoten qui se sont penché sur ce roman majeur de la littérature SF, chose peu étonnante étant donné le succès des adaptations des œuvres de H.P. Lovrcraft par le talentueux Gô Tanabe. C'est d'ailleurs dans le même magazine que celles-ci, le Comic Beam, qu'a vu le jour le manga La Guerre des Mondes, dès 2018, sous le titre Uchû Sensô (littéralement « La Guerre de la Terre »). Un manga voué à s'achever avec son troisième volume, prévu au Japon pour le 12 mars 2021.

Inutile de préciser que H.G. Wells n'est pas à l’œuvre sur cette version, le romancier étant décédé depuis 1946. L'élaboration du scénario a été confiée à Sai Ihara, auteur déjà vu sur la bande-dessinée Le Coupeur de Bambous, parue aux éditions Delcourt. Le dessin, lui, est assuré par Hitotsu Yokoshima, mangaka actif depuis la deuxième moitié des années 2000, mais que nous découvrons par le biais de cette œuvre chez nous.

En 1901, le hameau anglais de Maybury est le théâtre d'un événement spectaculaire. Un gigantesque cylindre s'écrase sur une pleine, ce qui attire l'oeil de civils tels qu'un photographe, bien déterminé à immortaliser les faits par ses clichés. Mais rapidement, la curiosité vire au drame : Le cylindre abrite une forme de vie martienne dont les premières réactions hostiles ne se font pas attendre, tandis que le danger est voué à s'amplifier étant donné les autres vaisseaux qui se rapprochent de la planète. Pour ce photographe, deux obsessions ne le quitte plus : Mettre son épouse en lieu sûr, et photographier ces formes de vie turbulentes, pour immortaliser le dramatique événement connu par le genre humain.

L'histoire de La Guerre des Mondes impacte sûrement différemment aujourd'hui qu'à l'époque de la parution de l'ouvrage. Car si les récits d'invasion extraterrestre se déroulent bien souvent lors de notre époque moderne, l’œuvre de H.G. Wells, respectée dans ses intentions via cette adaptation, se déroule à l'aube du Xxe siècle, à une époque où les connaissances n'étaient pas celle d'aujourd'hui, et dont la technologie paraît forcément dépassée avec notre regard. Une mise en place qui traduit un effet inéluctable : Plus impuissante que jamais, l'humanité doit faire face à une menace qui la dépasse. Les martiens annihilent des villes en un claquement de doigt, tel un enfant qui marcherait sur une fourmilière, tandis que les cadavres se comptent par dizaines en l'espace de quelques secondes à peine. Des événements terribles présentés par le point de vue d'un être presque insignifiant, un simple photographe, qui va faire de son mieux pour sauver ce qu'il a de plus cher, tout en laissant une trace de ces événements, à sa manière, dictée par sa profession.

Nul besoin donc d'avoir de connaissance de l’œuvre initiale ou d'avoir vu une adaptation : Le présent manga est un récit neuf qui cherche à transmettre de manière fidèle les intentions du roman. Et sur le plan scénaristique, l'effet est totalement réussi. On se prend à suivre ce jeune photographe qui va devoir négocier au mieux pour sa survie, avec les moyens du bord, tout en appréciant une menace démesurée contre laquelle chaque effort est voué à l'échec et à l'impuissance. Le contexte historique joue en la faveur de cette impression, celle d'une humanité destinée au cauchemar et à l'extinction, face à cette forme de vie qui ne lui laissera aucun temps de salut. Et concernant cette menace, le rendu des tripodes exercé par Hitotsu Yokoshima est saisissante. Loin de s'apparenter à des engins mécaniques géants comme le font certaines description, le rendu organique est pertinent tant il propose un rendu lovecfratien réussi. Les tripodes semblent dénués de toute émotion tout en s'apparentant à des créatures vivantes plus qu'à des machines de guerre, et c'est ce qui les rend terrifiantes.

Et malheureusement... Ce sera peut-être la seule prouesse visuelle de ce premier tome que nous pourrons relever. Car si dessinateur a fait un travail remarquable sur les envahisseurs, le reste de son art se révèle assez plan-plan. La narration est parfois un peu trop posée, empêchant une retranscription nerveuse de l'intensité des massacres, tandis que ces derniers s'avèrent très lisses et un peu trop propres dans cette représentation de victime mutilées, charcutées et décapitées. Mais le point le plus amer vient du travail de faciès assez sommaire, l'artiste ne parvenant pas à planter visuellement des fortes émotions chez ses protagonistes. Alors, on a tendance à croire que certains personnages prennent la menace par dessus la jambe, une impression venant aussi de leurs réactions face à l'avancée des envahisseurs, soit un problème de scénario pur. Peut-être un message sur l'insouciance humaine, ce qui irait de pair avec l'envie du héros de photographier l'ennemi (ce qui pourrait être un message concernant la course au sensationnel) ? Il est peut-être un peu tôt pour juger tout cet aspect, aussi nous donnerons aux deux derniers tomes le bénéfice du doute.

Il est donc indéniable que cette version manga de La Guerre des Mondes par Sai Ihara et Hitotsu Yokoshima a ses forces, directement dues à l'oeuvre de H.G. Wells, mais malheureusement quelques faiblesses. Cela n'en fait pas une mauvaise lecture, très loin de là, mais une œuvre qui aurait pu porter son horreur beaucoup plus loin, afin de nous faire frissonner comme les versions des titres de Lovecraft par Gô Tanabe. Mais le tout se révèle tout de même plaisant et efficace dans certains pans de son ambiance, aussi nous suivrons les deux derniers tomes avec intérêt.

Et concernant le travail d'édition, Ki-oon propose une jolie fabrication, plus sobre que celle des mangas tirés de Lovecraft, mais qui a son cachet. Pas de jaquette, mais une couverture solide recouverte d'un grain intéressant, à l'allure d'un grimoire d'époque. Un choix pertinent donc, accompagné par une colorisation noir de la tranche pour renforcer l'effet, et d'un papier épais de qualité. La traduction, elle, a été assurée par Jean-Benoît Silvestre qui livre un texte efficace, et tristement cohérent avec le caractère insouciant de certains personnages, ce qui n’incombe absolument pas au traducteur mais à l'esprit de l'ouvrage.
  

Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Erkael

14 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
14 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs